Au début de la décennie 90, LucasFilm Games est solidement établi en tant que développeur et éditeur leader sur le marché du loisir interactif. Afin de souligner cette situation unique, la division change de nom pour LucasArts Entertainment Company et ses bureaux quittent le Skywalker Ranch pour un immeuble à proximité. Dans le même temps, un nouveau logo est commandé : connu sous l'affectueux sobriquet d'homme en or, il est imposé dès le début des années 90 et sera utilisé jusqu'à la fermeture du studio.

Durant cette période, quelques-uns des meilleurs jeux d'aventure jamais réalisés, notamment Sam & Max Hit the Road, Day of the Tentacle et la série des Monkey Island, sont édités par LucasArts. La compagnie commence par ailleurs à travailler sur les jeux qui permettraient à l'univers de Star Wars d'être vécu comme expérience interactive.

LucasArts expérimente également de nouvelles technologies, dont les consoles de jeu comme la Super Nintendo et la Sega Genesis. iMUSE, programme de musique interactive permettant aux game designers de créer un système de musiques dynamiques suivant les missions du jeu, est une innovation développée par LucasArts pour les jeux d'aventure de cette époque. Toutefois, le CD-ROM est l'innovation technologique majeure qui changera définitivement la manière de LucasArts de réaliser ses jeux. L'invention du CD-ROM "parlant" permet aux personnages des jeux d'aventure, pour la première fois, d'articuler leurs paroles. LucasArts explore également le secteur de la "full motion video" qu'il intègre à ses jeux. En 1993, Rebel Assault est un tournant décisif, intégrant désormais des extraits des films Star Wars en "full motion video".

• Loom® (Janvier 1990, IBM, Amiga, Atari ST, Macintosh, PC CD-ROM, FM Towns, Super CD)
• The Secret of Monkey Island® (Octobre 1990, IBM, Amiga, Atari ST, Macintosh, PC CD-ROM, CDTV, Sega CD)
• Monkey Island 2: LeChuck's Revenge® (Decembre 1991, IBM, Amiga, Color Macintosh)
  Indiana Jones® and the Fate of Atlantis™ (Juin 1992, IBM, Amiga, Color Macintosh, PC CD-ROM)
• Maniac Mansion® II: Day of the Tentacle (Juin 1993, IBM, PC CD-ROM, Mac CD-ROM)
• Sam & Max Hit the Road (Novembre 1993, IBM, PC CD-ROM, Mac CD-ROM

Certains insinuent que tous les jeux d'aventure LucasArts du début des années 90 sont comiques ; force est de constater que ce n'était pas toujours le cas. Loom, sorti en 1990, est une aventure fantastique adulte et réflexive. Les joueurs incarnaent Bobbin Threadbare, un garçon de 17 ans de la Guilde des Tisserands. Mais au lieu d'étoffes, Bobbin use d'un bâton destiné à créer de la musique magique qui l'aide à combattre les ténèbres qui ont recouvert le pays. Le joueur lance des sorts grâce à des notes de la gamme de do majeur. En basse difficulté, il n'est pas nécessaire de savoir lire ou écrire de la musique pour compléter la gamme. Les joueurs se remémorent avec plaisir la belle musique classique du jeu, sans parler de la fantastique quête de Bobbin de destruction du Mal.


Un autre jeune garçon débute sa carrière épique en octobre 1990. Guybrush Threepwood, apprenti pirate, est la star de sa propre aventure burlesque, The Secret of Monkey Island. Dans les Caraïbes, sur l'Île de Melee, Guybrush se bat contre le démoniaque pirate fantôme LeChuck qui a enlevé la belle Elaine Marley. Il doit accomplir trois épreuves pour devenir pirate : le vol, le duel d'insultes et la chasse au trésor. Les dialogues à choix multiples permettent aux joueurs de sélectionner les répliques ou insultes à lancer aux personnages.

Guybrush poursuit ses spirituelles réparties dans la suite, Monkey Island 2 : LeChuck's Revenge. Sortie juste un an après le titre original, elle est la première à arborer le logo de « l'homme en or ». Ce second opus relate la quête de Guybrush, à la recherche du trésor dont rêve tout pirate : le Big Whoop sur l'Île de Scabb. Malheureusement, Guybrush se fait voler la barbe de LeChuck par Largo LaGrande, qui ressuscite celui-ci sous la forme d'un zombie. Monkey Island 2 est un autre grand classique de l'aventure, peut-être plus connu pour sa fin surprenante dans un parc d'attractions de l'île de Dinky.

