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Chapitre 16 : Adieu et nouveaux départs
 
Obi-Wan était éreinté. L’explosion avait de nouveau fendu sa côte endommagée au cours de son combat contre le Omyn, et il avait souffert d’un léger traumatisme crânien qui lui avait laissé une migraine effroyable. Mais il était par-dessus tout mentalement épuisé. Les funérailles de Lay Jooles venaient juste de prendre fin, et il était sur le chemin du retour.
La cérémonie avait été tout simplement pénible. Il était entré dans la grande salle faiblement éclairée, s’était discrètement placé à l’ombre d’une colonne et avait observé en silence le ministre réciter un flot de paroles sacrées déjà tellement prononcées qu’elles paraissaient froides et impersonnelles. Son visage était certes peiné, mais également détaché, professionnel, tandis que tout autour de l’autel rituel pleuraient les proches de la jeune conseillère. Des amies d’enfance déversaient des flots de larmes dans leurs mouchoirs délicats, parfois désespérément accrochées à leur compagnon ou à leurs parents, alors que le petit frère et la grande sœur de Lay se tenaient fermement la main en fixant d’un air anéanti la fleur symbolique placée au milieu de l’autel. Le secrétaire de la Grande Conseillère avait vu arriver le Jedi et lui envoyait régulièrement des regards pleins de haine et de mépris, des sentiments qu’il partageait volontiers.
Obi-Wan s’était mis à contempler la merveilleuse fleur de behedonice qui avait été ensemencée quelques instants auparavant en tribut à Lay. Ces plantes étaient connues pour leur durée de vie extrêmement courte - de trente à quarante minutes au plus - et pour leur beauté sans pareille à l’apogée de leur floraison. La pousse était rapidement sortie du petit pot en pierre sculptée et s’était développée en une tige courte et frêle, d’où une feuille verte avait fini par sortir, aussi fraîche que si une rosée matinale s’y était déposée. Un bouton était alors apparu au bout de la tige, puis avait grandi et pris des proportions énormes par rapport au reste de la plante. Le bulbe avait ensuite littéralement éclaté, déployant de longs pétales d’abord turquoises, puis virant à un jaune doré, orange feu, rouge sang, et enfin magenta. La fleur s’était doucement refermée, le dos des pétales encore vermeil, comme rabattant un rideau de pudeur après le spectacle magique dont elle avait fait cadeau. La tige s’était enroulée sur elle-même avec la grâce d’une danseuse saluant son audience et s’était lentement couchée sur la terre humide du pot, pour se désagréger à une vitesse impressionnante. Trois minutes plus tard, il n’en restait plus une trace. Elle avait disparu, comme si elle n’avait jamais existé, rappelant à toutes les personnes présentes l’insignifiance de leur existence, à quel point la vie était éphémère. La plupart n’en avait pas besoin. Tous ne le réalisaient que trop.
Obi-Wan n’avait pas quitté des yeux la fleur qui était née, avait grandi et était morte en un battement de cils, mais il ne l’avait pas vraiment vue. Il ne pouvait penser qu’à Lay. Si jeune, si belle, toute la vie devant elle. Et d’un claquement de doigts elle avait perdu toutes ses chances d’accomplir ces grandes choses qu’elles aurait été amenée à faire. Elle n’avait pas pu prendre le temps de flétrir comme la behedonice, mais au contraire avait été brutalement arrachée à la vie par une main criminelle qu’il n’avait pas pu arrêter.
Le religieux avait levé les bras au ciel et chanté quelques vers en Panescien pour clore la cérémonie. Jusque là, Obi-Wan n’avait même pas réalisé que le basic n’était pas la langue d’origine de Panescan, et malgré les circonstances il trouva la sonorité assez agréable, comprenant par la même occasion d’où lui venait cet accent qu’il avait inconsciemment gardé pendant toutes ces années et qui lui avait valu plusieurs remarques flatteuses. Il s’agissait là d’une langue qu’il se hâterait d’ajouter à celles qu’il parlait déjà. Il n’avait pas saisi les mots, mais il savait qu’il les retiendrait toujours :

“Onghei eria sil cure
Mene turi ebehit lanea
Soa i’lestan pere sune
Caemelan e silmea”


