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Chapitre 15 : Conseil de Guerre
 
– Je n'arrive pas à y croire… Vous vous êtes vraiment payé ma tête. C'est écœurant.
– Je ne vois pas de quoi vous vous plaignez, répondit Kano. Je vous ai pourtant laissé faire votre boulot bien sagement !
L'argument ne sembla pas satisfaire Tolet Tolfa. L'espion zhin secoua la tête, visiblement outré.
– Je suis ridiculisé. Personne ne m'avait détecté jusqu'à présent. C'est impossible.
– Ne me demandez pas comment j'ai fait, fit le Jedi. Je vous ai senti, c'est tout ! Mais apparemment, ce regretté Reez n'y est pas parvenu.
– Ma carrière est fichue, se lamenta Tolet.
– Bah, quand je finirai en prison, Kyp Durron vous fera remettre une belle médaille. Vous êtes là pour ça, n'est-ce pas ? Pour me surveiller. Alors, vous êtes content ?
– On ne peut rien vous cacher. Mais ce n'est pas moi qui vous enverrai en prison.
Intrigué, Kano fixa l'espace où il estimait que Tolfa se trouvait. S'il pouvait le sentir par la Force, il ne pouvait tout de même pas le voir. Enfin si, il crut discerner une sorte de petit point sur la table. Cela rendait la conversation un peu particulière… Kano ne comprenait pas non plus comment le petit être parvenait à se faire entendre malgré sa taille.
– Qu'est-ce que vous voulez dire ?
– C'est simple. Malgré ce que je vous reproche, mon rapport devrait plus vous tirer d'affaire qu'autre chose. Sans compter que votre ami Pa'aja va vous soutenir.
Kano fut plutôt surpris. Il n'aurait jamais pensé que son "surveillant" soit de son côté. Cela changeait pas mal de choses. En outre, les circonstances de sa mission avaient évolué. Teydo Pa'aja s'en était tiré sain et sauf, Reez avait été tué, et la situation du Survivant était pitoyable, encore plus qu'avant. Et Kano avait fait son possible pour paraître crédible lors de la défense du destroyer. Des holos le montraient blessant le célèbre Kyle Katarn, à la suite d'un duel au sabre laser. Enfin, l'effondrement psychologique de l'Amiral Zosskan laissait toute latitude de mouvement à Kano. En fait, plus personne n'était là pour prendre les choses en main et pour le surveiller parmi les indépendantistes. L'occasion rêvée de gagner la confiance du Maître, et de le pousser à se montrer.
– Apparemment, vous avez choisi de terminer votre mission à bord. Et j'aimerais vous y aider. Pour sauver la face…
– Je ne demande pas mieux, répondit Kano. Mais il n'y a qu'une chose qui me ferait avancer : rencontrer ce fameux Maître. Teydo a dû le voir, mais je dois dire qu'on n'a pas trop eu le temps de papoter ces derniers temps. Les seuls mots que nous avons échangé ces deux dernières années étaient des insultes simulées. J'ignore ce qu'il a bien pu apprendre.
– Je peux peut-être faire quelque chose. Je pourrais m'infiltrer et l'observer. Je dois d'abord demander à Durron de me transmettre les informations que Pa'aja aura pu lui fournir, et j'irai rendre une petite visite au Maître.
– C'est hors de question, fit Kano sèchement.
– Et je peux savoir pourquoi ? s'enquit l'espion. Et je me permets de vous rappeler que vous n'êtes pas en position de me donner des ordres, monsieur le Chevalier Jedi.
– C'est juste un conseil qui vous permettra de survivre. Même si Reez était incapable de vous sentir, je ne parierais pas que le Maître en fasse autant. Il risque de ne faire qu'une bouchée de vous. Vous sous-estimez ce dont un vrai Jedi Noir est capable. Demandez à votre ami Durron, il en sait quelque chose…
– Je veux prendre le risque. Mon grand-père a été tué par les Jedi Noirs lors de la Guerre des Clones. Je vais leur faire payer, à mes risques et périls. Je vous transmettrai mes informations en direct. Si je ne reviens pas, ça vous permettra d'appuyer votre argumentation face à Kyp Durron.
Kano ne trouva rien à répondre. Le zhin avait trop d'amour-propre pour l'écouter. Et effectivement, c'était leur unique chance de débusquer le Maître.

