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Gloire Impériale, phase finale
 
Cantina « Au Gnaar invisible », astroport de Tyra


Cela faisait longtemps que l’agent du contre-espionnage tyrénien chargé de surveiller les allées et venues de l’équipage de l’Emerald Sparrow avait perdu toute notion du temps. Ses seules préoccupations étaient de faire durer au maximum ses consommations et de garder un œil sur l’outre à vin dont il était « l’ange gardien ». Ça n’était guère difficile de surveiller ses allées et venues, vu qu’elle ne faisait que boire. Enfin plus maintenant : elle dormait depuis un certain temps déjà, abrutie par la quantité d’alcool ingurgitée. Une tâche facile, pas comme pour son collègue ! Lui, il risquait gros : arriver à perdre les deux autres soudards – dont une Zabrak, espèce inexistante dans le coin – dans une filature basique ! Franchement, il y a des coups de pieds au c… qui se perdaient. L’agent songea que s’il avait été à la place de son supérieur, le fautif n’aurait pas mis longtemps à se retrouver au poste le plus miteux qui soit, ou pire, viré pour faute grave…
À ce moment, la porte de la cantina s’ouvrit et laissa le passage au petit humain et à la Zabrak dont on avait perdu la trace. Leur démarche peu assurée et leur air absent trahissaient leur taux d’alcoolémie – preuve qu’ils avaient dû bien faire la fête. Ils réveillèrent leur compagne sans ménagement et la traînèrent plus qu’elle ne les suivit hors de la cantina. L’homme attendit quelques minutes après leur départ avant de régler ses consommations et de sortir en se donnant la démarche du poivrot de base. Une fois dehors, il suivit à quelque distance le trio afin de s’assurer qu’ils regagnaient comme prévu leur vaisseau. Ses suppositions confirmées, il quitta l’astroport avec une autre pensée en tête : celle que la tête de son collègue était peut-être sauvée vu que ces « suspects » avaient l’air bien innocents…

***


Tyra, siège du gouvernement provisoire


Un nouveau jour s’était levé sur Tyra. Une journée de liberté de plus, songea le gouverneur Rees. Le temps travaillait pour le projet d’indépendance si cher à son cœur. Chaque heure qui passait était mise à profit par ses hommes de confiance pour assurer le succès final de ses plans.
En attendant, il devait toujours gérer les affaires courantes ; à commencer par viser le projet de réforme du système éducatif qu’il avait laissé en plan la veille au soir. D’un autre côté, cette soirée à l’Opéra lui avait permis de se détendre, ce dont il avait bien besoin.
Sa patrie d’adoption avait beau être en état de guerre ouverte avec l’Empire Galactique, certaines choses ne changeaient pas de l’ordinaire, comme le salut du gardien lorsque son landspeeder franchit l’enceinte du parking ou encore le sourire enjoué de la réceptionniste à l’entrée du bâtiment. Quelques minutes plus tard, il était dans son bureau et s’apprêtait à s’asseoir dans son fauteuil quand il se figea. Ce… C’est impossible ! Il mit une bonne minute à reprendre sa respiration et à calmer les spasmes de son corps. Sans plus tarder, il actionna l’intercom et alerta la sécurité. La journée ne serait pas si bonne que ça, finalement…

« Quelqu’un s’est introduit dans mon bureau et y a déposé cet hologramme, annonça-t-il sans préambule aux agents répondant à l’alerte. Il y a peut-être d’autres surprises : passez le bureau au peigne fin et trouvez-moi qui a fait ça. »
Rees quitta la pièce sans plus attendre, laissant les hommes à leur tâche. Dans le couloir, il fut abordé par une secrétaire qui l’informa que le commodore Phanteras cherchait à le joindre.
Dans la salle de conférence où on le mena, une autre mauvaise nouvelle attendait Rees :
« Mon attaque sur les forces impériales a échoué, gouverneur.
– Quoi ?
– Je suis arrivé à faire reculer leurs lignes et à isoler plusieurs de leurs unités. J’étais sur le point d’attaquer leur vaisseau amiral et je pensais que Waldemar réagirait en faisant intervenir ses renforts.
– Oui, je me souviens que votre plan était d’évaluer sa force exacte à partir des renforts qu’il mettrait en jeu.
– Exact. Seulement voilà : il n’a pas fait intervenir ses renforts et s’est contenté d’un tour auquel je ne m’attendais pas. En bref, il a réussi à repousser mon attaque sans sourciller. Je n’ai perdu aucun vaisseau lourd mais la correction fut sévère.
– Bon sang, vous m’aviez pourtant assuré que vous étiez à même de vaincre votre ancien professeur !
– Et je le suis. Seulement, nous étions d’accord sur le fait que cette bataille ne devait avoir lieu qu’au moment opportun et ça n’a pas été le cas. Je me contentais de jauger ses forces. Sur ce point, mon avis est simple : pour l’amener à attaquer avec tous les vaisseaux à sa disposition, il faudra un appât juteux.
– Oui, vous avez raison, soupira le gouverneur. Le gouverneur soupira. Pardonnez-moi de m’être emporté mais nous devons nous dépêcher : on s’est introduit dans mon bureau et je ne sais pas encore si mes archives sont compromises. Vous superviserez donc personnellement la phase finale de l’opération. Je ne vous recontacterai pas tant que la sécurité n’aura pas fini son enquête. Bonne chance, commodore. »
Phanteras ne répondit rien mais on pouvait voir sa fureur à l’idée que Rees ait pu commettre un impair qui mettrait leurs projets en péril. Quand l’image du gouverneur eut disparu du projecteur, il lâcha une flopée de jurons datant de ses années à l’Académie Navale Impériale. Et il avait de quoi être furieux : leur plan était encore loin de son déclenchement qu’il était déjà en péril !

