En voilà un roman pour le moins original !
Ronin, c’est un roman signé par Emma Mieko Candon, dont il s’agit là de la première incursion dans l’univers Star Wars. Totalement hors continuité, ce roman reprend et étend considérablement ce qui a été créé dans le premier épisode de la série TV anthologique Star Wars Visions, disponible depuis presque un an sur Disney +.
Attention cependant : si jamais vous espériez une réédition par Pocket au format poche dans quelques mois, inutile d’attendre, le roman n’est pas prévu pour l’instant dans ce format. Vous voilà prévenus ! ;-)
Alors, que vaut ce beau pavé de plus de 500 pages ? Pour répondre à cette question, je vous propose ma critique basée sur l'exemplaire VF du roman, un exemplaire offert par Outrefleuve que j'en profite pour remercier chaleureusement au passage. Mais d’abord, la couverture, le synopsis, et les informations éditoriales :
RONIN
Un ancien Sith mystérieux erre à travers la galaxie dans cet incroyable conte Star Wars. Une histoire totalement inédite, inspirée par l'univers d'un des courts métrages animés de la série Visions : Le Duel !
Aux confins les plus reculés de la galaxie, un vagabond solitaire parcourt la Bordure Extérieure. Au mépris des édits impériaux, le Rōnin n'hésite pas à arborer une lame très particulière. Son nom n'est connu de personne et nul ne sait ce qu'il recherche. Tout ce que l'on sait, c'est que la mort et le désastre fleurissent dans son sillage. Ce nom oublié, nul doute que les dieux eux-mêmes l'ont frappé de malédiction....
Outrefleuve, 22,90 €, 528 pages
La critique de L2-D2
Avez-vous vu Visions ?
Si oui, ne soyez pas étonné : les deux premiers Chapitres reprennent à la scène près l’épisode Le Duel. Le roman s’avère en réalité être une suite de cet épisode, mais il est nécessaire de nous réexpliquer le début de tout cela, histoire que tous les lecteurs soient au même niveau.
Si non, bienvenue au club : je suis dans le même cas que vous. Ronin, donc, c’est un exercice de style assez unique, la réécriture complète de l’univers Star Wars par une personne américano-japonaise. Oubliez Dark Vador, oubliez Luke Skywalker, la Guerre des Clones, Kylo Ren et la postlogie : absolument tout peut arriver dans ce roman. Et c’est tant mieux.
Mais c’est quoi, un Ronin ?
Dans la culture japonaise, un Ronin, c’est, pour résumer les choses succinctement, un samouraï sans maître. Un paria, forcé d’errer avec déshonneur, soit car son seigneur est mort, soit en raison d’une défaite : le terreau parfait pour un roman Star Wars, et un terme qui s’appliquerait parfaitement à la saga.
Dans cette version de Star Wars, les Seigneurs Jedi sont les loyaux généraux de l’Empire. Mais vingt ans plus tôt, l’un d’entre eux s’est rebellé contre cette organisation et a rallié tous les mécontents autour de lui pour former l’ordre des Sith. Après la conquête du monde capital religieux de l’Empire, la planète Rei’izu, les Sith ont tous disparu… Et vingt ans plus tard, donc, nous faisons la rencontre du Ronin, qui a passé les deux dernières décennies à traquer les survivants Sith pour les éliminer. Sauf que ce Ronin possède, lui aussi, un sabre-laser rouge, la couleur de ceux des rebelles !
Une intrigue d’ampleur galactique...
Le risque était grand de voir dans ce nouveau roman une intrigue annexe, presque inutile, reposant sur la quête d’un vieux grognon. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’en est rien : certes, nous ne connaissons pas cette version de Star Wars mais dans ce roman, ce n’est pas une quête annexe de jeu vidéo plus ou moins intéressante. Non, pas du tout : au fur et à mesure du roman, le lecteur comprend que les événements qui s’y déroulent vont avoir une influence majeure sur « cette » galaxie Star Wars. Dans un sens, mais peut-être plus encore que dans les romans de la Haute République, tout peut arriver. Et en se plaçant dans « cet » univers Star Wars, ce qu’il se passe est primordial, et nous suivons en réalité des personnages qui ont une réelle importance.