La porte de l'aile médicale s'ouvrit en coulissant, laissant apparaître le visage quasiment éternellement souriant de Kyp Durron. Souriant, surtout depuis que l'opération visant à sauver Teydo Pa'aja avait été un franc succès ; coûtant au passage la vie à un Jedi Noir dangereux.
– Mon vieux Teydo, ravi de te voir en un seul morceau !
Pa'aja sourit à son tour à son Maître. Il ne l'avait pas vu depuis qu'il l'avait incité à prendre des vacances chez lui, pour faire le point sur sa formation. Vacances qui avaient plutôt mal tourné…
– Bonjour Maître Kyp. Croyez-moi, je suis aussi content que vous d'être ici ! Et je compte faire un scandale à l'agence de tourisme qui m'avait promis des vacances de rêves, pleines de soleil et d'extraterrestres exotiques!
– Je sais que tu es fatigué, mais j'ai besoin de savoir tout ce que tu as pu voir ou entendre d'utile lors de ta captivité. Désolé de t'ennuyer si tôt avec ça, mais le temps presse.
– C'est pour la mission de Kano ? demanda Teydo. Si ça peut lui être utile, je vous dirai tout ce que vous voudrez. Mais je ne sais pas grand chose. Je me suis retrouvé un petit peu catapulté dans cette histoire. Jusqu'ici, j'ignorais que Kano avait été capturé. Je le croyais tourné vers le Côté Obscur, et je viens d’apprendre qu’il était innocent. Même si je m’en doutais.
Teydo commença à narrer l'attaque dans sa maison sur Koltary, en insistant sur l'attitude qu'avait eu Kano, cherchant à limiter les dégâts. Puis il évoqua Reez, comment il avait péri, et mit l'accent sur le rôle qu'avait joué le noghri Ka'tar, qui lui avait sauvé la vie. Il savait que Ka'tar était extrêmement déçu d'avoir échoué face à Reez. Que Teydo l'aide à remonter un peu son estime était la moindre des choses.
Enfin, il tenta d'expliquer le peu qu'il avait pu voir du Maître. Il surprit Durron en lui révélant qu'il avait déjà eu affaire à lui quatre ans auparavant, juste avant d'entamer sa formation de Chevalier Jedi. Il raconta comment il avait coincé un jeune homme de seize ans, le Maître, dans la salle des réacteurs d'un destroyer. Kyp eut du mal à croire que Teydo ne lui ait jamais raconté toute l'histoire. Il avait bien dit qu'il avait combattu un Jedi Noir, mais il avait juste prétendu l'avoir abattu d'un coup de blaster. On l'avait cru. Néanmoins, Kyp avait toujours douté. Un vrai Jedi Noir ne succombait pas face à un simple laser.
Et maintenant, son élève lui révélait qu'il l'avait carbonisé, et par-dessus le marché qu'il y avait survécu. Teydo en vint aux faits concernant sa torture psychologique. Il ne s'étendit pas trop sur le sujet. La Force faisait ressentir à Kyp la douleur intense qui avait meurtri le cœur de Teydo. Kyp pouvait comprendre : lui non plus n'avait plus de famille. Ses parents avaient été tués sous ses yeux alors qu'ils étaient esclaves dans les mines d'épices de Kessel. Puis son frère était mort par sa faute. Il avait perdu son ami Dorsk 81, et n'aurait pas supporté de perdre son élève et ami Teydo. Ils ressentaient tous deux la même souffrance, et c'était une des raisons pour laquelle Durron avait pris Teydo sous son aile protectrice. Il voulait lui éviter de faire comme lui, des années auparavant : de se laisser abandonner à sa souffrance et de se réfugier dans les pouvoirs tentants du Côté Sombre. Kyp avait eu la chance d'en revenir sans trop de dégâts, mais beaucoup de jeunes Jedi y avaient irrémédiablement succombé, et les jeunes étudiants Jedi de l'Académie avaient dû combattre leurs collègues obscurs de l'Académie de l'Ombre. Cette histoire avait coûté de nombreuses jeunes vies.
