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- Selon les premiers rapports, les Ssi-Ruuvi ont subi une écrasante défaite à Bakura. La flotte de ces satanés reptiles a été incapable de vaincre l’escadre humaine, bien que cette dernière se soit battue à un contre dix.

L’auteur de ce constat courroucé n’était pas présent en chair et en os dans la pièce – les toilettes privées d’un spatioport… – mais par le biais d’une retranscription globalement fidèle que laissait apparaître un petit outil de communications longues distances installé sur le lavabo, devant l’ex-général Kutchann. L’interlocuteur de ce dernier en imposait par son allure : de grande taille, revêtu d’une immense cape noire recouvrant son corps puissamment bâti, le visage presque dissimulé sous un capuchon de même couleur, il présentait une troublante ressemblance avec les héros du Panthéon Sith, et en particulier le dernier d’entre eux, le fameux Seigneur Vador.

Kutchann, debout devant l’image de son correspondant, esquissa un sinistre sourire. Quoique nouveau venu parmi ces mondes, le « disciple » qui venait de s’adresser à lui était de loin le plus efficace de ses « agents » – donc le plus prometteur. Donc le plus dangereux. L’ancien dirigeant de l’Ubiqtorate se demanda tout à coup s’il ne faudrait pas user à son égard du Triangle de la Subversion… Le problème était qu’il ne pouvait se permettre, à l’heure actuelle, de gâcher de si bons éléments. Mais… comment disait ce célèbre Maître Jedi, déjà… Yoda ? « Toujours en mouvement l’avenir est ! » Et Kutchann pourrait changer d’avis par la suite.

- Il serait temps de mettre vos informations à jour, cher ami, répliqua-t-il doucement. La nouvelle de ce désastre a déjà fait le tour de la galaxie. L’Empire ne pouvait d’ailleurs manquer d’être au courant.

Le sourire de Kutchann, à cette phrase, s’éteignit. L’irruption inopinée en pleine bataille de Naboo de la force expéditionnaire rebelle envoyée il y a peu à Bakura avait bien évidemment été fatale au Grand Amiral Takel. Certes, Kutchann avait espéré une défaite de la Flotte impériale – là n’était pas le problème. Au juste, ce qui le troublait, c’était le fait que ce Skywalker y eût participé…

Nereus avait donc échoué. Skywalker était vivant. Et ce simple fait remettait en cause certains plans qu’il avait tracés depuis déjà si longtemps.

- Cet insuccès de nos amis Ssi-Ruuk n’est néanmoins pas de nature à remettre en cause le sort de la guerre civile, fit valoir l’interlocuteur.

Kutchann hocha la tête en guise d’approbation. En ce qui concernait ces envahisseurs, le projet avait été simple – voire même simpliste. Il avait été prévu de laisser les Ssi-Ruuk s’en prendre à cette galaxie, Bakura n’étant autre que la première cible de la vague d’invasion de ces fanatiques du machinisme. L’offensive reptilienne devait ensuite traverser le système impérial « Pureté », ravagé par des guerres civiles opposant les colons humains aux minorités locales naguère persécutées et réduites en esclavage par Palpatine. Rebelles et Impériaux auraient été dans l’incapacité de repousser cet assaut, mais auraient néanmoins accompli l’effort d’essayer. Il devait en résulter un bain de sang généralisé, noyant trois camps opposés.