***


Emerald Sparrow, astroport de Tyra


Une fois rentrés à bord, Sanaz et ses deux compagnons prirent un peu de repos vu qu’Ashoka devait maintenant craquer les codes d’accès aux données du gouverneur. Finalement, ce n’est pas l’expert informatique du groupe qui les réveilla comme convenu mais le chef de station des Renseignements Impériaux. Ils le découvrirent au pied de la passerelle, attendant qu’on daigne bien lui permettre de monter à bord.
« Mais que faites-ici ? lui demanda Sanaz.
– Je viens pour vous aider dans vos recherches. J’ai ici, ajouta-t-il en montrant ostensiblement la mallette qu’il portait, de quoi recouper vos découvertes d’hier soir.
– D’accord, allons voir où en est notre « expert ». »
Ils retrouvèrent Ashoka dans le carré. Avec ses traits tirés et ses yeux injectés de sang, il avait l’air tout droit sorti d’un holofilm d’épouvante mais le sourire avec lequel il accueillit tout le monde était éloquent :
« Ça n’a pas été évident mais je suis enfin arrivé à pénétrer dans cette machine. Que cherchons-nous exactement ?
– Tout ce qui sortirait de l’ordinaire pour un secteur aussi reculé, répondit Agmeninis. Transferts de fonds suspects, disparitions de biens, des choses qui ne devraient pas se trouver là, un journal intime…
– Vous ne savez pas ? » s’étonna Jia.
L’espion la fusilla du regard mais il fut coupé par Sanaz avant d’avoir pu lancer une répartie cinglante :
« Ashoka, essaie de trouver un inventaire de pièces détachées pour stations spatiales : Ce fameux constructeur universel était installé sur l’une d’elles. Et comme elles sont toutes déployées dans le système Boreus…
– Compris, chef. »
S’ensuivit alors une longue attente pendant laquelle Ashoka s’acharnait furieusement sur son clavier, engagé dans une conversation technique avec un Agmeninis qui n’était pas en reste lui aussi et recoupait toutes les informations relevées par l’ex-fantassin. La matinée était bien avancée quand les deux hommes firent un point sur leurs investigations :
« Nous avons effectivement une piste possible au niveau des pièces détachées, résuma Ashoka. Ils en ont commandé plus que de raison. Évidemment, ils pourraient juste être prudents et avoir anticipé le conflit.
– Sauf que ? enchaîna Sanaz.
– Sauf que nous n’avons plus aucune traçabilité de ces pièces ou d’aucun autre inventaire militaire dès leur arrivée dans le secteur, répondit Agmeninis.
– C’est inconcevable, s’étonna Jia. Ils doivent bien garder une trace quelque part !
– Oui, continua l’agent de renseignements. Et ces traces sont certainement au quartier général de leurs forces. Je n’ai aucun moyen d’y accéder, car jusqu’à la sécession, l’armée tyrénienne était l’armée impériale. Donc, aucune raison de les surveiller.
– Nous ne sommes donc pas plus avancés, en conclut Derek. Que fait-on ?
– Il y a encore une option, décréta Sanaz : rechercher toute les disparitions de vaisseaux, attaques de pirates et autres ayant eu lieu récemment dans le secteur et les superposer à une carte. »
Quatre paires d’yeux, pour le moins intriguées, la dévisageaient comme si elle venait d’annoncer qu’elle était l’Empereur en personne.
« Écoutez, s’expliqua-t-elle, si ils ont construit cette machine, ils l’ont fait dans un endroit reculé du secteur. C’est le plus logique, non ? Ils doivent aussi la garder jalousement et tout faire pour éloigner les curieux ou les plus malchanceux pour tomber dessus par hasard. Et ça signifie qu’ils pourraient être allés jusqu’à organiser une série de disparitions « mystérieuses » pour couvrir leurs traces. Vous pouvez faire cette vérification ? demanda-t-elle à Agmeninis.
– Bien sûr. Par contre, ça risque d’être un peu long. Jusqu’à quelle date voulez-vous que je remonte ?
– Tout ce qui s’est passé depuis huit mois. »
L’homme acquiesça et se mit au travail avec sérieux.