Le ministre s’était incliné respectueusement et avait quitté la salle, laissant la famille et les amis l’espace et le temps qu’ils désiraient pour rendre à Lay Jooles un dernier hommage. Le jeune chevalier avait ensuite rabattu sa capuche sur sa tête en apercevant les parents de la conseillère se diriger vers la sortie. Il était allé timidement à leur rencontre, sachant qu’il ne pouvait partir sans leur avoir parlé. Le père, un homme grand et aux cheveux poivre et sel, l’avait vu s’approcher, et avait arrêté sa femme en posant délicatement une main sur son bras. Obi-Wan avait pu lire dans ses yeux une rage difficilement contenue, mais qui ne parvenait pas à masquer un chagrin infini. Le jeune homme avait baissé la tête et s’apprêtait à implorer leur pardon pour avoir échoué dans la protection de leur fille quand la mère s’était violemment dégagée de l’étreinte de son mari.
Obi-Wan se raidit en se souvenant de ce qu’elle lui avait dit alors.
Allez vous-en ! Vous les Jedi, vous ne savez qu’apporter le malheur autour de vous ! Vous n’avez rien à faire ici ! Vous ne pouvez pas me rendre ma fille ! Rendez-moi ma fille !
Son mari l’avait entraînée derrière lui sans jamais croiser le regard du chevalier tandis qu’elle s’était mise à pleurer hystériquement. Oh que ces mots avaient fait mal. Il en avait physiquement ressenti le coup, mais il n’avait pu que les regarder quitter le funérarium avant de retourner lui-même à son speeder. Maintenant qu’il sillonnait de nouveau les rues de Vestenda, il se dit que ces paroles avaient été moins douloureuses que le regard accablé de la mère endeuillée et la tristesse qu’il avait sentie émaner d’elle. Il se rappela ce que Qui-Gon lui avait dit un jour au cours d’une mission particulière.
Il n’y a rien de pire au monde que la perte d’un enfant, Obi-Wan. Ou celle d’un padawan, d’ailleurs. J’espère que tu n’auras jamais à en faire l’expérience.
Il avait ensuite posé une main sur son épaule et lui avait tendrement souri, conscient que son apprenti ne pouvait pas encore comprendre. A présent le Jedi en avait un aperçu, et il espérait qu’en effet, jamais il n’aurait à subir une telle épreuve.
Il arrêta le speeder devant le garage de Roen, en descendit et entra dans la maison de sa mère.
-Obi-Wan ? C’est toi ? appela Eanel depuis sa chambre.
-Oui, maman.
Elle descendit les escaliers et s’approcha de lui en souriant.
-Ca fait du bien de t’entendre dire ça, dit-elle en l’embrassant.
-Et ça fait autant de bien de le dire, lui répondit-il.
Cependant le visage du jeune homme était resté sombre et amer.
-Ca a été dur, n’est-ce pas ? devina Eanel.
-Oh, c’est juste que…, commença-t-il. Oui… C’était éprouvant. Tout ces gens qui souffraient… Je crois qu’on ne s’y habitue jamais.
Elle le prit dans ses bras et le serra aussi fort qu’elle put, offrant tout son soutien. Aucun mot n’aurait pu l’aider davantage.
-Obi-Wan…
-Mmh ? fit-il, légèrement apaisé.
-Le conseil a appelé pendant ton absence.
Il se dégagea, l’air soucieux.
-Que voulaient-ils ?
Eanel hésita un instant, puis lui dit tristement :
-Ils demandent ton retour immédiat.
Le chevalier étouffa un soupir de contrariété qu’il savait injuste. Le conseil avait tous les droits de réclamer sa présence sur Coruscant, car le délai supplémentaire qui lui avait été accordé afin de lui permettre de passer un peu de temps avec sa mère était déjà plus qu’il n’était nécessaire. Il n’avait pas à leur reprocher cette décision. Et pourtant il aurait tellement aimé rester encore au moins quelques jours avec elle…
Il tourna ses yeux clairs vers elle et commença à chercher les mots justes pour lui faire réaliser qu’il n’avait pas d’autre choix que de la laisser une nouvelle fois. Elle mit rapidement fin à son embarras.
-Ne t’inquiète pas, rit-elle. Je comprends parfaitement que tu doives leur obéir. J’ai été mariée à un Jedi, rappelle-toi ! Je sais bien que faire ton devoir est ta priorité.
-Tu es sûre ? Je suis tellement désolé. Si ça ne tenait qu’à moi…
-Si ça ne tenait qu’à toi, tu partirais quand même tôt ou tard pour aider ceux qui en ont réellement besoin. Et c’est pour ça que je suis si fière de toi.
Elle prit le visage de son fils entre ses mains et l’obligea à se pencher pour déposer un baiser sur son front.
-Va, et ne te fais aucun soucis. La Force est avec toi, en toi, et je sais qu’elle veillera sur toi. Je suis sereine.
Il chercha son regard et ne put que constater sa sincérité. Il fut ébahi par son courage et sa confiance en la vie malgré les drames qu’elle avait vécus. Sans dire un mot, il l’attira une dernière fois à lui et se perdit dans son étreinte maternelle dont il avait tant eu envie pendant toutes ces années, recevant enfin l’affection qu’il n’était pas sensé désirer et que Qui-Gon lui avait si peu montrée. A présent il y avait droit, ne fût-ce que pour un court instant.
Il repartirait, et ni l’un ni l’autre ne savait s’ils allaient se revoir un jour, mais tous deux avaient désormais l’esprit plus tranquille. Un vide dans leur vie avait été comblé.

