Quatre ans ont passé. Quatre années qui, pour certains, depuis que la Postlogie a fait ses premiers pas en 2015, ont paru être une éternité d’attentes. Attentes déçues de prime abord ou comblées par le temps qui passe, et enrichissent notre Saga préférée d’une nouvelle trilogie (et d’une suite) que beaucoup fantasmaient et qu’autant redoutaient ? Retour en arrière, autant personnel que critique, sur cette Postlogie forcément imparfaite…
30 décembre 2015, l’épisode VII est en salle depuis une quinzaine de jours et je m’inscris sur les forums SWU, tout décontenancé que je suis par cet opus. Au bout de deux semaines, je n’étais toujours pas certain d’adhérer à la proposition de J.J. Abrams et plus largement de Lucasfilm / Disney… Il m’a fallu plusieurs visionnages ciné pour finalement saisir ce qui me taraudait : il fallait faire le deuil de Star Wars tel que je le connaissais, car plus rien ne serait comme avant ! J’allais devoir désapprendre ce que j’avais appris…
George Lucas n’était plus que le « créateur » de cet Univers mais plus le «créatif », ou du moins plus son « faiseur » pour employer un terme un peu péjoratif mais parlant. Lucas avait été tout ça à la fois. Mais comme il est très rare d’être un génie dans tout ce qu’on fait, il avait lui aussi ses faiblesses et ses errements, même s’il a souvent su s’entourer des meilleurs.
Malgré sa légitimité de «Père de la Saga », il allait falloir se passer de lui et accepter de laisser d’autres s’emparer de l’Œuvre et, on allait assez vite s’en apercevoir, de certaines de ses créations les plus emblématiques, pour parfois les perdre défintivement.
Alors finalement, cet épisode VII ? Qu’en avais-je pensé ? Et bien j’avais aimé, vraiment. Mais j’avais dû apprendre à l’aimer. J’avais dû garder ce que j’aimais et « fermer les yeux » sur ses faiblesses, toujours dans l’attente annoncée de la suite, prévue pour décembre 2017 et signée cette fois Rian Johnson.
De toute façon, le final incroyable en forme de cliffhanger de The Force Awakens ne nous laissait guère le choix ! LUKE SKYWALKER ! ENFIN ! L’énigmatique et attachante Rey, qui cristallisait toutes les théories concernant son origine, allait-elle réussir à le ramener dans la lutte pour le Bien de la Galaxie ? Cette séquence de fin portait en elle les germes de ce qui allait suivre, au propre comme au figuré, dans cette Galaxie Lointaine comme dans la nôtre…
C’était reparti… pour deux ans de spéculations !
13 décembre 2017, l’épisode VIII tant attendu sort en salles. A priori tout va bien, en apparence. L’épisode a cartonné, relançant la saga au box office comme rarement dans l’histoire du cinéma. Le métrage a été produit sans encombre : pas de souci de remplacement de scénariste comme ça avait été le cas pour The Force Awakens, ce qui, dit-on, avait forcé J.J. Abrams et Lawrence Kasdan à calquer son scénario sur celui d’A New Hope. Pas de souci de production. Tout se déroule comme prévu. C’est maintenant. Maintenant que la trilogie doit se développer vraiment, sortir des enjeux vus et revus et lancer l’intrigue pour de bon. Il faut en plus apporter des réponses aux nombreuses questions laissées en suspens par son prédécesseur sur le contexte, les origines de Rey, le pourquoi de l’exil de Luke. Ça fait beaucoup, trop peut-être. La machine à théories des fans, activée comme jamais par la « boîte à mystères » de J.J. Abrams depuis deux ans, a conforté chacun dans ses attentes de ce que cet épisode VIII DOIT montrer. Et puis, un autre réalisateur aux manettes, ça ne pouvait signifier qu’un changement de ton, n’est-ce pas ? Un réalisateur moins connu que J.J Abrams assurément, mais sans doute aussi moins sclérosé que lui dans sa fanitude révérencieuse envers la Sainte Trilogie Originale… Forcément ça allait détonner ! Encore une fois, au propre comme au figuré.
