Le jour J approche : le 23 août, la série Ahsoka débarquera sur nos écrans avec deux épisodes d'un coup. Pour patienter, SWU vous propose quelques articles en lien avec la Togruta et les autres personnages déjà connus de la série !

Aujourd'hui, place à celui qui s'annonce comme l'antagoniste majeur de la série : nul autre que Mitth'raw'nuruodo, plus connu sous le nom du Grand Amiral Thrawn !

Le personnage créé en 1991 par Timothy Zahn va apparaître pour la première fois en chair et en os dans la série Ahsoka, où il sera interprété par Lars Mikkelsen. Une consécration pour ce méchant emblématique de l'Univers Legends, qui a été l'un des premiers - et sans doute le plus important - personnages réintroduits dans le nouveau canon. Au cours de l'entretien qu'il a accordé en avril dernier à Star Wars Universe et lors de ses échanges avec le public à Générations Star Wars et Science-Fiction, Timothy Zahn est longuement revenu sur la genèse de sa création favorite. S'il est l'un des rares auteurs à avoir travaillé tant dans l'Univers Officiel que dans l'Univers Legends, c'est sans doute grâce à la popularité de ce personnage auprès des fans, parmi lesquels un certain Dave Filoni qui l'a sollicité en 2016 pour écrire une nouvelle trilogie. C'était au moment où ce même Filoni venait de réintroduire Thrawn dans la série Rebels, dont il a été le principal antagoniste au cours des deux dernières saisons.

Il y a néanmoins un aspect du personnage que Timothy Zahn a peu abordé : la façon dont il l'a fait évoluer à travers ses écrits. Car, oui, il existe une sorte de dualité entre les différentes représentations du personnage : d'un côté "Docteur Mitth'raw'nuruodo", de l'autre "Mister Thrawn". C'est ce dernier qui occupe le devant de la scène lorsque paraît L'Héritier de l'Empire en 1991. Aussi génial soit-il, le Grand Amiral Thrawn, dans ce livre, apparaît comme cruel. L'envoi de commandos Noghris contre une Leia Organa Solo enceinte, l'évocation du massacre du Vol vers l'Infini ou d'un monde des Régions Inconnues, ou encore l'exécution d'un enseigne sur la passerelle du Chimaera, parce que celui-ci n'avait pas été en mesure de déjouer une manœuvre de Luke Skywalker... Le personnage n'est guère sympathique : c'est un génie du mal.

L'évolution de son image commence en réalité dans la duologie de La Main de Thrawn, sortie en 1997-1998. Dans ces deux livres qui se déroulent dix ans après la "trilogie Thrawn", le souvenir du Grand Amiral reste bien présent. Ses anciens subalternes sont devenus des officiers respectés, au premier rang desquels l'ancien second, Gilad Pellaeon, désormais chef des armées des Vestiges de l'Empire. La campagne lancée par le non-humain, avortée lors de la bataille de Bilbringi, apparaît pour ces hommes comme la dernière heure de gloire qu'ils aient connu. La Nouvelle République, elle, craint toujours son souvenir, mais le respecte également. En positionnant ainsi les deux camps face à son personnage, Timothy Zahn en fait une sorte de "Napoléon" de la galaxie Star Wars, suscitant le même genre de sentiments après sa mort.

Mais c'est une sous-intrigue du livre qui contribue encore davantage à l'évolution de l'image de Thrawn auprès du lectorat, lorsque le duo formé par Luke Skywalker et Mara Jade découvre l'Empire de la Main, une organisation fondée par le Grand Amiral dans les Régions Inconnues pour y lutter contre des menaces bien plus pressantes, selon lui, que la Rébellion. Parallèlement à cela, Leia Organa Solo et son époux Han découvrent que Thrawn a créé des cellules dormantes de clones, capables de constituer des cellules de résistance en cas d'invasion - et pas par la Nouvelle République. Nous sommes alors à quelques mois du début de la publication du Nouvel Ordre Jedi, qui va concrétiser cette menace sous le nom de Yuuzhan Vongs.