Alors que Lucasfilm Games a édité un jeu Indiana Jones en 1989 afin de coïncider avec la sortie du film Indiana Jones et la Dernière Croisade, 1993 voit la sortie du premier jeu Indiana Jones original. Le postulat de Indiana Jones and the Fate of Atlantis est totalement nouveau. L'histoire est celle d'Indy et son acolyte Sophia, qui cherchent à découvrir Atlantis avant que le IIIe Reich n'use du pouvoir de la Cité Engloutie à de mauvaises fins. En plus des dialogues croustillants et des puzzles intéressants, véritables marques de fabrique de LucasArts, Fate of Atlantis propose plusieurs manières de suivre l'aventure. A un moment de l'histoire, les joueurs doivent choisir entre trois manières de résoudre l'enquête : l'action, chemin qui privilégie la bagarre ; les énigmes en solitaire qui stimulent l'intellect ; et l'équipe qui permet à Sophia d'aider Indy dans leur aventure. Le jeu est par ailleurs vendu en CD-ROM « talkie » [« parlant », NdT] avec plus de 8 000 lignes de dialogues.

En 1993, les designers de chez LucasArts prennent la décision de remettre en scène un de leurs classiques des années 80. Day of the Tentacle est la suite de Maniac Mansion, bien que l'intrigue en est complètement différente et les nouveaux personnages nombreux. Le jeu est vendu simultanément sur un CD-ROM « talkie » et en disquettes. Dans ce jeu d'aventure burlesque, les joueurs prenent le contrôle de trois personnages : Bernard, un sympathique informaticien geek ; Laverne, une insomniaque étudiante en médecine, et Hoagie, un rocker roadie plutôt balourd. Ces personnages se réunissent pour empêcher la Tentacule Pourpre du Dr. Fred de dominer le monde. Grâce à la machine temporelle Chrono-WC, faite de trois toilettes et d'une Coccinelle, les héros se passent des objets à travers différentes époques. Nombreux sont ceux aujourd'hui qui le considèrent comme le meilleur jeu d'aventure de tous les temps.

« Parents ATTENTION: humour tordu » est le slogan apposé sur la boîte du jeu Sam & Max Hit the Road, le dernier titre d'aventure classique de LucasArts du début des 90s. Dans ce jeu, les joueurs incarnent deux détectives de la police freelance : Sam, un chien, et Max, son copain lapin hyperactif. Ce duo dingo voyage à travers l'Amérique sur la piste d'un Bigfoot de foire échappé, appelé Bruno. Les lieux visités comprennent la Plus Grosse Pelote de Ficelle du Monde et le Mémorial National Dino-Benji. On trouve aussi des séquences d'action comme le célèbre jeu Assome-rats™. C'est une autre grande référence, non seulement de l'aventure mais aussi de l'humour délirant dont fait preuve LucasArts à cette époque.

Tous ces jeux d'aventure classiques n'ont suivi qu'une seule règle de design général : ne jamais faire mourir le joueur. Cela permet de ne pas se soucier de sauvegarder constamment. Ce principe constitue une marque caractéristique de toutes les aventures classiques LucasArts.

• Star Wars (Novembre 1991, NES)
• The Empire Strikes Back (Decembre 1991, NES)
• Super Star Wars (Novembre 1992, SNES)
• Super Empire Strikes Back (Novembre 1993, SNES)
• Super Return of the Jedi (Novembre 1994, SNES, DOS, Gameboy)

Tandis que les joueurs PC se régalent des nombreux jeux d'aventure classiques au début des années 90, les joueurs console ont également la chance d'essayer les produits de LucasArts. En 1991, LucasArts s'associe à JVC Musical Industries, Inc. pour lancer les premiers titres Star Wars sur consoles. Basés sur la trilogie classique, ces jeux défilant permettent aux joueurs de diriger des personnages comme Luke Skywalker, Han Solo, la Princesse Leia, Chewbacca, et même l'Ewok Wicket. En supplément de l'action défilante, certains de ces jeux proposent des séquences de vol. Par exemple, Volksjäger permet de piloter le X-Wing dans la tranchée de l'Etoile Noire. Ces jeux sont très bien accueillis par critiques et fans : Super Star Wars est même récompensé d'une note parfaite par GamePro Magazine, et Nintendo Power magazine le désigne parmi les cinq meilleurs jeux Super Nintendo de 1992.

• Secret Weapons of the Luftwaffe® (Août 1991, IBM, PC CD-ROM)
• Tours of Duty: P-38 Lightning (1991); P-80 Shooting Star (1992); He162 Volksjäger (1992);
• Do335 Pfeil (1992) (Février 1993, IBM, PC CD-ROM, Mac CD-ROM)

Après le succès des simulations Their Finest Hour: The Battle of Britain et Battlehawks 1942 à la fin des années 80, LucasArts décide de poursuivre ce type de jeux avec un autre simulateur de la Seconde Guerre Mondiale : Secret Weapons of the Luftwaffe. Sorti en août 1991, le jeu retrace la campagne menée par la 8e Air Force Américaine pour anéantir la Luftwaffe allemande durant les dernières années du conflit. Les joueurs peuvent piloter chaque appareil allemand ou américain. Le jeu se distingue par un grand nombre de ses avions qui étaient encore en développement pendant la guerre. En d'autres termes, ces appareils ne furent jamais employés massivement en opérations, les joueurs peuvent donc faire l'expérience « et si » grâce au jeu. Ces possibilités sont étendues dans quatre « expansion packs » Tour of Duty. Les avions de ces extensions comprennent le Lightning P-38, un chasseur d'escorte bimoteur et le Dornier Do335 allemand, un intercepteur doté d'un propulseur conventionnel dans le nez et d'un moteur à réaction derrière la queue.