~*~


Le hall qui menait à la salle du conseil n’avait pas perdu son air intimidant aux yeux du jeune chevalier qui attendait nerveusement l’autorisation d’entrer. Depuis ses premières années d’apprentissage, chaque réunion avec les vénérables maîtres avait toujours été une véritable séance de torture, leurs regards calmes mais presque férocement intelligents réussissant inévitablement à lui donner des sueurs froides. Pourtant aucun des membres ne s’était jamais montré agressif, ou même sec avec lui, jamais il n’avait eu quoi que ce fût à se reprocher lorsqu’il s’était présenté à eux - à l’exception de son comportement sur Melida/Daan, mais cela remontait à déjà bien loin - aussi ne comprenait-il pas pourquoi il n’arrivait pas à surmonter cette terrible appréhension. Il se doutait tout de même, sans vouloir réellement se l’avouer, que Qui-Gon en était la cause. Il avait appris à craindre leurs rencontres avec le conseil en raison des remarques souvent déplacées de son maître et de ses idées peu orthodoxes, qui l’avaient mis plusieurs fois mal à l’aise.
Obi-Wan inspira profondément, puis relâcha son souffle juste à temps pour voir les deux grandes portes de la pièce s’ouvrir simultanément. Il entra sans attendre, forçant sa démarche à paraître sûre malgré sa nervosité, et alla se tenir au milieu du cercle formé par les douze membres. Il s’inclina avec déférence mais ne prit pas la parole, n’y ayant pas été invité. Il trouva le regard de Mace Windu, qui semblait l’observer avec une pointe de compassion, ce qui troubla le chevalier.
-Sais-tu pourquoi ton retour, nous avons demandé ? commença Yoda.
Le fait qu’ils aient une mission à lui proposer étant une réponse un peu trop évidente, Obi-Wan décida de secouer la tête.
-Non, maître.
-C’est au sujet de Qui-Gon Jinn, lui apprit Windu.
Le jeune homme retint difficilement une grimace. Il aurait dû s’en douter.
-Quand l’as-tu vu pour la dernière fois ? demanda le maître à la peau sombre.
-Il y a dix jours, sur Panescan. Juste avant son départ. Il était venu me voir à l’hôpital.
Mace se mordit brièvement la langue avant de reprendre :
-Nous l’attendons toujours.
-Ils ont eu un accident ? s’inquiéta immédiatement Obi-Wan.
Adi-Gallia se redressa dans son siège et posa ses bras fins sur les accoudoirs.
-Tout nous porte à croire qu’il n’a jamais eu l’intention de revenir au temple.
-Nous avions exigé sa présence en raison de son insubordination, développa Plo Koon.
Kenobi baissa la tête en fronçant les sourcils, essayant d’assimiler ce qu’il venait d’apprendre et de mettre de l’ordre dans ses esprits. Il leva son regard vers Yoda, qui ne l’avait pas quitté des yeux une seule seconde.
-Vous sous-entendez qu’il a pris la fuite pour éviter d’obéir à vos ordres ? articula-t-il lentement, cette pensée le faisant frissonner de consternation.
-Nous ne sous-entendons rien, nous ne faisons que constater, répliqua durement Mace Windu.
-Vous aviez prévu de lui retirer Anakin, osa demander Obi-Wan.
Windu écarquilla légèrement les yeux et parvint - presque - à dissimuler un petit sursaut.
-Il t’en a parlé ?
Il soupira, puis se décida à fournir au jeune homme des explications qu’il n’aurait pas entendues en temps normal.
-Non, nous n’allions pas le lui retirer. Mais ils auraient été placés tous deux en période de probation.
Yoda décroisa ses petites jambes et pointa un doigt griffu vers le chevalier.
-Pas d’accord avec nous, tu es, Obi-Wan.
-Ce n’est pas à moi de remettre en question vos décisions, répondit-il dûment.
-Ton opinion nous intéresse, jeune Kenobi, intervint Ki-Adi Mundi de sa voix douce et cultivée.
Le jeune homme sonda le regard des autres maîtres, et encouragé par ce qu’il y trouva, se décida à franchir les limites de politesse d’ordinaire imposées en ces murs. Il avait constaté depuis longtemps que cette réunion était tout sauf banale.
-Eh bien dans ce cas, avec tout le respect que je vous dois, maîtres, je pense que face à quelqu’un au tempérament de maître Jinn, vous avez pris les pires mesures possible. Confronté à une telle pression, il ne pouvait que réagir ainsi. C’était inévitable, vous deviez forcément le sav…
Il s’interrompit soudain, figé par l’atroce vérité. Le visage livide, il chercha dans les expressions toujours aussi imperturbables des membres du conseil une trace d’incompréhension lui prouvant qu’il avait tort. Mais il n’en était rien. Il fut mortifié par ce qu’il y lut. Si au moins il y avait eu là une once de regret, d’amertume, il aurait été rassuré. Mais cette sérénité insultante le révolta, et il se sentit étrangement trahi. Le conseil était donc capable de complots ? Depuis le moment où ils avaient décidé de menacer Qui-Gon, ils avaient soupçonné que son premier réflexe serait la fuite.
Obi-Wan combattit ce qui avait commencé à tourner en colère, serra les dents, puis posa une seule question.
-Pourquoi ?
-De confirmation nous avions besoin, fit Yoda. Tant de démesure nous n’avions pas prévu.
-Il nous a désertés, volontairement désobéi, renchérit Windu. Nous ne pouvons pas lui permettre d’entraîner l’Elu. C’est une trop grande responsabilité.
Obi-Wan détourna son regard, ne souhaitant qu’une chose, que tout s’arrête. Que ce cauchemar ne soit pas réel. Ils étaient en train d’insulter l’homme qu’il admirait le plus au monde, son mentor, son guide, celui qu’il avait mis sur un piédestal et qu’il considérait comme le plus grand Jedi de tous les temps. Tous ses rêves étaient balayés, réduits à néant par les fautes répétées de celui qui lui avait tout appris. Mais finalement, qui avait tort, qui avait raison ? Le conseil était si sage, ses membres étaient choisis en fonction de leur connexion exemplaire à la Force, et pourtant Qui-Gon… Qui-Gon était son maître. Comment être impartial dans une telle situation où ses sentiments pouvaient une fois encore l’induire en erreur ?
-Si tu as été convoqué, Obi-Wan, c’est justement à cause de tes relations avec maître Jinn, expliqua Mace Windu, comme ayant lu dans ses pensées - ce qu’il avait peut-être fait.
-Mieux que quiconque ici, tu le connais. Anticiper ses choix et ses actions tu pourras.
-Nous te chargeons de partir à sa recherche, et de nous le ramener, lui et le jeune Skywalker.
Tant de questions restaient encore sans réponse, mais Obi-Wan savait que retrouver Qui-Gon était essentiel. Plus il passerait de temps loin des Jedi, plus il risquait de mettre en doute leurs enseignements, lui qui le faisait déjà naturellement ; sans parler du fait que la galaxie était un endroit dangereux pour des fugitifs. De plus, aux yeux d’Obi-Wan, Anakin ne méritait pas d’être élevé dans de telles conditions.
-J’accepte, fit-il doucement.
Il y eut un léger souffle dans la salle du conseil, comme si imperceptiblement, tous les maîtres présents avaient relâché un petit soupir qui n’aurait pas été détectable individuellement. Seul Yoda baissa les yeux avec tristesse, conscient de ce qu’ils venaient de demander au jeune homme. Il avait toujours su quelle serait sa réponse. Obi-Wan Kenobi ferait toujours passer son devoir avant tout, et c’est pour cela qu’il avait été choisi. Avec le temps de lourdes charges seraient posées sur ses épaules encore bien fragiles, et il devait commencer à s’y préparer.