D’où…

D’où un affaiblissement rapide et substantiel des défenses militaires de la galaxie. Cette galaxie qu’était censée attaquer dans un très proche avenir l’immense escadre de bataille connue sous le nom d’« Armada Sanguinaire » – un titre que l’armée ainsi désignée n’usurpait nullement, oh que non… Une telle horde de combat ne comptait pas d’équivalent dans l’Histoire – du moins dans l’Histoire de cette partie de l’Univers. A moins, peut-être, de revenir à l’époque des innombrables légions Sith d’Exar Kun : mais c’était sans doute accorder trop d’honneur à ce dernier. Et d’ailleurs, l’exercice de la comparaison devenait malaisé : l’Ordre Jedi qui s’était opposé victorieusement à la soldatesque sith n’existait plus, lui…

- J’ai cru comprendre que les Ssi-Ruuk comptaient encore d’assez nombreuses divisions terrestres et spatiales, observa Kutchann. Un beau potentiel qu’il serait dommage de gaspiller.
- Que comptez-vous faire, à ce propos, Excellence ?
- J’ai justement un vol à prendre, répondit Kutchann en consultant son chrono, ce qui parut choquer, sinon vexer son « adjoint ».
- Ne préférez-vous point utiliser les ressources de notre réseau ? demanda-t-il, ton bizarrement prévenant.
- Ce ne sera pas nécessaire, rétorqua l’ex-Impérial. Dites-moi, avant que je ne me sauve : qu’en est-il de votre côté ?

L’interlocuteur afficha un sourire qui dut révéler ses dents de fauve…

- Le Moff Carivus s’est montré extrêmement coopératif, répondit-il avec une satisfaction évidente. Comme bien d’autres.

Comme bien d’autres…

- Excellent, dit Kutchann. Néanmoins, il reste un dernier détail à régler.
- Lequel, Excellence ?
- Thrawn.

La réponse avait claqué comme le fouet.

- Un Grand Amiral ? fit l’interlocuteur, surpris.
- Pas n’importe lequel, rectifia sombrement Kutchann. Il risque de nous donner du fil à retordre, dans les semaines et surtout les mois qui vont suivre. Il faudra s’en occuper.

L’individu eut une moue hésitante.

- Ce sera difficile, et vous le savez, Excellence.
- Difficile, pas impossible. Je m’arrangerai pour prendre les mesures nécessaires à cet effet. Bien ! Je dois vous laisser. Je vous recontacterai en temps utile. Vous pouvez disposer, « M. Cuf ».
- A vos ordres, Excellence ! sourit le type nommé « Cuf ».

Kutchann désactiva l’outil de communication longues distances et le rangea dans l’une des poches de son nouveau costume. C’était indéniable, le pseudonyme choisi pour l’entretien par l’interlocuteur – « Pedric Cuf » – ne risquait pas de remporter la palme de l’originalité… Mais mieux valait user des fausses identités au cours des conversations secrètes. Au cas où.

Celui qui était anciennement connu sous le titre de Directeur-Adjoint des Services de Renseignements Impériaux sortit prestement des toilettes du spatioport dans lesquelles il avait pu entrer en contact avec l’un de ses adjoints, puis se dirigea vers le hall d’embarquement où l’attendait son vaisseau long courrier. Avant de rejoindre les Ssi-Ruuk, auprès desquels ses anciennes fonctions auprès de Palpatine lui permettraient de jouer le rôle plaisant de conseiller occulte, il devait faire un saut à Kuat. Rien de bien important : simplement, disons, de la « récupération de documents ».

Le spatioport n’était guère rempli. La guerre dissuadait les gens de se déplacer d’un système à l’autre – un véritable cauchemar pour le tourisme, pour tout dire… Kutchann avait renoncé à utiliser son réseau de complicités pour fuir la vengeance d’Isard : il avait suffisamment renouvelé ses titres d’identité et sa garde-robe pour passer inaperçu. Il réutiliserait certes son ancien uniforme impérial chez les Ssi-Ruuk, mais son costume actuel lui seyait… à merveille, lui donnant une allure de cadre encore dynamique malgré son âge.