Teydo avait besoin de repos après ce qu'il avait enduré. Il avait retenu ses larmes si longtemps. En fait il n'avait pas eu à le faire : le Maître ne lui avait même pas laissé le privilège du soulagement des sanglots. Un jour peut-être serait-il prêt à raconter en détail ce qu'on lui avait fait subir, bien que lui-même ne le sache pas vraiment. Kyp préféra le laisser un moment seul. Teydo lui expliqua en deux mots les révélations faites quant aux projets du Maître, puis expliqua qu’il ne tenait pas à évoquer ce qu’il avait enduré. Teydo tremblait de tous ses membres en pensant à ces images atroces qui avaient assiégé son esprit, à ces larmes involontairement refoulées, à ces cris de douleur étouffés.
Quand Kyp Durron quitta la pièce, Teydo Pa'aja, un des Jedi les plus prometteurs du Nouvel Ordre, ne parvint plus à empêcher sa souffrance de sortir. Il resta droit alors que des larmes chaudes coulaient sur ses joues.

– Comment va-t-il ? demanda Kyle Katarn.
Kyp ne répondit pas tout de suite. Il prit d'abord place sur le siège qui lui était réservé dans le petit salon qui allait servir de lieu de réunion pour les Maîtres Jedi. Puis il observa tour à tour les individus rassemblés autour de la petite table en bois de Kashyyyk.
– Ca pourrait aller mieux. Je ne sais pas ce que ce Jedi Noir lui a fait, mais un peu plus, et il aurait craqué. Quoi qu'il en soit, je trancherai moi-même la gorge de cette ordure.
Il savait que cette remarque serait mal perçue au sein de l'assemblée. Kyp Durron était l'objet de polémiques. Il avait l'habitude d'être très violent avec ses ennemis. Dans sa jeunesse, lancé dans une sombre croisade contre l'Empire et l'Amiral Daala, il avait détruit l'Académie Impériale de Carida, causant la mort de millions de soldats impériaux. Il avait évolué depuis, mais ses collègues restaient méfiants, bien que respectueux. Malheureusement, ce ressentiment était accentué par le fait qu'il ait jadis été attiré par le Côté Obscur de la Force, poussé par le spectre d'Exar Kun. En même temps, beaucoup admiraient sa façon de prendre les menaces en main. Il frappait à la base, sans pitié, tout en servant la justice. Alors que certains dirigeants de la Nouvelle République étaient plutôt passifs, lui rentrait dans le tas, sabre laser en main. On lui devait la résolution de plusieurs crises particulièrement complexes. Résolues à sa manière, bien entendu. Le fait qu'il ait capturé Kano avait fait de lui le responsable de cette affaire.
– Il nous faut d'abord en savoir plus sur lui, Kyp, fit une voix calme.
Kyp acquiesça malgré lui. En dépit de leurs désaccords, il admettait que les réflexions posées de Luke Skywalker étaient souvent pertinentes. Réciproquement, Skywalker respectait la fougue du jeune Jedi qu'il avait formé des années auparavant, et qu'il avait pardonné à la suite de ses mésaventures avec Exar Kun. Skywalker avait pourtant failli y perdre la vie…
Les autres Maîtres hochèrent la tête. Kyp reconnut la plupart des grands Jedi connus : Kyle Katarn, leader du Groupe Kenobi qui avait brillamment secouru Teydo ; Luke Skywalker, fondateur de l'Académie Jedi ; sa sœur la conseillère Leia Organa Solo ; sa femme Mara Jade Skywalker, ancienne "Main de l'Empereur" ; Kam Solusar, ancien Jedi Noir reconverti en fervent défenseur du Côté Clair ; Tionne, sa compagne, une historienne Jedi réputée et sage ; Streen le vieil ermite ; Cilghal, guérisseuse calamarienne ; et Corran Horn, vétéran de l'Escadron Rogue. La plupart comptaient parmi les premiers élèves de l'Académie il y a treize ans. Kyp ne reconnut pas les quelques autres non-humains présents. Et Kyp Durron, bien sûr, avait sa place. Il était surpris que cette dernière n'ait jamais été contestée. Luke songeait à restaurer le Conseil des Jedi, et cette réunion était exceptionnelle. Cette assemblée était provisoire, en attendant qu'un vrai Conseil, comme celui dans lequel siégeait Maître Yoda dans les dernières années de l'Ancienne République, ne soit mis en place.
Ces Jedi comptaient parmi les rares personnes connaissant l'existence du Groupe Kenobi. Skywalker et Durron l'avaient fondé, soutenus par les autres Maîtres. Mais même la plupart des officiels de la Nouvelle République n'étaient pas dans le secret.

