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[Interview] Tomas Pueyo Brochard, auteur de The Star Wars Rings
 
[Interview] Comme disait Vador : "The circle is now complete"
19/09/2017
  • couverture du livre

 

Voici un nouveau livre qui s'attaque à la Saga Star Wars dans un domaine particulier qu'est la narration.

Pour vous donner une idée de l'analyse qui a été faite, quoi de mieux qu'une interview avec l'auteur.

Et en VF s'il vous plait. Car même si le livre est en VO, l'auteur, Tomas Pueyo Brochard, est bien VF. (^^)

Trêve de plaisanteries, Tomas m'attend sur le canapé, allons à sa rencontre.

 

Cerclement vôtre.

 


 

  • couverture du livre

    Tomas Pueyo Brochard

 

SWU : Salut Tomas. Tu viens d’écrire un livre appelé « Les Anneaux de Star Wars ». Pourquoi pensais-tu que le monde avait besoin d’un autre livre sur Star Wars ?

Tomas : Quand tu suis un peu Star Wars, tu vois toute la spéculation autour du prochain film, le gros débat sur l’originalité de Star Wars VII – Le Réveil de la Force (« SW7 »), ou la critique facile des préquelles. Ces trois débats, et beaucoup d’autres, ont des réponses objectives offertes par une analyse de la narrative des films. Malheureusement, peu de gens les connaissent.

Je voulais écrire ce livre pour répondre à ces débats. Si tu analyses la narrative des films de Star Wars, tu peux constater la structure rigide suivie par tous les films. Tu peux comprendre pourquoi SW7 ressemble autant à SW4. Tu peux pardonner un peu la débâcle des préquelles. Et tu peux prédire quelques éléments des films futurs.

 

SWU : Parle-nous un peu de toi. Quel est ton parcours ? Pourquoi t’a-t-il mené à écrire sur Star Wars ?

Tomas : Je suis un Français né à Nantes qui a fait ses études à Centrale Paris, mais j’ai vécu la plus grande partie de ma vie en Espagne et aux USA. Mon père était cinéaste. Parfois, il nous « kidnappait » de l’école pour nous emmener avec lui au cinéma, notamment pour voir Star Wars. Imagine faire ça à 5-6 ans. C’était très cool. Ensuite, pendant mes études, j’ai pas mal fait d’analyse narrative, notamment l’écriture de scénarios de films. Maintenant je vis en expatrié à Silicon Valley. Je bosse dans des startups du monde de la tech, en tant que chef de marketing et produit.

 

SWU : Quel est ton niveau de « fanitude » ?  (lol)

Tomas : Franchement, c’est impressionnant la quantité d’experts sur Star Wars ! Parfois, en parlant avec des fans, tu te rends compte que c’est vraiment difficile d’arriver à leur niveau de « fanitude ». Je n’arriverai jamais à lire autant de nouvelles, voir autant de séries animées, collectionner autant de figurines !

Mon côté de fan vient surtout de la narrative. En tant que fils d’un cinéaste, pendant mon enfance on passait des journées entières à décortiquer les films qu’on voyait en famille. Après ça, j’ai passé des centaines d’heures à comprendre les structures de scénario, et Star Wars est une saga qui suit ces structures narratives au pied de la lettre.

 

SWU : Ton livre propose une étude sur la structure narrative des films et en particulier la « structure en anneaux ». Peux-tu nous en dire plus, surtout pour les néophytes comme moi ^^ ?

Tomas: Bien sûr ! C’est le cœur du livre. Une histoire avec une structure en anneaux a trois aspects principaux. Elle est circulaire : le début et la fin sont comparables. Elle est symétrique : la première moitié reflète la deuxième moitié. Et elle est fractale : cette structure circulaire et symétrique se répète à plusieurs niveaux.

Le premier élément est la circularité. On connaît tous les histoires normales en trois actes : introduction, développement, conclusion. Elles sont linéaires. Mais les histoires les plus intéressantes ne sont pas en fait complètement linéaires, mais plutôt circulaires. La fin de l’histoire revisite le début, pour contraster le résultat des changements de l’histoire.