Embarquement porte neuf – dans une quinzaine de minutes. Kutchann emprunta les escalators, marcha encore quelques minutes puis arriva à l’endroit convenu, une espèce de plate-forme couverte à laquelle on accédait par le biais d’un tapis roulant modèle périmé. De larges baies vitrées donnaient sur le vaisseau – relié au hall d’embarquement par une passerelle de vingt mètres – et sur la capitale illuminée par les derniers rayons du soleil de ce monde baptisé Rhommamool. Une planète toute simple, sans histoire – sinon cette espèce de réticence à supporter la tutelle de sa planète sœur Osarian, mais pas de quoi fouetter un ysalamir…

Dans l’aire d’embarquement, quelques dizaines de personnes, essentiellement humaines, patientaient, assises ou debout, ayant conservé sur elles divers effets perso. Un gamin s’éclatait à rouler sur le sol et se relever en décochant des coups à un adversaire invisible. Le spectacle amusa Kutchann – mais exaspérait deux civils, un homme, une femme, assis paisiblement sur les sièges d’attente. Vraisemblablement les parents du si redoutable gamin.

Le gosse effectua une roulette, se retrouva nez à nez, ou plutôt nez à genoux, avec Kutchann., et releva la tête, l’air impressionné. Il doit me prendre pour un géant, songea l’ex-général.

- Eh bien mon garçon, lui dit-il d’une voix chaleureuse. On s’entraîne pour entrer à l’Académie de Carida ?
- Carida ? fit le gosse en secouant la tête négativement. Je veux pas être pilote impérial !
- Ah ! sourit Kutchann en s’agenouillant pour le regarder en face, sans prêter aucune attention aux parents dont les visages s’étaient soudainement décomposés. Et que veux donc tu faire plus tard ?

Le visage poupin du gamin afficha une expression de défi. Visiblement, il y avait déjà sérieusement réfléchi.

- Jedi, répondit-il fièrement.

Kutchann ne cilla point, mais ne répliqua pas davantage. De toutes façons, papa s’amenait déjà.

- Miko ! cria-t-il, mi-effrayé, mi-furieux. Tu n’as pas encore fini d’embêter le monsieur ? Excuse-toi sur le champ !
- Mais papa ! pleurnicha le gosse.
- Laissez, dit Kutchann en s’adressant au père. Je vois que ce grand garçon a de la suite dans les idées. (ses yeux revinrent à Miko) Quant à toi, mon jeune ami, j’espère que tu réaliseras vite que Jedi n’est décidément pas un métier d’avenir.
- Il est un peu turbulent, s’excusa piteusement le père.

L’ex-général éclata de rire.

- Au contraire, j’admire ceux qui ont de l’énergie à revendre, monsieur… monsieur…
- Reglia, répondit le père.

Ils n’eurent pas le temps – ni le souhait, sans doute – d’aller plus loin. Une voix métallisée retentit dans la salle, invitant les passagers à se rendre à bord de l’appareil. Kutchann prit congé du nommé Reglia et de son si agité fiston, puis se rendit à la porte d’embarquement, présentant ses titres de transport aux militaires impériaux qui montaient la garde.

- Bien, vous pouvez passer. Bon voyage.

Sans être le moindrement surpris, Kutchann traversa la passerelle et pénétra dans la soute d’accueil du vaisseau de transport. Un droïd de protocole le salua et le dirigea vers la place qu’il devait occuper, en première classe. L’ancien adjoint d’Isard s’assit le plus confortablement qu’il pût, se prenant à penser aux événements qui l’avaient mené jusqu’ici.

Il avait rencontré Palpatine – enfin, le nommé Dark Sidious – l’année précédant la nomination de ce dernier au poste de Chancelier de l’Ancienne République. A l’époque, Kutchann n’était qu’une obscure taupe infiltrée au sein des services de renseignements sénatoriaux – il avait été certes le premier à fouler le sol de cette atrocité nommée Coruscant. Nombreux étaient ses confrères et congénères à avoir perdu la vie depuis, fauchés par la Guerre des Clones, les épurations impériales, ou simplement les crises de violence qui secouaient occasionnellement cette galaxie. Une violence que Kutchann avait voulu exacerber à effet de l’amener lentement, progressivement à son point d’incandescence.