– Des événements troublants se sont déroulés ces derniers temps, commença Luke Skywalker. Vous avez dû entendre parler de ce Kano. Kyp l'a capturé, mais a pris l'initiative de le relâcher pour lui permettre d'infiltrer une organisation indépendantiste impériale affiliée à un Jedi Noir.
– J'avais des doutes quant à la culpabilité de Kano, avoua Kyp.
– Nous ne sommes pas là pour remettre en cause ton plan, Kyp, fit Leia calmement, avec son ton posé d'ambassadrice. Nous voulons suivre son évolution et t'aider à agir au mieux.
– J'ai rencontré Kano à bord du Survivant, intervint Kyle Katarn. Il a joué la comédie, et j'estime qu'il fait son possible pour faire son boulot. Par contre, j'ignore parfaitement s'il est coupable de ce dont on l'accuse. Je trouve juste que ça ne lui ressemble pas. Il émane de lui l'innocence des jeunes Jedi trop tôt confrontés aux difficultés de la Force.
– Nous discuterons après de sa culpabilité, fit Luke. Il nous faut évoquer les Jedi Noirs impliqués dans cette affaire, et que Kano devait démasquer. Kyp, tu as du neuf à ce sujet ?
Durron se leva pour mieux se faire entendre de ses collègues.
– Oui, en effet. Vous savez tous que mon apprenti, Teydo Pa'aja, avait été enlevé par les Jedi Noirs. Je dois remercier le Groupe Kenobi du capitaine Katarn pour son intervention brillante. Teydo a tenu à ce que je transmette un message concernant le noghri Ka'tar.
– Ka'tar croit avoir perdu son honneur pour avoir échoué face au gran, expliqua Katarn. J'estime qu'il n'a pas eu de chance. Je ne lui dirai probablement jamais, mais il est mon meilleur élément.
– Nous ne doutons pas des compétences du Jedi Ka'tar, fit Streen. Poursuis s'il te plaît, Kyp.
– Bien. Il se trouve que Teydo a eu affaire à ce gran. Il n'y a pas grand chose à apprendre, sinon qu'il est mort et que nous ne le pleurerons pas. Tout laisse à penser qu'il n'était que l'élève, et en aucun cas un Sith digne de ce nom.
Puis Kyp expliqua l'étrange condition du Maître, son infirmité et sa recherche d'un corps. Avec les citations de Teydo, qui avait rapporté ce qu'il avait pu entendre malgré son handicap.
– Drôle d'histoire, dit Kam Solusar, perplexe. Ca me rappelle vaguement quand l'Empereur ressuscité, il y a quatorze ans, cherchait désespérément un corps parce que tous les clones qu'il avait créés ne supportaient pas la Force Obscure qui habitait son esprit.
Peu de personnes savaient réellement ce qu'il s'était passé lors de la réapparition de Palpatine. Le despote avait produit des clones génétiques de lui-même. Son corps se dégradait face à son utilisation abusive du Côté Obscur, et ses clones constituaient la voie vers le règne éternel. Mais Luke Skywalker avait détruit ses réserves et son matériel. Palpatine pouvait prendre ses clones comme hôtes de son esprit, mais ils finissaient par être inutilisables, rongés de l'intérieur par le Côté Sombre.
Apparemment, le Maître avait repris l'idée, pour éviter de finir ses jours dans un caisson de survie. Cependant, il ne disposait normalement pas de clones ni de matériel de clonage. Les cylindres de clonage Spaarti avaient été détruits pendant la Guerre des Clones. Certains avaient subsisté, utilisés par l'Empereur ressuscité et par le Grand Amiral Thrawn. Mais finalement, la Nouvelle République était venue à bout de ces fléaux.
– Il est vrai que c'est ressemblant, affirma Mara Jade Skywalker. Seulement nous n'avons pas affaire à Palpatine, mais à un gamin d'à peine vingt ans, paumé et qui ne dispose pas de corps clonés pour subsister.
– Cela ne l'empêche pas de trouver des corps provisoires. La question est de savoir où ils les trouvent, demanda Tionne. Cilghal, est-ce médicalement possible que ce type transfère son esprit comme ça ?
– L'Empereur y est bien parvenu, répondit la calamarienne en agitant sa grosse tête de poisson. Et puis qui sait ce que les Jedi Noirs peuvent faire avec la Force…
Les Jedi restèrent un moment pensifs, puis Mara reprit la parole.