L’autre excellent bon point, c’est la réécriture à la sauce japonaise des éléments constitutifs d’un Star Wars. Destroyers Stellaires, Jedi, Sith, Empire, la Force : tout est là, mais tout est différent. Le plaisir de la redécouverte est là. Les personnages boivent du thé, il y a des pagodes, on parle d’esprit, de sorcière, de fantômes incarnés dans des cristaux kybers. Sur ce point, l’exercice de style fonctionne.
… entre les mains d’une poignée de personnages...
En fait, Ronin ressemble beaucoup à un RPG sur consoles : l’aventure commence avec un seul personnage qui, au fur et à mesure, va s’associer à d’autres, pas forcément de bon cœur, et ils vont voyager à bord d’un vaisseau commun. Ça vous rappelle Knights of the Old Republic ? Il y a effectivement un peu de ça !
Le personnage principal est donc le Ronin, personnage anonyme dont le passé nous sera dévoilé petit à petit par bribes. Et quel passé ! Bien sûr, le lecteur attentif aura compris assez vite ce dont il retourne, s’intéressant dès lors aux motivations du personnage. Motivations un peu floues, je le concède volontiers… mais on y reviendra. Le Ronin donc, très vite, se voit flanqué de compagnons plus ou moins volontaires, dont une Sith ressuscitée et guidée par une mystérieuse sorcière alors même qu’il vient de l’abattre (je vous laisse imaginer les interactions, forcément savoureuses, entre le Ronin et elle !). D’ailleurs, attention, il n’est pas rare que certains personnages soient nommés différemment par certains protagonistes. Il en sera ainsi du Ronin… mais aussi de Renard.
Renard. Voilà peut-être le personnage le plus fascinant du roman, plus encore que le Ronin lui-même. C’est finalement sur lui que le lecteur peut se pencher, tenter de percevoir les motivations, si oui ou non il joue un double-jeu, son passé, ce qui l’intéresse. Renard est un personnage imprévisible. Mais, et je suis forcé de l’admettre : Renard est un personnage assez « dérangeant ». Non pas parce qu’il est non binaire mais plus par l’usage, à mon sens, anachronique du pronom « iel » dans le Japon féodal. Cette dénomination m’a quelque peu dérouté en me sortant de l’époque si fidèlement retranscrite par Emma Mieko Candon.
Si ma critique s’arrêtait là, la note serait belle, on irait à un bien mérité 90 % ! Oui mais voilà, il reste un dernier point à aborder, hélas pas des moindre...
… mais alourdie par le style d’Emma Mieko Candon
Le style d’Emma Mieko Candon est lourd. Très lourd. C’est tout sauf fluide, en fait, tant les descriptions sont nombreuses et, surtout, longues. J’ai même appris des mots grâce à ce roman.
Mais ce qui est le plus agaçant, en fait, ce sont les innombrables moments où les personnages agissent d’une certaine façon… mais ne savent pas pourquoi ils le font ! Combien de fois l’un d’entre eux est-il sur le point de dire quelque chose pour mieux se raviser, combien de fois l’un d’entre eux répond-t-il quelque chose sans trop savoir pourquoi ? Combien de fois peut-on nous montrer Kouru agir de la même façon, avec les mêmes répliques, sans évolution ? Combien de fois peut-on montrer les personnages se trahir puis refaire équipe, comme si de rien n’était… surtout lorsqu’on comprend le passé du Ronin, justement ?
De la même façon, le fameux miroir de Rei’izu, un concept pour le moins passionnant et qui pourra vous évoquer, selon votre sensibilité, la planète Mortis de The Clone Wars ou l’antre d’Abeloth dans Le Destin des Jedi devient au fur et à mesure quelque chose de peu compréhensible, en fait. Comment fonctionne-t-il ? Sommes-nous censés comprendre que le dernier personnage dont nous faisons connaissance vivait à l’intérieur ? Je n’ai rien contre un aspect un peu mystique, un peu fantasy, nous y sommes presque avec ce roman, mais encore faut-il, sans tout nous expliquer, nous donner un peu de biscuit, quelques explications par ci par là. Il n’y en a quasiment pas. Le rôle de la sorcière aurait pu s’y prêter mais même là, ce ne sera pas le cas.