***


Tyra, siège du gouvernement provisoire


Le bureau du gouverneur Rees s’était transformé en champ de bataille : une dizaine d’inspecteurs du contre-espionnage examinaient minutieusement chaque centimètre carré de la pièce, ils tâtaient les fonds de tiroir, passaient la tête sous les meubles, utilisaient de complexes – et coûteux – détecteurs électromagnétiques. Il ne fallut pas longtemps à l’un des agents agglutinés autour de l’ordinateur pour découvrir l’étrange appareil connecté à l’une des prises réseaux de la machine.
Ce truc ne devrait pas se trouver là, raisonna l’homme. Cela pourrait n’être qu’un support de données amovible mais il ne portait aucune marque pour le prouver ou l’infirmer. Il aurait dû porter cet évènement à l’intention de son supérieur mais sa nature consciencieuse le poussait à poursuivre l’examen de l’ordinateur, de crainte qu’un indice important ne lui ait échappé. Il songeait aussi à ses dettes de jeu et à cet homme à l’air sympathique qui lui avait promis de les effacer et qui lui avait suggéré de ne pas s’affoler face à ce genre d’indices importants. Tout cela à condition que l’agent lui raconte un peu les anecdotes de son travail autour d’un verre. La pause était dans deux heures, constata-t-il. Il n’aurait qu’à donner l’objet à son chef un peu avant.
Au poste de sécurité, une autre équipe d’agents visionnait les enregistrements des caméras de sécurité. Rees les y rejoignit, non pas pour les surveiller mais tout simplement car il aimait bien savoir ce qui se passait. Un examen minutieux des bandes indiqua que seule la femme de ménage avait pénétré dans le bureau du gouverneur la nuit précédente. Tout ce que les agents purent tirer de ce passage était que la jeune femme était bien celle qui avait déposé l’hologramme sur le bureau de Rees. Elle n’avait apparemment rien commis de suspect même si sa chute devant l’ordinateur éveilla les soupçons de plus d’un agent.
« Interrogez-là, ordonna le gouverneur. Contactez la société où elle travaille et ramenez-la. Je veux savoir pourquoi elle a déposé cet objet sur mon bureau et d’où elle le tient. »
Certain d’avoir une réponse à ses interrogations – même si il redoutait la nature de celle-ci, Rees se mit à transpirer. Ce n’est que lorsque le chef de la sécurité vint lui faire un rapport qu’il se rendit compte que ses mains tremblaient. Il les croisa derrière son dos pour les cacher et écouta le rapport :
« D’après la société Agmeninis, cette personne était une intérimaire embauchée en remplacement il y a deux jours. Elle ne s’est pas représentée depuis hier soir. »
Rees jura et voulut tourner les talons mais l’autre n’avait pas fini. Visiblement encore plus mal à l’aise que le gouverneur, il continua :
« Il y a autre chose… Mes hommes ont trouvé un appareil espion accroché à votre ordinateur. Il permettrait à n’importe qui pouvant craquer les codes d’accès de consulter vos fichiers. Au vu des enregistrements des holocaméras, seule cette femme de ménage a pu le poser, même si nous n’en avons aucune preuve formelle.
– l’Empire… fut tout ce que les lèvres du gouverneur purent exprimer. Un espion impérial sans aucun doute ! Si elle a posé cet engin hier soir c’est qu’elle faisait partie du convoi que Phanteras nous a envoyé depuis Boreus ! Je croyais que ces personnes étaient sous surveillance, commandant ?
– Effectivement, gouverneur. Je peux même affirmer qu’aucune n’a été perdue de vue plus d’une min… commença-t-il en consultant un databloc. Sauf que… l’équipe chargée de surveiller les antiquaires indique que deux d’entre eux – un des hommes et la Zabrak – ont échappé à leurs « anges gardiens » durant plusieurs heures. Apparemment ils auraient fait la tournée des bars mais les horaires correspondent avec ceux de l’équipe d’entretien.
– Quoi ? Rees manqua de s’étrangler de rage. Ces agents seront jugés pour faute grave ! Ramenez-moi l’équipe d’entretien et ces antiquaires. Passez leur vaisseau au peigne fin et ne laissez rien passer cette fois ! »