Par exemple, si tu prends une saga comme Harry Potter, tu vois qu’au début du premier livre et à la fin du dernier livre, le monde est libre de Voldemort grâce à Harry Potter, qui vit entre moldus. Le contraste souligne l’évolution subie par Harry : le monde est peut-être revenu à une situation normale, mais Harry est passé d’un petit enfant sans connaissance de magie à un des magiciens les plus puissants.

Star Wars 1 commence avec un monde sans forces du mal. Les films 1 à 3 montrent l’ascension du mal, et puis les films 4 à 6 leur destruction, revenant près de la situation initiale.

Le deuxième élément d’une structure en anneaux est la symétrie. La première moitié reflète la deuxième moitié. Comme je viens de l’expliquer, c’est ce qui se passe avec les épisodes 1 à 3 de Star Wars, qui sont symétriques aux épisodes 4 à 6.

Un autre exemple : si on prend Un Nouvel Espoir, dans la première moitié Luke commence sur sa planète, découvre les plans de l’Étoile Noire, rencontre Obi-Wan et son sabre laser, perd sa famille, rencontre de nouveaux amis (Han Solo et Chewbacca), et s’échappe des Stormtroopers dans l’espace.

Dans la deuxième moitié d’Un Nouvel Espoir, des évènements similaires se succèdent dans l’ordre inverse : Luke arrive dans un repaire de Stormtroopers, rencontre une nouvelle amie (Leia), sauve sa famille (encore Leia), voit des sabres laser en action, perd Obi-Wan, analyse les plans de l’Étoile Noire, et termine sur une autre planète, décoré par sa bravoure.

Le dernier élément d’un anneau est le côté fractal, c’est-à-dire, le fait que ces anneaux se répètent à plusieurs ordres de magnitude. Par exemple, ce que je viens de décrire pour Un Nouvel Espoir, ce départ du côté de la lumière vers le côté obscur, ça se passe au niveau d’un film. Mais ça se répète dans chaque film, et aussi au niveau des trilogies, et même des deux premières trilogies.

 

SWU : Comment as-tu appréhendé les nouveaux films par rapport à la Trilogie et la Prélogie ? Attention question piège vu que le monde est divisé concernant l’Episode VII ^^.

Tomas : Écoute, je comprends très bien les critiques. Ce sont d’ailleurs les critiques qui m’ont initialement intéressé à la structure narrative de Star Wars. Ce n’était pas logique : comment ça se fait que George Lucas, créateur d’un des films les plus connus de l’histoire, soit aussi capable de produire les préquelles. Et pourquoi JJ Abrams, un des directeurs de science-fiction les plus connus de notre temps, a copié si évidemment SW4 ? Si t’y penses, c’est pas logique. Je voulais comprendre pourquoi.

Si tu suis un peu la structure en anneaux, tu commences à voir ce que George Lucas et JJ Abrams essayaient de réussir.

Lucas avait complété un anneau entier pour Luke dans les épisodes 4-6 : Luke commence du côté de la lumière, se demande s’il ne devrait pas passer du côté obscur, et termine du côté de la lumière. Lucas s’est dit que, s’il fallait faire 6 films, il fallait construire un nouvel anneau. Il a pris Anakin et a formé son anneau. Vu qu’il passe du côté obscur à la lumière dans les épisodes 4 à 6, il fallait que les films 1 à 3 racontent son début du côté de la lumière et sa tombée du côté obscur.

Lucas était tellement obsédé par la structure narrative, qu’il ne s’est pas centré sur des côtés clé de n’importe quel film : des personnages intéressants, du dialogue crédible, une bonne direction des acteurs. Dans les films originaux, il n’avait pas suffisamment de pouvoir ou d’expérience comme pour tout faire. Du coup, il avait plein d’aide d’experts qui géraient ces côtés-là. Mais quand il a commencé à tourner les préquelles, il avait tellement de pouvoir que personne n’osait le corriger. Du coup, on s’est pris une trilogie qui a une structure narrative hyper ambitieuse, mais qui rate complètement le dialogue et la direction.