A cet égard, Palpatine avait été au devant de ses désirs. Leurs objectifs avaient été similaires : détruire l’Ancienne République, installer un pouvoir totalitaire. A ceci près que, dans cette alliance que Kutchann eut l’habileté de présenter comme un rapport de suzerain à vassal, le conseiller de l’Empereur voyait plus loin. Bien plus loin : l’Empire devait rejoindre le régime précédent dans la tombe. Et ce à une date précise.

La date était arrivée. Et l’Empereur était mort. Bien sûr, Coruscant était toujours aux mains des Impériaux, mais ces derniers n’étaient plus en état de résister durablement à une Alliance qui se renforçait jour après jour. Coruscant finirait par tomber, l’année prochaine sans doute. Jamais Isard ne tiendrait le coup. D’ailleurs – et Kutchann le savait grâce aux informations que lui transmettaient certains cadres de l’Ubiqtorate qui lui étaient demeurés fidèles par haine envers Cœur de Glace – Pestage avait échoué dans la quête qui l’avait mené jusque sur Wayland.

De toutes façons, ces éléments n’étaient plus que secondaires. Accessoires. Des détails. Car l’Armada Sanguinaire – la plus puissante armée jamais rassemblée depuis des siècles – pénétrerait dans cette galaxie dans quelques semaines. Et alors…

… et alors…

… et alors tout changerait…

La mission de Kutchann, ancrée sur une très longue durée, avait par conséquent été un succès total. Point de surprise : il était le meilleur agent de sa génération. C’était pourquoi il avait été envoyé infiltrer l’administration gouvernementale de cette galaxie. Et si possible obtenir suffisamment de pouvoir pour manipuler les événements dans le sens souhaité.

En s’alliant avec Palpatine, il avait misé sur le bon cheval. Au début, ce dernier s’était méfié – notamment à cause des circonstances de leur première rencontre et surtout en raison de certain élément touchant à la morphologie de Kutchann. Mais le futur général impérial avait su endormir sa paranoïa, se montrant d’une fidélité à toute épreuve. Kutchann avait même été jusqu’à améliorer certaines composantes du grand projet conçu par le Maître Sith pour renverser la République et l’Ordre Jedi… Flattez la vanité et la soif de pouvoir d’un Sith, et vous obtiendrez tout ce que vous désirez.

Et il avait tout obtenu. L’Empire proclamé, Kutchann put assister, voire participer à l’anéantissement de ce qui subsistait de l’Ancien Ordre Jedi – seuls ces admirables « guerriers » auraient constitué une véritable menace pour ses projets. Pendant vingt ans encore, le conseiller de l’Empereur devenu haut-gradé de l’Ubiqtorate avait multiplié les preuves de loyauté à son égard, obéissant au moindre de ses ordres, de ses caprices, tout en durcissant les rivalités de chaque clan de la Cour impériale. Kinman Doriana en avait fait les frais. De même que Trachta, Tarkin, Zaarin, Xizor, puis – avec du retard – Vador. Et enfin Palpatine lui-même. En moins de quatre ans, Kutchann était parvenu à éliminer tous les leaders charismatiques de l’Empire sans jamais avoir été suspecté. Pestage et Isard ? Soyons sérieux. Thrawn, par contre…

L’ironie de l’histoire était que Kutchann avait repris à son compte le Triangle de la Subversion, cette tactique du si fascinant et regretté Ordre Sith. L’Empire et la Rébellion devaient se retrouver en état de guerre permanente, pour s’affaiblir mutuellement. L’entrée en service des Etoiles Noires aurait pu rompre ce précaire « équilibre » militaire, c’était pourquoi il s’était arrangé pour renseigner les Rebelles par divers canaux afin qu’ils les détruisent. Du coup, comme l’avait si bien résumé ce crétin de Zsinj, la galaxie était à qui voulait la prendre. La Flotte impériale, l’armée impériale étaient défaites, dispersées, tronçonnées – en déroute. Quant à l’Alliance, elle devait dorénavant faire face au bilan de vingt années d’oppression palpatinienne, c’est-à-dire gérer une crise épouvantable où les haines accumulées et comprimées au cours de ces deux décennies éclataient à la manière de volcans caamasi.