***


Emerald Sparrow, astroport de Tyra


Une exclamation d’Ashoka fit sursauter tout l’équipage du Sparrow :
« J’ai été déconnecté !
– Hein ?
– J’ai perdu la connexion à la machine du gouverneur. Impossible de la retrouver, je coupe la liaison avec le vaisseau, décréta-t-il.
– On dirait qu’on a été découverts, affirma Derek. Je vais activer le préchauffage des moteurs. »
Une dizaine de minutes plus tard, le comlink d’Agmeninis retentit. La communication fut brève et l’annonce qu’il fit à l’équipage du Sparrow, éloquente :
« Votre mouchard a bien été découvert par la sécurité du gouverneur. Ils ont l’ordre de vous arrêter et de me retrouver pour m’interroger au sujet de la remplaçante envoyée nettoyer le bureau de Rees.
– On a un sérieux problème, là, remarqua Ashoka.
– Oui. Je ne peux que vous conseiller de fuir la planète sans plus tarder. Voici un rapport de mes activités depuis le début de la crise. Si vous avez l’occasion de le transmettre au Centre Impérial, n’hésitez pas. Dans le cas contraire, détruisez-le.
– Pourquoi ne venez-vous pas avec nous ? demanda Jia.
– Parce que ce serait avouer ma culpabilité. Rassurez-vous, je sais comment me cacher de la police locale. Ah, ajouta-t-il en jetant un œil à son terminal, j’ai quelques résultats préliminaires de ma recherche. Je vais vous les transférer sur un databloc. Sinon, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter bonne chance et à vous demander pardon pour les préjugés dont j’ai fait preuve à votre égard, sergent Miren. Je reste quand même sur ma position : des militaires ne devraient jamais s’occuper des affaires du renseignement. Et on ne devrait pas accepter n’importe qui dans l’armée », finit-il dans un murmure.
Sur ce, il rassembla ses affaires et quitta le vaisseau. La dernière vision qu’ils eurent d’Agmeninis était celle d’un passant tout ce qu’il y a de plus commun, déambulant tranquillement dans l’astroport.