• Star Wars X-Wing (Février 1993, IBM, PC CD-ROM, Mac CD-ROM)
• Star Wars : TIE Fighter (Juillet 1994, IBM, Mac CD-ROM)
• Star Wars : Rebel Assault (Novembre 1993, PC CD-ROM, Sega CD, Mac CD, 3DO)

Après plusieurs années passées sur des simulations de vol type Seconde Guerre mondiale, il est naturel que l'équipe spécialisée de LucasArts se tourne vers les combats spatiaux de Star Wars. Star Wars: X-Wing est une sortie décisive, et a l'honneur d'être le premier titre Star Wars publié par LucasArts. C'est également l'une des premières simulations à modéliser les vaisseaux en 3D polygonée, à l'opposé des graphismes bitmap faiblement détaillés qui constituent l'essentiel des jeux aériens d'alors. Dans X-Wing, les joueurs endossent l'uniforme d'un pilote de l'Alliance Rebelle. Bien que le jeu s'appelle X-Wing, il est également possible de piloter un Y-Wing et un A-Wing. Les missions consistent à escorter des transports, se battre contre les chasseurs TIE de l'Empire et monter à l'assaut de l'Etoile Noire. X-Wing estt un énorme succès ; il est l'une des plus grosses ventes de jeux PC en 1993.

Les rôles sont rapidement renversés : Star Wars: TIE Fighter sort un an après X-Wing. Les joueurs sont à présent au service de l'Empire, sous les ordres de Dark Vador et d'autres commandants impériaux. Pourvu de missions non linéaires et variées, et d'un scénario passionnant et inquiétant mâtiné d'intrigues politiques, TIE Fighter est une suite fidèle à X-Wing. Enfin, il cimente solidement la réputation de LucasArts en tant qu'éditeur phare dans le domaine des simulations de combat.

Star Wars: Rebel Assault inclut par ailleurs du combat aérien, mais se concentre davantage sur un gameplay arcade opposé au modèle de vol complexe de X-Wing et TIE Fighter. Ce qui fait sa renommée est la présence de clips provenant des films en full motion vidéo. Réalisé par LucasArts comme son premier produit sur support CD-ROM, le jeu commence avec une version digitalisée du thème d'ouverture de John Williams. Rebel Assault est conçu comme une série de chapitres, chacun proposant une manière de jouer différente. Le jeu débute par une séquence de vol dans le Canyon du Mendiant sur Tatooine. D'autres niveaux permettent de piloter dans l'espace ou d'infiltrer une base impériale à pied. Rebel Assault est l'une des plus grosses ventes en CD-ROM à son époque, avec plus d'un million de copies écoulées.

• Night Shift® (Octobre 1990, IBM, Amiga, Atari ST, Macintosh)
• Defenders of Dynatron City® (August 1992, NES)
• Zombies Ate My Neighbors® (Septembre 1993, SNES, Genesis)
• Ghould Patrol® (Novembre 1994, SNES)

LucasArts édite aussi plusieurs autres titres loufoques durant cette période. Le concept de Night Shift est d'incarner un employé d'une usine de jouets devant atteindre des quotas de production d' « action figures » Star Wars et Indiana Jones. La boîte du jeu présente le label “Industrial Might & Logic” [« Puissance et Logique Industrielle », NdT], un jeu de mots basé sur le nom de la compagnie d'effets spéciaux de George Lucas, Industrial Light & Magic.

Trois autres jeux console arrivent aussi au début des 90s. Defenders of Dynatron City met en scène six super héros déjantés luttant contre le crime dans une ville où la mutation est une habitude. Zombies Ate My Neighbors [« Des zombies ont mangé mes voisins », NdT] est un « survival horror » dans lequel deux personnages, Zeke et Juila, combattent vampires, momies et zombies à l'aide d'armes telles le pistolet à eau et le lance-glace anti-tache. Enfin, Ghoul Patrol, suite de Zombies Ate My Neighbors, met de nouveau en scène Julie et Zeke combattant les démons.

A la fin de cette période particulière, LucasArts s'établi comme un éditeur leader, avec deux de ses titres aux sommets des ventes de 1993 : X-Wing et Rebel Assault. Se préparant à la suite de son histoire, LucasArts décide de poursuivre l'exploration des genres aventure et simulation. Mais la société souhaite par ailleurs élargir son horizon et s'aventurer dans d'autres types et de nouvelles plates-formes de jeu.