Ah, Caamas… Si les Bothans s’étaient emparés de Coruscant, Kutchann aurait néanmoins fait publier le fameux Document, histoire de discréditer l’Alliance – et la réputation de cette dernière en serait sortie sévèrement entamée. C’était pour cette raison qu’il avait décidé d’impliquer Bothawui dans le complot, ce qui avait rendu nécessaire la complicité de Nesta. En cas de succès de l’opération, l’imminente percée de l’Armada Sanguinaire n’en eût été que facilitée. C’était là l’un des rares regrets de Kutchann – mais l’on ne pouvait tout avoir. Et il avait suffisamment accompli pour devenir une légende historique. Passer près de quarante ans dans un tel univers, s’incruster au plus haut de la hiérarchie gouvernementale locale et provoquer la chute de ce régime exécré, oui, voilà qui était plus que glorieux.

Pourtant, la gloire le laissait indifférent. Seul comptait le résultat produit.

Cependant, il restait encore à liquider ces deux grains de sable qu’étaient Thrawn et Skywalker. Deux ennemis jurés qui ne se connaissaient peut-être pas – cruelle ironie ! Skywalker, surtout – car il fallait à tout prix que Kutchann apportât un démenti à la Prophétie Finale, laquelle serait réduite à néant si le dernier des Jedi venait à mourir. Dans l’hypothèse catastrophiste où le fils de Vador devait survivre, les efforts que Kutchann déployait depuis de trop nombreuses années n’auraient servi à rien. Mais il ne s’en inquiétait guère. Les chasseurs de primes, Xizor, Vador, Palpatine, les Impériaux avaient peut-être échoué : lui n’échouerait pas. Du fait des récents événements, l’ancien général impérial était enfin en mesure d’utiliser quelques atouts bien particuliers… Et alors…

… et alors…

… et alors tout changerait…

- Veuillez m’excuser, lui susurra une voix féminine.

Une jeune femme venait de s’asseoir sur le siège voisin. Kutchann la jaugea en un clin d’œil. Outre d’être jeune, mince et belle – selon les critères d’ici –, elle possédait indubitablement cette classe qu’affectaient les membres de l’aristocratie, attitude que sa robe longue de teinte sombre mettait magnifiquement en valeur. Le plus remarquable, outre ces longs cheveux d’une noirceur égale à celle marquant la crinière de Cœur de Glace, c’était ce visage si finement dessiné, ce regard clair dans lequel Kutchann y décela le péché de l’ambition.

- Vous ne me dérangez aucunement, répondit-il poliment.
- J’avais cru vous avoir bousculé, expliqua courtoisement la jeune femme, l’air confus.
- Sans doute le rebord du siège, fit Kutchann, avant d’attaquer : vous aussi avez fait le choix de visiter Kuat ?
- Kuat est ma planète natale, répondit la jeune femme en caressant ses longs cheveux noirs. Je ne fais qu’y retourner après avoir achevé mes études sur Coruscant.
- Coruscant ?
- Oui, confirma-t-elle en souriant. Je suis sortie diplômée de l’Académie Impériale des Etudes Politiques (elle baissa les yeux, faussement modeste). Major de promotion.
- Mes félicitations, sourit Kutchann. L’AIEP de Coruscant compte parmi les plus réputées de la galaxie. Vous n’avez pas tenté le concours d’entrée à l’Ecole Impériale d’Administration ?

Le regard de la jeune femme se mit à étinceler.