***


ISD Retaliator, système de Boreus


Le lieutenant Oberran, commandant en second du destroyer s’était attablé à la rédaction du rapport sur la dernière attaque. Tâche fastidieuse mais nécessaire car elle permettrait d’évaluer précisément les pertes subies par les Tyréniens. Le contre-amiral pourrait donc en retirer de précieuses informations. À ses côtés, un enregistrement holographique de la bataille se jouait en boucle. Il l’interrompait de temps à autre lorsqu’il désirait obtenir plus d’éléments sur un point particulier de l’engagement.
Il venait de terminer la partie dévolue aux chasseurs et s’attardait sur l’attaque frontale menée par les forces de Phanteras sur le Retaliator quand un détail l’arrêta. En fait de détail, il s’agissait plutôt d’une impression de déjà-vu. Il mit l’enregistrement en pause et zooma sur ce qui l’intriguait. Après un instant de réflexion, il se tourna vers son terminal et chargea l’holo de l’engagement précédent. Plusieurs minutes de comparaison plus tard, il frappa des mains et sortir précipitamment de sa cabine, non sans avoir effectué une copie des données sur son databloc.
Il arriva à moitié essoufflé sur la passerelle, où le contre-amiral Waldemar discutait avec le capitaine Joris et les chefs d’escadrons embarqués de la meilleure manière de déployer la chasse en cas de combat rapproché.
« Amiral, commandant… Vous devez voir ça ! »
Sans autre forme de procès, il connecta son databloc au projecteur holographique central et appela les deux enregistrements, effaçant par là-même les supports de la discussion des officiers.
« Voilà : sur votre gauche, il s’agit de la dernière attaque tyrénienne. À droite, le combat qui a suivi notre arrivée dans le système. Regardez ces deux Dreadnoughts. »
Le collège d’officiers examina attentivement les deux images. Au bout de quelques minutes, Waldemar, qui n’en tenait plus, interrogea Oberran :
« Et bien, lieutenant, que devrions-nous remarquer au juste ?
– Il s’agit du même cuirassé.
– Hein ? s’exclama le capitaine Joris. Comment arrivez-vous à cette conclusion, lieutenant ? Je vous rappelle que le Dreadnought de droite a été détruit à plus de 80 pour cents, les Tyréniens n’ont remorqué qu’une épave et ne disposent pas de chantier spatial digne de ce nom.
– Justement, ils en ont forcément un car c’est bien le même vaisseau qui a été réparé et que nous avons affronté à nouveau. Il interrompit de la main un autre officier qui s’apprêtait à le contredire. Mais ce n’est pas tout, poursuivit-t-il. Regardez sur ces images : les turbolasers du Retaliator frappent près du poste médical. Beaucoup de débris sont éjectés mais aucun corps.
– Que voulez-vous dire ? lança Waldemar. Il n’y avait peut-être pas encore de blessés à ce moment de la bataille. Peut-être qu’ils ont réaménagé leurs cuirassés.
– Impossible car il avait été durement touché juste avant. Non, pour moi cela signifie qu’en plus d’avoir réparé une épave en un temps record, ils ont remplacé une bonne partie de l’équipage par des droïdes. »
Un long moment de silence suivit cette annonce fracassante. Waldemar finit par briser le silence :
« Les évènements viennent de prendre une tournure plutôt inattendue, on dirait. Capitaine, veuillez préparer un rapport à l’intention du Centre Impérial et demandez-leur si cela affecte nos ordres. Lieutenant, pensez-vous pouvoir déterminer si d’autres vaisseaux tyréniens ont subi les mêmes modifications ?
– C’est possible mais ce sera sans doute assez long : je dois revisionner tous nos enregistrements et…
– Alors il n’y a pas un instant à perdre. Prenez tous les hommes de la section renseignements et attelez-vous à la tâche. Allons messieurs, au travail avant qu’ils ne nous envoient une flotte flambant neuve aux trousses. »
Waldemar s’écarta pour laisser passer les officiers et laissa ses pas le porter jusqu’à la baie de transparacier qui ornait la passerelle. Par les os noirs de Dooku, comment ont-ils pu trouver le temps et les ressources pour accomplir tout ceci ?