~*~


Quelque part sur Coruscant, dans un vieux hangar désaffecté, un vaisseau venait de couper ses réacteurs. Les tourelles impressionnantes sur lesquelles se trouvaient des batteries laser se rétractèrent sur la carcasse sombre endommagée par divers impacts. Dans le cockpit, son propriétaire activa le transmetteur holographique, révélant la silhouette qui lui était devenue familière.
-Seigneur Sidious, fit-il.
-Vous m’avez bien servi, répondit le Sith. Votre récompense vous satisfait-elle ?
-En tous points.
-Je vous félicite, insista Sidious, un rictus de plaisir déformant la moitié visible de son visage ridé. Je vous offre même un supplément de vingt pour cent.
Il s’était tellement délecté des holonews qu’une petite augmentation lui semblait presque méritée.
-Travailler avec vous est une joie, rit le chasseur de prime.
-Et je vous en rajoute encore soixante dix pour cent…
Le mercenaire écarquilla les yeux. La somme était conséquente.
-… si vous me ramenez la tête de Kenobi, finit Sidious. Je prolonge notre accord.
A la grande surprise du Sith, le chasseur de prime lui adressa un large sourire plein de cruauté.
-Considérez que c’est chose faite.
Dark Sidious ricana et mit fin à la transmission.

~*~