Abrams, lui, voulait bien évidemment mettre de la distance avec les préquelles. La meilleure manière de faire ça, c’est de faire que ton film ressemble le plus possible au film original, Un Nouvel Espoir. Mais il n’avait pas besoin de faire un film si similaire. Il n’avait aussi aucune raison de copier Un Nouvel Espoir au lieu de L’Empire Contre-Attaque ou Le Retour du Jedi. Le choix de SW4, c’est parce que c’est comme ça que tu commences un anneau. SW1 ressemble à SW4 et SW7. En fait, Abrams ne faisait que continuer les anneaux des films antérieurs. Il voulait nous dire : « Non seulement je m’inspire de la trilogie originale. Je vais aussi m’assurer que la nouvelle trilogie continue ce que les films de Star Wars ont de magique : ces structures en anneaux qui se répètent, sans jamais se copier ».

 

SWU : Quel genre de prédictions peux-tu faire en base à cette structure narrative ?

(note SWU : l'auteur ne spoile pas sur les prochains films, il ne donne que des hypothèses par rapport à son étude)

Tomas : On sait maintenant que SW7 ressemble à SW4. Mais il ressemble aussi à SW1. Anakin, Luke et Rey sont trois personnages différents qui vivent presque la même aventure. Maintenant qu’on sait ça, et que les nouveaux films suivent la structure en anneaux, on sait que SW8 va suivre la structure de SW5 et SW2.

Par exemple, on peut prédire que Rey va apprendre qui sont ses parents, de la même manière que Luke apprend qui est son père dans SW5 et Anakin perd sa mère en SW2. Rey va commencer à douter du côté de la lumière, comme Luke et Anakin. C’est probable que ce doute vienne de ce qu’elle apprendra de sa famille, comme pour Luke et Anakin. Elle peut perdre une main à la fin du film, comme Luke et Anakin. C’est aussi probable que le Premier Ordre attaque une base de la résistance sur une planète déserte, guidé par Capitaine Phasma, comme Darth Vader sur Hoth dans SW5 et les Jedi sur Geonosis dans SW2. C’est probable que Finn ou Poe arrivent sur une planète peu fiable, qu’ils aient des problèmes, et que Rey aille les aider malgré l’opposition de Luke, son nouveau mentor.

 

SWU : Pour ton premier livre, tu t’attaques à la Saga SW qui est quand-même un gros morceau. Pas trop eu la pression ?

Tomas : Chaque soir, je tremblais dans mon lit. Non je blague ! Franchement, un peu de pression. Surtout parce qu’il y a tellement de gens plus fan que moi, qui savent tout, qui ont tout lu !

Heureusement, mon domaine est assez spécifique : la structure narrative de la saga. Il n’y a pas tellement d’experts là-dessus. Je cherchais d’ailleurs un livre sur ce thème, mais je n’en n’ai pas trouvé. C’est pour ça que je me suis dit qu’il fallait en écrire un !

(note SWU : il existe un livre sorti très récemment sur la narration : Star Wars un récit devenu légende par Nicolas Allard, mais qui est bien différent du présent livre)

 

SWU : Comment s’est déroulé ton travail de recherche (visionnage, lecture, rencontres ...) ?

Tomas : J’ai commencé il y a des dizaines d’années, quand je débâtais des structures de scénarios avec mon père ! L’intérêt pour les structures d’histoires a continué pendant mes études aux USA, avec plusieurs cours de scénario à Stanford.

C’est dans ce contexte que j’ai découvert l’ambition narrative de George Lucas. Il est très connu dans le milieu parce que c’est le premier à adapter aux films une formule d’histoires mythologiques appelée le Voyage du Héro (« The Hero´s Journey »). Cette formule marche si bien que presque tous les films de Hollywood l’emploient.

En étudiant ce que Lucas a fait avec le Voyage du Héro, j’ai découvert les autres structures qu’il a employées, notamment la structure en anneaux.

En 2015, quand Disney a lancé Le Réveil de la Force, j’ai trouvé ça très cool qu’ils aient repris la structure en anneaux. J’imaginais que quelqu'un allait écrire sur le sujet. Au début de cette année, quand j’ai vu la bande-annonce de Les Derniers Jedi, ça m’a choqué de voir comment tous les plans télégraphiaient à l’audience la reprise de la structure en anneaux. J’ai cherché voir qui avait écrit sur le sujet, et quand je n’ai vu personne, je me suis dit qu’il fallait que je le fasse !