***


Emerald Sparrow, astroport de Tyra


Assis dans le siège du copilote, Derek surveillait d’un œil l’extérieur du vaisseau, prêt à avertir ses compagnons de l’arrivée des forces de sécurité boreo-tyréniennes. De l’autre, il contrôlait l’avancement de la séquence de démarrage des moteurs du cargo léger. Allez, allez… Dépêche-toi…
De son côté, Ashoka était dans la salle des machines et s’acharnait à mettre en œuvre toutes les astuces qu’il connaissait pour accélérer le préchauffage des moteurs subluminiques. En même temps, il prêtait une oreille distraite au débat plutôt animé qui accaparait Sanaz et Jia à propos de l’analyse des résultats de la recherche lancée par Agmeninis.
« Il y a eu pas mal d’attaques du côté de Boreus et des nuages de gaz de Vishii et Elshii, constata Jia.
– Non, ça ne colle pas, répondit Sanaz. Boreus est à la frontière, c’est trop fréquenté. Pour les nuages de gaz, ça peut être intéressant mais je ne les placerais pas en tête de liste.
– Pourquoi ça ? lança Ashoka tout en manipulant un panneau de contrôle.
– Ils auront besoin de beaucoup d’énergie pour faire fonctionner leur usine, et construire ou importer la centrale nécessaire aurait été trop compliqué et pas assez discret. D’après les analyses de certains historiens, la Forge Stellaire pompait l’énergie d’une étoile naine à proximité.
– C’est quand même se donner beaucoup de mal pour un gain pas si évident que ça, constata Ashoka.
– Il n’y a pas une étoile sans système habité dans la région ? demanda Sanaz, ignorant la remarque de son subordonné.
– Si, une naine blanche du côté de ce qu’ils appellent le « Puits ». Une sorte d’amas de trous noirs et d’anomalies gravifiques.
– Et a-t-on des résultats à ces endroits ?
– Et bien… Une seule disparition dans le coin. Un yacht de plaisance. Équipage retrouvé dans une capsule de sauvetage quelques jours plus tard. Amnésie complète. Aucun indice sur ce qui a pu arriver au vaisseau.
– C’est là ! décréta Sanaz.
– Hein ? » s’exclamèrent Jia et Ashoka, interloqués.
Ils n’eurent pas le temps d’entendre la réponse de Sanaz car Derek les héla par l’intercom.
« Alerte, la police tyrénienne arrive ! Je décolle immédiatement. »
Le vaisseau frémit une demi-seconde plus tard et se mit à tanguer légèrement, signe que Derek venait d’activer les répulseurs pour les arracher à l’attraction planétaire.
« Jia, dans la tourelle dorsale, tout de suite ! ordonna Sanaz. Ashoka, tu surveilles les moteurs, ce n’est pas encore le moment de sortir la tourelle ventrale. »
Sur ce, elle courut vers le poste de pilotage et s’installa dans son siège.
À l’extérieur, on apercevait un chaos indescriptible : à moitié pris de court par le décollage en catastrophe du Sparrow, les agents des forces de sécurité tyréniennes s’agitaient dans tous les sens. Certains, plus avisés que d’autres, tiraient sur le cargo en fuite mais leurs pistolets-blasters n’avaient aucun effet. De toutes manières, le vaisseau avait déjà levé ses boucliers.
« Maintenant il s’agit d’échapper aux chasseurs qu’ils ne manqueront pas de nous envoyer. Jia, ouvre l’œil.
– Reçu. Tourelle en service, je suis prête à faire feu.
– Derek, charge les coordonnées du saut d’urgence, que nous quittions le système au plus vite. Ensuite, une série de quatre à cinq sauts pour masquer nos traces. Du point d’arrivée, nous devrons pouvoir envoyer un signal hyperspatial à destination de la flotte qui assure le blocus. Ensuite, direction le « Puits ».
– Ok, sergent. » Répondit-il, faisant pour une fois usage du grade réel de sa supérieure ; preuve de sa concentration.
Les minutes qui suivirent furent interminables. Ils avaient peu de chances d’être interceptés alors qu’ils traversaient les couches supérieures de l’atmosphère de Tyra mais ils étaient presque aveugles pendant cette partie de leur trajet, et n’avaient donc aucun moyen de savoir ce qui les attendait en orbite.
« Ça y est, nous avons quitté l’atmosphère, annonça Sanaz. Pas le temps de se mettre en orbite pour bénéficier de l’accélération, je coupe tout droit jusqu’à ce qu’on sorte du puits gravifique. Des contacts sur le radar ?
– Oui, quatre chasseurs qui font mouvement pour nous intercepter. Ils seront à portée de tir d’ici une minute. Leur vecteur d’approche les placera dans nos sept heures, Jia.
– Noté, je les attends.
– En selle, alors. Ashoka, je vais mettre la gomme sur les propulseurs subluminiques. Préviens-moi s’ils chauffent trop.
– Reçu. Tout est nominal pour l’instant. »
La minute parut durer une éternité. Les conversations s’étaient tues à bord, chaque membre d’équipage se concentrant sur la manœuvre du vaisseau ou la surveillance des alentours. Jia eut les chasseurs tyréniens en visuel alors qu’ils venaient de franchir la moitié de la distance qui les séparait du cargo. Elle les reconnut comme étant des Alpha-3, identiques à ceux embarqués par la Marine Impériale. Le leader de la formation les héla alors par la radio subspatiale :
« Emerald Sparrow, ici les forces d’autodéfense du secteur Boreo-tyrénien. Coupez immédiatement vos moteurs et préparez-vous à être arraisonnés ou nous ouvrons le feu. Attention, il n’y aura pas d’autre avertissement. »
Pour toute réponse, Sanaz ouvrit un peu plus la manette des gaz. Il ne fallut pas longtemps aux quatre chasseurs pour rattraper les Impériaux et ouvrir le feu sur eux en tir croisé. Un tonneau rapide sur bâbord évita au vaisseau le plus gros des lasers mais les boucliers eurent quand même à absorber une partie des tirs.
« Trois minutes avant la sortie du champ gravitationnel de Tyra, annonça Derek. »
L’annonce fut ponctuée d’une rafale partant du Sparrow. Jia venait d’entrer en action. Son coup manqua les chasseurs tyréniens mais les força à s’éparpiller. Ils s’éloignèrent de leur proie deux par deux, avec l’intention de faire demi-tour et de la prendre en tenaille.
« Jia, essaie d’endommager leurs stabilisateurs latéraux, ça les rendra moins maniables, lui conseilla Sanaz.
– Compris. Attention, ils reviennent. Je m’occupe d’abord de ceux à neuf heures. »
Cette fois, la jeune femme n’attendit pas le dernier moment pour tirer et ouvrit le feu le plus tôt possible. Les appareils tyréniens esquivaient les tirs mortels comme si il s’agissait de simples insectes et se rapprochaient inexorablement.
Les quatre chasseurs firent feu simultanément, mais cette fois, le Sparrow ne tenta pas d’éviter les coups. Le réacteur tribord fut endommagé ainsi que l’aileron bâbord, tout près du cockpit. Jia n’avait touché aucune cible jusqu’à présent, mais, à l’instant où les Tyréniens se croisèrent au-dessus du cargo, elle visa le second groupe qui amorçait une chandelle et réussit à toucher l’un des Alpha-3 au niveau du stabilisateur bâbord.
La pièce était encore en place mais, quand le pilote voulut transformer la chandelle en looping, elle s’arracha violemment du vaisseau et s’encastra dans la tuyère tribord du second chasseur. Une grande flamme apparut, puis, en un éclair éblouissant, le vaisseau se transforma en boule de feu. Les flammes moururent presque aussitôt, ne laissant qu’un nuage de débris.
« Joli tir, Jia ! cria Sanaz, impressionnée. Derek, combien de temps ?
– Une minute.
– Ça n’ira pas, décréta Jia. Cette fois, ils viennent de tous les côtés et sous mon angle de tir.
– Reçu, je vais balancer le vaisseau de droite à gauche. Préviens-moi quand ils seront sur nous. »
Le Sparrow entama alors une série de demi-tonneaux pour permettre à la tourelle d’arroser tout à tour leurs adversaires.
Les Alpha-3 se rapprochaient et tiraient comme des déments. Le contrôle auxiliaire bâbord partit en fumée ainsi qu’une partie de l’alimentation de secours. Dans les coursives du cargo léger, les lumières clignotaient à chaque impact malgré les manipulations frénétiques d’Ashoka dans la salle des machines pour conserver les fonctions critiques.
Les trois appareils tyréniens furent soudain tout près et Jia le signala à Sanaz. Sans prendre le temps de répondre, la Zabrak dirigea le Sparrow vers le chasseur le plus proche. Ce dernier fit une embardée pour les éviter et se jeta contre l’un des ses ailiers qui suivait le cargo. Le dernier appareil fut secoué par les débris de l’explosion et dut faire un long virage pour revenir vers sa cible. Le temps qu’il soit en position, l’Emerald Sparrow avait sauté en hyperespace.