– Je persiste à penser qu'on ne peut comparer ce Jedi à Palpatine, personne ne me dira le contraire. Là où nous devons nous inquiéter, c'est s'il vole le corps d'innocents, que ce corps se détruit de lui-même à cause de l'utilisation du Côté Sombre, et qu'il en prend encore un autre pour lui faire subir le même sort. Nous devons chercher du côté des personnes disparues. Et à ma connaissance, il n'y a plus de cylindres de clonage Spaarti opérationnels depuis des années. Je doute qu'il utilise des clones de lui-même, comme le faisait Palpatine. Enfin, peu de gens encore en vie connaissent les méthodes de clonage. L'Empereur était un expert en la matière, mais n'a pourtant jamais réussi à créer un corps stable et réceptif à la Force.
Le problème restait entier, il allait falloir enquêter. On ne pouvait laisser un détraqué prendre possession de corps pour aller faire ses courses, et en changer comme on change de chaussettes. Le Côté Obscur pouvait permettre de telles graves manœuvres, et cette possibilité n'était pas à écarter. Puis le groupe évoqua d'autres points de l'affaire. Les informations concernant le blocus de la planète Tabal par les indépendantistes allaient être transmises à l'Amiral Pellaeon du Nouvel Empire, via leur contact commun, Talon Karrde. Il ne ferait qu'une bouchée des Survivants, surtout après les dégâts infligés par le Groupe Kenobi. Cette information renforcerait un peu le lien de coopération entre les deux gouvernements en paix.
Ils parlèrent d'Alera Sanaka, compagne de Kano lors de sa fuite. Elle était présumée innocente, quel que soit le vrai rôle de Kano. Les dirigeants de la Nouvelle République avaient décidé de lui faire quitter le centre de détention provisoire, pour l'installer en liberté surveillée dans un centre confortable sur Dantooine. En attendant que tout soit mis au clair avec Kano.
Puis ils approfondirent l'étude du cas de Kano. On voyait vite que l'opinion générale n'était pas en sa faveur, malgré le bon déroulement de sa mission et son comportement face au Groupe Kenobi. Les crimes qu'on lui imputait étaient trop graves pour que son amnésie suffise pour passer l'éponge. Seuls Leia, Cilghal, Streen, Tionne et quelques autres membres moins illustres semblaient faire preuve d'un peu d'indulgence.
– Ce type était en plein dans le Côté Obscur, fit Mara. On ne peut pas prendre le risque qu'il y replonge. Il faut le stopper au plus vite.
Teydo Pa’aja avait bien dit que Kano avait été enfermé ces deux dernières années, mais les Jedi n’avaient pas l’air d’y croire et continuaient de le suspecter. Kyp constata que le rapport de son élève n’était pas pris très au sérieux.
A ces mots, Leia explosa.
– Comment pouvez vous tous vous permettre de dire ça ! Combien d'entre vous peuvent prétendre n'avoir jamais approché le Côté Sombre ?
Elle regarda tour à tour tous les Jedi, excepté Cilghal, Tionne et Streen.
– Toi le premier, Luke, n'as-tu pas succombé un temps au pouvoir de persuasion du clone de Palpatine ? Mara, dois-je te rappeler que c'est ce même Palpatine qui t'a formé ! Kam, vous avez servi les légions des Jedi Noirs, Kyp a suivi Exar Kun, Kyle vous avez été à deux doigts de basculer face au pouvoir du Temple de Sith. Je ne vous apprends rien, n'est-ce pas ?
Les Jedi non accusés acquiescèrent en silence. Les accusés baissèrent la tête, mais Luke regarda sa sœur droit dans les yeux.
– Ce n'est pas comparable, Leia. On nous a pardonné, mais nous n'avions pas commis de crimes tels que ceux de Kano. Nous n'avons pas tué d'innocents à la pelle.
Leia secoua la tête en regardant son frère jumeau. Elle était déçue que son frère accuse ce jeune homme sans tenir compte des éléments en sa faveur. La réputation de sagesse du Maître Jedi en prenait un coup.