C’est peu dire que j’ai été totalement dérouté par cet épisode VIII ! En témoigne ma critique sur la fiche du film : d’emblée, j’ai eu un mal fou à me reconnaître dans la proposition artistique de Rian Johnson. Son film était (je le pensais à l’époque et je le pense toujours un peu) gâché par de l’humour lourd et tape-à-l’œil, qui ruinait les moments de tension, et me sortait du film à de nombreuses reprises. J'ai depuis appris à passer outre. A l’époque, je n’ai pas été déçu par la traitement de Luke, infiniment plus intéressant que d’appliquer la « formule Abrams », à savoir un décalque de ce que la fin du Retour du Jedi pouvait laisser présager pour les spectateurs des films : Luke qui perdure dans son statut de Héros de la Galaxie, auréolé de sa victoire sur l’Empire Galactique. Lui, le Jedi devenu Maitre ayant réussi l’exploit que tous, ses propres Maîtres en premier lieu, pensaient presqu’impossible : détruire l’Empereur et ramener Dark Vador du bon côté de la Force ! En somme, une Légende… sur son piédestal. On le savait : Luke s’était exilé et coupé de tous. Quelle allait être sa réaction face à Rey ? Le caractère clivant de The Last Jedi allait commencer par la forme donnée à la réponse à cette question… Le film lui, semblait plus préoccupé par le fait de fermer des portes laissées ouvertes par le précédent que par l'idée de poursuivre dans la même direction. Seule la relation Rey/Kylo Ren s'epaissisait. La fin du métrage semblait sans enjeu...
Sans doute n’ai-je pas été le seul à être déstabilisé par cet épisode, car un phénomène de rejet du film se développa de la part d’une partie des fans, certains tombant dans l’extrême et l’inacceptable. Il convient encore une fois de dénoncer ces dérives, que je passerai sous silence. Contentons-nous de dire qu’elles ont marqué au fer rouge le fandom, et renvoyé de lui une très mauvaise image pour le grand public. L’onde de choc de ces polémiques stériles se fait encore sentir et aura des conséquences à long terme. Et en premier lieu, sur la suite…
18 décembre 2019. L’épisode IX de la Saga, enfanté comme l’épisode VII, avec quelques incidents de parcours, débarque sur nos écrans de cinéma. Après le renvoi du réalisateur Colin Trevorrow, intervenu en septembre 2017 pour les fameuses «divergences artistiques » devenues proverbiales et chères à Lucasfilm, J.J. Abrams a rempilé à la réalisation et au scénario, avec comme co-scénariste Chris Terrio. Manœuvre semblant presque désespérée d’une Kathleen Kennedy aux abois, mais qui a au moins le mérite de faire un consensus chez les détracteurs de l’épisode VIII, cette nouvelle laisse alors augurer un film qui saura répondre aux questions initiées dans l’épisode VII et conclure en beauté (ou sauver ce qui peut encore l’être, selon le point de vue où l’on se place) cette trilogie, et faut-il le rappeler, le cycle des neuf épisodes de la Saga dite « Skywalker ». La tâche est très lourde pour The Rise Of Skywalker. Il lui faut réussir sur plusieurs tableaux. L’épisode VIII a laissé des traces dans le cœur des spectateurs aussi bien que dans le récit de la trilogie en elle-même. Une Résistance quasi–décimée. Un grand méchant mort, à mi-chemin de la trilogie, choix radical de Rian Johnson mais lourd prix à payer pour accélérer le développement du personnage de Kylo Ren, dont la relation avec Rey au sein de ce récit a pris une importance cruciale… Le public répondra-t-il présent en masse pour le Grand Final ? Et surtout, que va-t-il bien pouvoir nous raconter tant l’épisode VIII s’était terminé sur une tabula rasa sans presque de perspective ?