***


Siège du gouvernement provisoire, Tyra


Le gouverneur Rees écumait de rage : non seulement le dénommé Agmeninis, directeur de la société éponyme et soupçonné d’espionnage pour le compte de l’Empire Galactique était introuvable mais, de surcroît, des quatre chasseurs envoyés à la poursuite de l’Emerald Sparrow, un seul était rentré – bredouille – à sa base. Rees ne se voilait pas la face : la situation était critique. Bien qu’il ait veillé avec le plus grand soin à ce qu’aucune trace de ses plans ne se trouve sur son terminal, il devait considérer que les agents impériaux avaient découvert la localisation de son chantier de construction secret et la transmettrait sans tarder aux vaisseaux de guerre assurant le blocus de Boreus.
Il inspira à fond pour se calmer ; il devait à tout prix garder l’esprit clair pour pouvoir agir au mieux. Il prit quelques instants pour se remémorer les briefings de sécurité qu’il avait eus avec le commodore Phanteras. L’hypothèse de la mise au jour de leurs plans par l’Ubiqtorate avait été évoquée maintes fois et la meilleure parade qu’ils avaient trouvée consistait à prendre les devants. C’était aussi simple que cela. Une bataille près du chantier en résulterait certainement mais ce n’était pas pour rien qu’il était défendu. Rees contacta donc Phanteras pour lui ordonner de rallier les abords du chantier avec tous les vaisseaux dont les défenses de Boreus pourraient se passer. Avant de se rendre personnellement sur place avec sa navette, il ordonna aussi au personnel du chantier de redoubler d’efforts.
« La liberté et l’indépendance du secteur boreo-tyrénien commencent ici », conclut-il.