J’ai commencé par reprendre un peu tous mes livres de structure narrative, puis par revoir chaque film en les étudiants minute par minute. Au fur et à mesure que j’écrivais le livre, je partageais mes trouvailles avec un groupe d’amis fans de Star Wars. Leur feedback m’a permis d’améliorer le livre en même temps que je l’écrivais.

 

SWU : D’ailleurs, est-ce que tu peux nous dire quels livres ou autres sources t’ont fortement inspiré ?

Tomas : Oui bien sûr ! Au début, c’était les mêmes que Lucas lui-même : The Power of Myth et The Hero with a Thousand Faces, de Joseph Campbell. Les deux expliquent le Voyage du Héro. De là, mes sources préférées pour la structure de scénarios sont Save the Cat de Blake Snyder (facile à lire, bonne intro), The Anatomy of Story de John Truby, et surtout Into the Woods, de John Yorke, qui analyse en profondeur les structures symétriques et fractales des histoires.

Côté Star Wars, le premier texte à analyser la structure d’anneaux de Star Wars c’est The Phantom Menace : Repetition, Variation, Integration de Anne Lancashire. Finalement, Mike Klimo s’en est inspiré pour appliquer l’analyse aux 6 premiers films, qu’il a publié à starwarsringtheory.com.

Ensuite, il y a plein d’interviews de George Lucas et JJ Abrams, mais les meilleures sources, ce sont les films eux-mêmes et le contenu additionnel qui vient avec.

 

SWU : As-tu rencontré des difficultés particulières pour mener à bien ton projet ?

Tomas : Je pense que le côté le plus difficile, ce sont les prédictions. Raconter des histoires c’est un art, ce n’est pas une science parfaite. Il y a beaucoup de structure, de la même manière que la musique, dans le fond, c’est des maths. Cette structure dicte la direction dans laquelle les histoires doivent se dérouler, mais pas tous les détails. Dans le cas de Star Wars, la direction des scénarios est encore plus fixée d’avance, puisqu’il y a déjà 8 films et que tous adhèrent si fortement à des structures narratives comme celle des anneaux.

Mais ça ne veut pas dire que tout puisse être prédit. Une bonne partie de l’intérêt des films, c’est de découvrir où le créateur a décidé de diverger du chemin tracé. Du coup, en faisant mes prédictions, il a fallu que je pondère la probabilité qu’elles soient satisfaites et quels risques j’allais prendre. Par exemple, je pense que c’est extrêmement probable qu’on apprenne qui sont les parents de Rey, mais je ne peux pas être sûr que Rey perde sa main comme Luke et Anakin. Ça dépend vraiment du réalisateur.

 

SWU : Question subsidiaire. Tu n’as pas peur que les gens croient que Star Wars Rings est un cross-over avec la Saga Ring (réalisé par Hideo Nakata ) mais avec un hologramme maudit au lieu d’une vidéo ?

Tomas : Hahaha ! J’avais pas encore entendu cette comparaison, mais t’es pas le premier à comprendre le concept d’anneaux dans un autre sens ! J’allais envoyer le livre à un analyste professionnel, mais il m’a dit « Merci, mais je passe. J’aime bien Star Wars mais j’aime pas trop Le Seigneur des Anneaux » ! Ça m’a bien fait rigoler. Mais le problème principal, en fait, c’est Amazon. T’écris « Star Wars Rings » et les premiers résultats, ce sont encore des douzaines d’anneaux de doigt sur le thème de Star Wars…

 

SWU : Question venant du fond à gauche qui a pris Allemand en première langue, est ce qu’il y aura une version en français de ce livre ?

Tomas : Eh bien écoute, je suis prêt pour faire la traduction. Il me faut juste m’assurer que les lecteurs le veulent. Alors si t’as beaucoup de lecteurs qui le demandent dans les commentaires, je suis partant !

 

SWU : En attendant, où est-ce qu’ils peuvent acheter le livre ?

Tomas : Ils peuvent aller sur Amazon pour l’acheter en version Kindle ou livre de poche.

 

SWU : Merci beaucoup pour ces quelques mots.

Tomas : Je t’en prie ! C’est un plaisir.

Parution : 19/09/2017
Source : SWU
Validé par : jedi-mich
Type : Interview
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