On a affaire à un film très dense, particulièrement dans sa première partie, qui aurait bien mérité de durer une demie-heure de plus. Tout au long du film, on a l’impression d’une compression, comme s’il fallait impérativement évacuer certaines intrigues (Hux…) alors même qu’une autre est introduite brutalement (le retour de Palpatine) et qu’une troisième (la plus importante désormais) est menée à son terme. Encore une fois, la transition est brutale avec le film précédent : Abrams n'a pas voulu assumer de faire de Kylo Ren le Grand Méchant et a donc ressorti du chapeau l'Empereur ! Tentative bien tardive et artificielle d'unifier la Saga et d'y raccrocher cette Postlogie qui a toujours semblée un peu hors-sol. C'est le principal regret que j'ai pour cet opus : beaucoup d'artifices et trop peu de lien scénaristique solide avec la Saga Lucasienne. Le sentiment d'être face à un cadavre exquis domine face à cette Postlogie, totalement corroboré par son mode de production.
Que restera-t-il alors de cette trilogie ? Pour ma part : trois très bons films, dont deux dans approximativement le même ton, un peu trop sage, et un troisième plus iconoclaste, mais ne fonctionnant qu'assez mal ensemble. La très nette impression qu'il aurait fallu faire autrement. Mais aussi et surtout des personnages passionants et attachants qui me manquent déjà un peu et que je retrouverai avec bonheur. Et pour ceux qu'on a perdu : comme dirait Luke : "Personne ne disparaît vraiment tout à fait."
Merci Lucasfilm pour ces films qui n'ont que peu laissé indifférent. En espèrant que vous tirerez parti de vos erreurs. A ce sujet, je conclurai par cette dernière citation de Yoda : "L'échec est le meilleur des maîtres."
Jagged Fela
Neow a écrit:Très bon article de Jagged Fela
AmiralAkbar a écrit:- et aussi, pour moi une explication/interprétation logique de la chute des Jedi durant l'ancienne république. L'orgueil sur l'utilisation de la force (considéré au service du Jedi alors que c'est l'inverse) et donc de leur "aveuglement" et leur particpation à la guerre alors qu'ils auraient du écouter la force et rester les gardiens de la paix et non des soldats.
D'ailleurs, très drôle car on s'est fait la saga avec ma copine (qui ne les avait jamais revu dans l'ordre) et dans la scène d'ESB avec Luke et Yoda qui lui dit plus au moins "... l'action, l'aventure... jamais un jedi ces choses là ne les recherche..." - elle stop et me dit :"mais c'est pas logique! on vient de se taper 3 films où on voit tout le contraire!" - je lui dis juste d'attendre l'épisode VIII!
Fin de la parenthèse
xximus a écrit:
Maintenant je pense que cette question est centrale et qu'elle dépend avant tout de... de... Oui, vous l'avez, de notre propre point de vue.
[..] Il y avait chez Lucas une confiance dans la transcendance. Disney croit davantage au libre arbitre : « Les choix que nous faisons, les actions que nous menons, les moments épiques comme les moments insignifiants, font de nous des forces du destin », nous enseigne le générique de la série d’animation Star Wars : Forces of Destiny, lancée en 2017. [...]
SIeW a écrit:https://www.contrepoints.org/2019/12/30/361378-avec-disney-la-saga-star-wars-change-de-philosophie?fbclid=IwAR0J4ex-j2ccT3mf0WjoGMyc0KUAYHsHEVKqxflvA_76sAcDhoGD1a0UfmM[..] Il y avait chez Lucas une confiance dans la transcendance. Disney croit davantage au libre arbitre : « Les choix que nous faisons, les actions que nous menons, les moments épiques comme les moments insignifiants, font de nous des forces du destin », nous enseigne le générique de la série d’animation Star Wars : Forces of Destiny, lancée en 2017. [...]
Article pas inintéressant.
C'est justement un des points que je trouve déplaisant dans cette postlogie : sa naïveté. J'aurais préféré l'ingénuité.