Enfin, il est dommage que le twist final soit en réalité dévoilé sous forme de flash-backs, qui expliquent certes bien de nombreux éléments de l’intrigue, mais rendent les personnages principaux totalement passifs lors de cette révélation.
Conclusion
Ronin, c’est un exercice de style en prose lui-même tiré d’un exercice de style visuel. Réinvention totale de la saga basée sur le folklore japonais, c’est finalement un juste retour des choses pour une licence qui s’était, à son origine, largement inspirée de ce même folklore. La boucle est maintenant bouclée, comme on aime à le dire. Un roman au style lourd mais qui vaut le détour !
Note : 75 %
Pour rappel, les éditions Pocket n’ont pas prévu de republier le roman au format poche dans quelques mois, donc inutile d’attendre : il faudra passer par la case grand format !
N'hésitez pas à nous dire ce que vous avez pensé du roman en vous rendant sur sa fiche ou bien sur le topic du forum !
Encore merci aux éditions Outrefleuve pour l'exemplaire offert pour la critique, et on se retrouve dans quelques semaines pour la critique d'un autre roman très attendu lui aussi mais du coté de l'Univers Officiel « canon », Horizon funèbre de Daniel José Older, dernier roman de la Phase 1 de la Haute République !
A bientôt pour une prochaine publication littéraire ! ;-)
darkfunifuteur a écrit:Y a aussi eu des problèmes d'impressions dessus ou je suis tombé sur le seul exemplaire foiré ?
j'ai deux fois les 32 premières pages
darkfunifuteur a écrit:Y a aussi eu des problèmes d'impressions dessus ou je suis tombé sur le seul exemplaire foiré ?
j'ai deux fois les 32 premières pages
L2-D2 a écrit:Et voilà la critique du roman dans la langue de Molière !darkfunifuteur a écrit:Pas ce genre de problèmes sur mon exemplaire, mais par contre, la colle de la reliure a craqué, ce qui fait que j'ai pu transporter 4 livrets de plus ou moins grosse épaisseur. Pratique pour le transporter !
Lookens a écrit:Là où je n'étais pas d'accord link224 vu que ça critique tournait en grande partie autour de la non canoncité et l'absence de personnages connus (alors que c'est un faux problème pour moi)
link224 a écrit:Lookens a écrit:Là où je n'étais pas d'accord link224 vu que ça critique tournait en grande partie autour de la non canoncité et l'absence de personnages connus (alors que c'est un faux problème pour moi)
C'est un poil plus compliqué en fait
L'absence de personnages connus peut ne me poser aucun problème (cf La Lumière des Jedi par exemple). La non-canonicité peut également ne pas m'en poser (cf The Star Wars par exemple).
Mais quand tu écris un livre non-canon avec des personnages inconnus, il faut réussir à accrocher le lecteur (surtout le lecteur un peu aguerri qui a à peu près tout lu dans SW et qui souhaite du neuf ). Et en ce qui me concerne, l'auteure n'a pas réussi à le faire. Alors y'a certes le fait que l'épisode de Visions sur lequel le bouquin est basé ne m'a pas plu qui joue, mais y'a aussi le fait (et L2 l'a très bien dit dans sa critique) que l'intrigue comporte quand même pas mal de défauts, tout comme le style
En tout cas je sais pas si ça arrivera, mais j'aimerais bien les retours sur cette œuvre de personnes qui n'ont pas, ou très peu, de bagage littéraire, ça pourrait être très intéressant à lire
Jenos Idanian a écrit:
- Apparemment sur les (quelques) exemplaires dispo à l'endroit où le bouquin m'a été acheté, un même défaut d'impression était présent (en haut à droite de la page 43). Défaut récurrent ?