– Tu es gonflé, Maître Jedi Luke Skywalker. Qui m'a poussé, pendant des années, à pardonner les crimes abjects de notre père? Un homme qui s'est fait appeler Darth Vader, et dont je ne rappelle pas les tristes actes…
Luke accusa le coup. Leia marquait un point, et un gros. Il n'eut pas à répondre, sa sœur avait quitté la pièce. Mais Luke persistait à penser que malgré sa crédibilité et le témoignage controversé de Pa’aja, Kano n'avait pas la moindre preuve de son innocence. Pour l'heure, il était coupable. Coupable entre autres d'avoir assassiné son propre Maître.

– Faites quelque chose pour moi, Seigneur Kano ! implora l'Amiral Zosskan.
Kano n'en crut pas ses oreilles. C'était la première fois que l'impérial l'appelait comme ça avec sincérité. Le non-humain était au bord du désespoir. Il allait en profiter, et cela favoriserait l'infiltration de Tolet Tolfa.
– Expliquez-vous, Amiral, répondit-il avec un air hautain. Je ne vois vraiment pas en quoi je peux vous être utile.
– Vous ne comprenez donc pas ? se lamenta l'autre. Le Maître va me massacrer pour mon échec ! Vous êtes le seul, depuis la mort de Reez, à pouvoir me sauver!
– Absolument pas, rétorqua le Jedi. Vous n'avez jamais daigné me le faire rencontrer. Je ne le connais même pas !
– Mais il vous estime ! Il vous écoutera !
C'est ça, se dit Kano. Tu me prends pour un gamoréen sénile ou quoi ? Il se doutait que le Maître essayait de le démasquer, depuis le début. Et il n'y était pas parvenu avec Teydo. Ses plans avaient tourné court.
– Je vais faire tout mon possible, assura Kano. Je lui dirai la vérité : on ne pouvait rien faire face à cette horde de Jedi. Reez en a payé les frais, j'ai été plus raisonnable, et vous avez judicieusement sauvé votre peau. Ca vous va ? Quand devez-vous le rencontrer ?
– Dans 17 heures standard, murmura l'extraterrestre.
– Il est déjà au courant ?
– Non…
– Je vois. Il ignore la perte de son disciple. On ne va pas s'amuser…
– Je sais Seigneur…
Kano discerna une ouverture.
– Je vais vous accompagner. Je parviendrai à le raisonner.
Zosskan parut embarrassé.
– C'est que… je n'ai pas d'instructions vous autorisant à le rencontrer.
– C'est vous qui voyez. Je suis votre seule chance de vous en tirer. Ou vous m'y aider, ou vous vous dépatouillez seul dans votre nid de Rancors.
– J'irai le voir seul, et je lui demanderai de vous recevoir. Si je vous emmène directement sans lui demander, je n'aurai plus la moindre chance de survie !
Kano prit congé de l'officier. Il n'avait pas obtenu le droit de voir le Maître, mais il avait l'essentiel : l'heure à laquelle Zosskan allait partir le voir. Peu lui importait si l'Amiral survivait. L'important était que Tolet Tolfa soit dans ses bagages, et qu'il puisse rapporter les informations vitales pour prouver l'innocence de Kano.

Le manque d'effectif à bord du Survivant faisait de la sécurité une véritable passoire, l'accent étant placé sur les réparations et sur la gestion de ce qui restait du personnel. Le Survivant, qui avait jadis été un beau vaisseau imposant et fonctionnel, portait à présent son nom à la perfection…
Tolet Tolfa n'avait eu aucun mal à avoir accès aux données confidentielles contenues dans les ordinateurs du Survivant. Il avait branché un adaptateur conçu pour les êtres de petite taille, qui lui permettait d'utiliser les appareils correctement. Avant de partir, un pirate informatique connu devenu Chef du Chiffre de la Nouvelle République, Ghent, avait fourni à Tolet un excellent système pour cracker les codes des ordinateurs les mieux protégés. Et le zhin se promenait à présent tranquillement dans les dossiers protégés. Il voulait rendre service à Kano, en récoltant tout ce que les impériaux pouvaient avoir comme informations sur lui. Bien sûr, ils savaient tous deux que tout ce qui pouvait concerner un complot le visant ne serait pas trouvable sous forme d'un simple fichier informatique. Par contre, il pourrait en savoir plus sur ses origines ou sur son enlèvement.
L'espion fut aussi déçu que Kano allait l'être en découvrant que les données étaient rares à son sujet. Après avoir tapé Kano dans le champ de recherche, il vit apparaître une image datant de quelques années.