***


Emerald Sparrow, hyperespace


Loin de Tyra, le cargo léger suivait une série de sauts programmés par Derek pour dérouter d’éventuels poursuivants. Les quatre membres d’équipage avaient donc mis à profit ces moments de répit pour organiser un conseil de guerre. La question qui était sur toutes les lèvres : que faire après avoir envoyé leur rapport au Retaliator ?
« Nous devons découvrir la localisation exacte de ce chantier spatial, c’est un fait, décréta Sanaz. Nos ordres stipulaient jusqu’à présent que nous étions à la recherche des plans subtilisés sur Ouranos V. Ils ne prévoyaient pas que quelqu’un puisse rendre fonctionnelle une telle chose en si peu de temps.
– Tu suggérerais que nous la détruisions ? demanda Jia.
– Au moins la rendre inopérante, répondit Sanaz du tac au tac.
– Sans vouloir paraître défaitiste, avança Derek, ça me paraît assez difficile : attaquer à nous quatre une station spatiale sans doute puissamment défendue, et cela dans une région de l’espace où abondent les anomalies gravifiques. Ne peut-on se contenter d’envoyer les coordonnées à la flotte ?
– Et comment va-t-on se procurer les plans, môssieur le stratège ? s’enquit Ashoka.
– J’attendrais que Waldemar ait capturé le chantier pour le faire étudier par des ingénieurs qualifiés.
– Nous ne sommes pas sûrs que la flotte puisse capturer intacte cette station, fit remarquer Jia. C’est pour cela que je suis plutôt d’accord avec Sanaz : il va falloir monter à bord pour au moins espérer en trouver les plans.
– Je nous vois mal arriver à bord « comme ça », surtout que le Sparrow doit dorénavant trôner en bonne place de leur liste de cibles prioritaires », constata Derek, sarcastique.
La discussion se poursuivit ainsi pendant de longues minutes. Le ton s’envenimait au fur et à mesure. Finale, après un échange particulièrement vif entre Derek et Ashoka, Sanaz intervint :
« Ça suffit, gardez votre salive pour une meilleure occasion. Voilà ce que nous allons faire : notre rapport part comme prévu à destination du Retaliator. Ensuite, Derek et moi calculons une série de sauts jusqu’à la dernière position connue du vaisseau civil qui a disparu. De là, nous rechercherons ce fameux chantier et nous nous introduirons à bord. Ne vous inquiétez pas, je crois avoir une idée à ce sujet », les rassura-t-elle.
Leur mine déconfite lui prouva pourtant qu’elle avait obtenu le résultat contraire.
« Une fois à bord, nous nous séparerons en deux groupes : Ashoka et moi rechercherons les plans et un maximum d’informations sur le chantier, tandis que Derek et Jia saboteront le plus d’installations possibles – ou essaieront de détruire la station, nous aviserons sur place. Pareil pour l’extraction : il faudra improviser là-bas. Maintenant, remuez-vous. Ashoka, tu vérifies ton matériel de piratage. Sortez les armes des cachettes. Je veux tout le monde en tenue de combat deux heures avant notre arrivée dans ce fameux « Puits ». Exécution : »
Les trois subordonnés de Sanaz auraient normalement dû acquiescer explicitement à ces ordres mais ils n’avaient pas vraiment le cœur à cela. Ils savaient fort bien qu’ils s’embarquaient dans une mission suicide. Sanaz le savait aussi et se demandait encore si c’était son sens du devoir ou de l’orgueil teinté d’inconscience qui l’avaient poussée à tenter à tout prix de s’infiltrer dans ce chantier spatial. Cerise sur le gâteau : si le plan réussissait, Ashoka, Derek et Jia l’encenseraient comme si elle avait gagné la Guerre des Clones à elle seule alors qu’elle aurait juste eu de la chance. « Ah, les joies de l’ironie… », se dit-elle.

***

Une dizaine de minutes plus tard, l’Emerald Sparrow sortit de l’hyperespace pour se positionner sur le premier des vecteurs devant l’amener à sa destination. Il en profita aussi pour larguer ses ordures comme le stipulaient les procédures habituelles avant un saut hyperspatial. Au beau milieu du nuage de débris trônait une bouteille à l’apparence anodine qui dissimulait en fait un émetteur hyperspatial.
Le zéro absolu régnant dans le vide spatial avait gelé le liquide depuis l’éjection de la bouteille. Ce qui déclencha un mécanisme ingénieux : grâce à une cellule énergétique intégrée, l’alcool fut brûlé. La place ainsi libérée permit à une antenne miniaturisée de se déployer et d’effectuer une brève émission codée dans la direction du système de Boreus. Le dernier rapport de l’Emerald Sparrow venait de partir.

***

Une intense activité avait gagné la soute du cargo : Sanaz et ses compagnons avaient ouvert une série de compartiments secrets et s’acharnaient à en sortir les armes et autres équipements militaires entreposés là depuis le début de leur mission. L’éclairage avait beau être au maximum, Sanaz ne remarqua pas la silhouette encapuchonnée assise en tailleur entre deux piles de caisses d’antiquités. Et la silhouette sourit au passage de Sanaz.

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