- Peut-être à l’avenir, répondit-elle, mais l’instant ne me paraît pas être favorable pour entrer à l’EIA. Vous comprendrez bien évidemment pourquoi.

Et comment…

- Je préfère donc offrir mes services à l’administration kuati, conclut-elle, se donnant un ton à la fois naïf et pragmatique.
- Je ne puis vous donner tort, approuva Kutchann. Rien ne vaut la pratique.

Ce fut au tour de cette « charmante » voisine de poser les questions :

- Et vous ? Êtes-vous aussi originaire de Kuat ?
- Non, répondit Kutchann. Je m’y rends pour affaires.
- Industriel ?
- Je travaille pour une société d’assurances, corrigea-t-il. Nous agissons pour garantir au mieux les intérêts présents et futurs de nos clients.
- Intention louable, commenta la jeune femme en rejetant une de ses mèches noires vers l’arrière.

Le vaisseau décolla – une brève secousse, et puis… rien. Le matériel était assez haut de gamme, il fallait l’admettre. En quelques secondes, ils avaient déjà franchi l’atmosphère de Rhommamool, fonçant à travers le cosmos…

- Les assurances, murmura pensivement la jeune femme. Voilà un métier qui ne connaîtra pas la crise.
- Tout à fait, ironisa Kutchann. Notre entreprise est implantée aussi bien chez l’Alliance que chez l’Empire – le commerce ne s’embarrasse guère de politique, par ici. En fait, d’une certaine manière, nous prédisons le futur. Et la meilleure manière de prédire le futur…
- … n’est-elle pas encore de l’inventer ?

Il dut avouer que cette réplique l’avait pris de court – car c’était exactement ce à quoi il pensait. Il n’en ressentit que davantage d’intérêt pour son interlocutrice, laquelle ne quittait pas son beau sourire.

- Vous êtes une femme bien fascinante, reconnut Kutchann.
- Je m’efforce de conserver un esprit pratique, répondit la jeune femme en lui tendant la main. Enchantée de faire votre connaissance. Je m’appelle Viqi Shesh.

La main de Kutchann rencontra la sienne, la serra.

- Permettez-moi de me présenter, répondit-il sur un ton lugubre empreint d’ironie. Je suis un homme de richesse et de goût. Je n’ai que trop longtemps sévi en ce bas monde, m’emparant des âmes et de la foi des hommes… J’étais présent lorsque Exar Kun connut les affres du doute et de la souffrance… J’étais présent lorsque Dark Bane le survivant sauva sa vie et scella son destin. Ravi de vous connaître, j’espère que vous devinerez mon nom ! Mais ce n’est pas là ce qui vous interroge – en vérité, c’est la nature du jeu auquel je joue…

La jeune femme hocha la tête, pensive – et comme admirative. Du moins en apparence.

- Je ne connais pas cette citation !
- Un vieux poème inscrit sur un artefact jedi, révéla Kutchann non sans éprouver quelque regret nostalgique. L’œuvre s’intitule Sympathie pour un Sith.
- Vous vous intéressez aux Jedi ? s’étonna-t-elle.
- Disons que l’Histoire m’intéresse, clarifia-t-il. Et l’Histoire n’est-elle pas l’étude du passé, donc de tout ce qui est mort ?

Leurs regards se rivèrent. Celui, intrigué, encore jeune mais déjà perçant, de Viqi Shesh. Celui, amusé et témoin de l’expérience des décennies passées, de Kutchann.

- Je vous renvoie le compliment, dit-elle enfin. Vous êtes un homme fascinant.
- C’est trop d’honneur, répliqua-t-il. Je puis néanmoins vous assurer, sans crainte de me tromper, que vous êtes à l’aube d’une brillante carrière.

La jeune femme lui adressa un clin d’œil entendu, visiblement flattée. Décidément, se dit Kutchann, les humains révélaient des potentialités toujours étonnantes.

Et à cette pensée, un mince sourire effleura son camouflage ooglith.
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