A ce moment, Kano entra dans la pièce, non gardée. Il adressa un message mental au zhin. Merci Tolet. Mais il vaut mieux que je le fasse moi-même. Si tu trouves quelque chose et que j'explore une piste sans avoir cherché moi-même, ils devineront que j'ai un complice. Je suis sûr que le Maître m'épie.
Tolet ne fit aucun commentaire, et Kano poursuivit la recherche. Enfin, il n'y avait pas grand chose à voir.
Kano. Race : humain. Affiliation : groupe des Survivants. Origine : Aztilar.
Kano secoua la tête. Ce rapport l'inquiétait. Tout d'abord, il confirmait ses liens avec ce groupe de loyalistes. Ensuite, il stipulait qu'il venait d'Aztilar. Lui avait-on menti sur Litonia ? Néanmoins, il était allé sur Litonia à la suite d'une vision de Jedi, alors qu'Aztilar était citée par les indépendantistes. Il n'eut aucune hésitation quant à la source à laquelle il accordait le plus de crédit.
Quoi qu'il en soit, il devait visiter Aztilar. Ce serait aisé, avec le relâchement de Zosskan. Il fit donc une recherche sur la planète. Il passa les détails géographiques pour se concentrer sur l'article. Il eut la stupeur de découvrir qu'Aztilar était le bastion des loyalistes à l'Empereur, le centre de la faction qui s'opposait à Pellaeon et refusait son autorité, protégeant les valeurs racistes et autoritaires de l'Empereur. Décidément, Zosskan ne pourrait pas l'empêcher d'y aller. Il n'aurait qu'à prétendre à un pèlerinage…

La consolation était relative. Teydo venait d'apprendre que son ami Golpi Rilim avait survécu à la sauvagerie de Reez. Mais il le retrouvait plongé dans une cuve bacta. Son corps flottait à la verticale dans le bac de liquide épais, et un masque permettait au blessé inconscient de respirer.
Golpi avait certes repris conscience un moment, mais ses blessures demandaient encore des soins réguliers, et il était fréquemment replongé des heures durant. Teydo aurait voulu lui dire combien il était heureux de le voir en vie, mais il ne l'entendrait pas. Par contre, il sentit la présence de son Maître dans son dos.
– Votre réunion s'est bien passée, Maître Kyp ?
– Pas mal. Je suis désolé pour Golpi. Il va s'en sortir, n'aie crainte. C'est moi qui me suis occupé de lui.
– Merci, Kyp. Vous avez décidé quelque chose à propos de Kano ? s'enquit Teydo.
– Pas vraiment, répondit son Maître.
Teydo n'insista pas. Il savait que l'affaire Kano était complexe, et que ce qu’il pourrait dire pour le soutenir aurait bien peu de poids face aux charges qui pesaient contre lui. Il regarda tristement le corps de Golpi. Kyp lui posa doucement une main sur l'épaule.
– Ce Jedi Noir a causé beaucoup de mal. A toi surtout. On va l'arrêter, crois-moi.
– Je ne veux pas que Kano y reste à cause de votre fichue mission ! s'emporta le Jedi de Koltary, se retournant vivement pour faire face à son Maître.
– C'est lui qui a choisi de poursuivre, fit calmement Durron. C'est courageux de sa part, et ça jouera en sa faveur. Mais on ne peut oublier les crimes qu'il a commis sous prétexte qu'il est amnésique.
Teydo respira posément pour se calmer. Cette histoire réveillait trop de mauvais sentiments dans son esprit. Ces images de mort de sa famille… En réalité, Teydo ne les avait jamais vu mourir, et ces images avaient été créées de toutes pièces. Elles étaient pourtant si crédibles et collaient exactement aux faits, et Teydo les avait ressenties comme des souvenirs. Elles étaient passées en boucle dans son esprit, le Maître profitant de son chagrin pour l'affaiblir et le détruire de l'intérieur. Mais il ne devait pas se laisser submerger. La souffrance menait à la colère, la colère à la haine, et la haine au Côté Obscur. S'il laissait sa rancune envers le Jedi Noir dicter son comportement, il finirait par le trouver et lui ferait payer. Pour tout. Malheureusement, le Côté Obscur l'envahirait. Kyp Durron était passé par là, il était revenu des ténèbres, et avait mis Teydo en garde. Comme s'il le comprenait, Kyp murmura :
– Prends garde au Côté Obscur, Teydo Pa'aja. Si tu le laisses guider tes actions, à jamais il dominera ta destinée.