Thrawn est donc non plus un antagoniste selon ce point de vue, mais au contraire un protecteur. Comme la Garde de Nuit vis-à-vis des royaumes de Westeros dans la saga du Trône de Fer ou les Rôdeurs Dunedains par rapport aux Hobbits et aux humains de Bree dans Le Seigneur des Anneaux, il est un défenseur invisible contre des menaces inconnues, qui ne recherche pas la considération de ses pairs mais l'accomplissement de son devoir. Une image que Timothy Zahn va renforcer dans ses romans postérieurs. Vol vers l'Infini, qui met en scène un jeune Thrawn, nous explique que cette menace Vong est ce qui l'a conduit à arrêter le vaisseau du même nom (mais pas à en massacrer l'équipage, cela n'étant pas son fait dans l'ouvrage) et à rallier Palpatine, également au fait de ce danger. Choix Décisifs le présente comme l'adversaire d'un seigneur de guerre des Régions Inconnues, Nuso Esva, présenté comme un génie du mal - soit le rôle initial du Grand Amiral ; et pour lutter, Thrawn n'hésite pas à enroller tous les volontaires qui se présentent, y compris des stormtroopers renégats... Et des non-humains, ce qui va totalement à l'encontre des doctrines impériales. Mais ce n'est pas ce qui importe aux yeux du stratège : seule la victoire compte, quel qu'en soit le prix. Ce traitement a d'ailleurs été appliqué à un autre personnage majeur de l'Univers Legends, très apprécié des fans, à savoir Revan, présenté comme un ancien héros devenu antagoniste dans Knights of the Old Republic, et dont on découvre par la suite qu'il a basculé du Côté Obscur pour lutter contre une menace inconnue de ses pairs, mais bien pire encore. Les deux personnages, malgré leurs crimes, se retrouvent donc dans une zone grise peu commune dans un univers Star Wars plutôt manichéen.

Mais tout cela, c'était dans l'Univers Legends, me direz-vous ; quid de l'Univers Officiel ?

On assiste en réalité au même phénomène, même si cette fois Timothy Zahn n'est plus seul à la manœuvre. Le Thrawn qui nous est présenté dans la série Rebels est proche de celui de L'Héritier de l'Empire : un esthète qui utilise l'art pour comprendre ses ennemis et ainsi les vaincre, mais aussi un officier capable de cruauté. Sa première apparition présente l'obtention de son grade de Grand Amiral comme le résultat de sa victoire sur Batonn, où "le nombre de victimes parmi les civils était pourtant largement supérieur à celui des insurgés" (dixit l'agent Kallus). De même, lorsqu'il assaille les Rebelles sur Atollon à la fin de la saison 3, c'est dans le but de ne faire aucun prisonnier. Il va même jusqu'à bombarder Lothal City à la fin de la saison 4 pour obliger les Spectres à se rendre.

Mais dans les six romans écrits depuis 2017 par Timothy Zahn, Thrawn retrouve son visage davantage héroïque. Le massacre de Batonn, par exemple, devient le résultat des actions de son allié politique, la gouverneure Pryce. Un gâchis pour le Thrawn du livre, qui ne supporte pas les massacres et espérait même pouvoir rallier à sa cause le chef des insurgents, afin de pouvoir combattre ensemble les menaces des Régions Inconnues telles que les Grysks...

En somme, la dualité est toujours présente chez Thrawn dans l'Univers Officiel. Alors, de quel côté basculera son adaptation dans la série Ahsoka ? Si Thrawn y sera l'antagoniste, il n'est pas impossible que son traitement diffère de celui de Rebels et soit plus complexe, eut égard au support différent. L'intervention du capitaine Pellaeon (lui aussi réintroduit dans l'Univers Officiel) à la fin de la saison 3 de The Mandalorian, appelant à un usage de la force "à bon escient", peut le laisser supposer... Mais il faudra encore attendre un peu pour le vérifier !