Teydo serra les poings. Toute sa vie il avait fait ce geste pour se calmer. A chaque fois qu'il avait perdu un proche, il avait craqué et avait hurlé sa douleur, seul face aux vents froids de Koltary, sa voix déchirée résonnant dans les canyons abrupts. Sa famille était unie, avait encaissé les morts successives. Jusqu'à ce que Teydo n'ait plus du tout de famille, plus personne pour le soutenir, quand sa mère était morte de chagrin. Pleurant dans les bras de son dernier fils, elle l'avait supplié de la pardonner de le laisser seul. Puis elle était partie.
Teydo avait alors quitté Koltary, il y avait six ans de cela, où plus rien ne le retenait. Il avait erré un temps de petit boulot en petit boulot sur Coruscant, vivant au jour le jour. Son ami sur place, un certain Quasy Br'asn, avait été tué lors d'un raid kamikaze aléatoire d'indépendantistes dans les ruelles de la Cité Impériale. Il y a cinq ans, il avait rejoint l'Armée Républicaine pour noyer sa peine, et y avait rencontré Golpi Rilim. Après leurs exploits lors de l'attaque du convoi il y a quatre ans, il avait rejoint l'Académie Jedi. Il avait rencontré Kano, plus jeune que lui, et s'était épanoui dans sa formation sous la protection de Kyp Durron.
Kano et lui s'étaient vite bien entendus. Kano était plus jeune de six ans, et voyait en Teydo un grand frère. Néanmoins, il avait achevé sa formation plus tôt. Teydo avait beaucoup souffert en apprenant que Kano avait succombé au Côté Obscur. Il avait renoncé à le combattre, laissant aux autres la triste tâche de le stopper. On l'accusait de tant de crimes… Mais au fond de lui, Teydo n'avait jamais cru que son ami ait pu rejoindre les indépendantistes. Les récents événements renforçaient ses certitudes. Pour Teydo, Kano avait toujours été innocent.
Il avait perdu Quasy, avait failli perdre Golpi, et Kano était dans de beaux draps. D'abord sa famille, puis ses amis. Et dire qu'on le jugeait chanceux…

– Ce que je vais vous dire ne va certainement pas vous plaire, Maître, fit Teydo à Kyp.
– Je t'écoute.
– Voilà… J'ai la conviction que Kano est innocent, le Jedi Noir me l'a révélé, et ce fut son erreur. Je requiers votre autorisation pour mener ma campagne seul pour le tirer d'affaire. Je ne peux me permettre de le perdre. Je vous en prie.
Kyp le regarda intensément.
– De toute façon, rétorqua-t-il en souriant, tu n'as pas besoin de mon avis. Tu n'es plus mon élève.
– Vous abandonnez ma formation ? fit Teydo, intrigué et déçu.
– Elle est achevée, Chevalier Jedi Teydo Pa'aja de Koltary. Ton attitude et les épreuves que tu as surmonté l'ont prouvé. Ta décision d'aider Kano est louable. Je n'en attendais pas moins de toi.
Teydo serra la main que lui tendait Kyp.
– Alors vous n'avez plus d'élève ?
– Si. J'ai remarqué un jeune homme doué qui me fait beaucoup penser à toi. Il a presque fini l'apprentissage des bases à l'Académie, et à vrai dire j'ai déjà commencé à l'entraîner depuis un moment, mais garde cela pour toi. Il s'appelle Miko Reglia, il est très prometteur. Je te le présenterai à l'occasion, vous vous ressemblez beaucoup. J'ai aussi un projet dont tu es le premier à entendre parler. Un escadron de chasseurs stellaires, qui gérerait les conflits que la Nouvelle République ne veut pas aborder. Je souhaite les appeler… les Apôtres de la Vengeance. Quand tu en auras fini avec Kano, je serai fier de te compter parmi mes pilotes.
– Je suis touché, Kyp. Mais je pense que beaucoup de choses m'attendent.
– Bien sûr. Tu es libre à présent de servir la justice dans le sens qui te paraît le bon. Que la Force soit avec toi. Moi, je resterai à tes côtés.