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Moi, Droïd
Fiche | Ah, ces humains… | Vendetta | Le piège se referme
Ah, ces humain...
 
Il y a des fois où l’on a beau faire son possible, on n’est pas très discret. En particulier lorsque l’on est un droïd. Au beau milieu de la végétation luxuriante de Pantolomin, la carcasse métallique que je suis fait tâche… Mais je n’y suis pour rien, on m’a construit comme ça.
D’habitude, le bruit de mes maudites chenilles est supportable. Mais dans des circonstances telles que celles de ce jour là, ce n’est pas très bien vu.

Monsieur Marvic était accroupi dans les herbes hautes. Sur ses joues d’humain coulaient ce que l’on appelle des larmes, bien que je ne saisisse toujours pas l’utilité pour les êtres organiques d’émettre une telle substance.
Mais la raison, elle, semble évidente. Un sentiment qu’ils appellent la tristesse. Bien sûr, les êtres évolués, comprenez mécaniques, ne perdent pas leur temps avec ce genre de futilités. Les gens comme moi sont sérieux, rigoureux. Lorsque Monsieur Marvic me demande de remplir une tâche, je m’exécute, c’est ma programmation.
Programmation… Loué soit le Grand Créateur que Monsieur Marvic soit respectueux de mon espèce. Ce brave humain a eu la bonté de faire de moi… disons plus que ce pour quoi j’étais prévu. Balayer les dalles de la tour du Conseil Jedi était sympathique, mais quelle carrière voulez-vous faire avec cette perspective ? Surtout depuis que ces fameux Jedi ont tous été tués par l’un des leurs (parfois le comportement humain me laisse perplexe), je me suis retrouvé comme qui dirait au chômage technique.

Bien heureusement, il restait encore quelques-uns de ces Jedi (pendant un temps limité certes), l’un d’eux me tira de mon ennui, et je devins son serviteur dévoué. A lui et à Monsieur Marvic. Puis le gentil Jedi est mort lui aussi, et Monsieur Marvic m’a gardé auprès de lui.
Souvent je me demande si je ne devrais pas moi aussi être « triste », ayant connu le Jedi autant que Monsieur Marvic. Mais à quoi bon ? Surtout quand la personne en question est morte depuis au moins une bonne douzaine d’années, si ce n’est vingt…

Mais bref, je suis un droïd bien élevé et je restais silencieusement à l’écart, luttant pour ne pas faire grincer mes rouages. Un bain d’huile ne serait pas du luxe, mais Monsieur Marvic avait certainement d’autres choses en tête à l‘heure actuelle.
Chaque année, c’était la même chose. Monsieur Marvic venait sur cette planète où son ami était mort, et se recueillait devant la petite stèle commémorative envahie par les moisissures rampantes. Chaque année, il versait les seules larmes de l’année, puis s’en allait en prononçant les même mots.
Cette année, ce fut comme toujours. Au bout de quelques instants, Monsieur Marvic se releva et murmura :
« Que la Force te garde, Medi Trabe. A bientôt. »
Bref, une année comme toutes les autres. Monsieur Marvic passa près de moi, et fit un sourire triste qui mit encore à rude épreuve mes circuits. Le sens de ce geste me paraissait toujours aussi flou : je pensais qu’il s’agissait d’une marque de satisfaction, or la situation détruisait cette hypothèse.
Il allait falloir que j’en parle un jour à Madame Mystra. La brave humaine avait toujours su m’expliquer le comportement si bizarre des êtres organiques. Monsieur Marvic était moins explicite, mais son savoir-faire technique était une bénédiction. C’est à lui et à un de ses amis que je dois l’amélioration de mon senseur optique, la mise en place de mon synthétiseur vocal, ainsi que d’autres gadgets dont je préfère éviter de vous parler. Pourquoi ? Parce que ce genre de systèmes est interdit sur des droïds civils… Et oui, l’Empire n’aime pas voir traîner des droïds assassins qui ne soient pas leur propriété.
Comment ? Je l’ai dit ? Ah si, je l’ai dit. Vivement que Monsieur Marvic se décide à me bidouiller un programme de mensonges, c’est si utile… Je reconnais la suprématie des organiques dans l’art de la duplicité !

L’Arc de Cristal attendait dans une prairie proche, le superbe appareil reposant sur ses trains d’atterrissage. Ah, cet Arc de Cristal… Après Monsieur Marvic et Madame Mystra, la seule chose dans cette galaxie qui ait de la valeur à mes yeux. Le droïd de bord est quelqu’un de fort sympathique (bien que n’égalant pas ma qualité, cela va de soi), et cet appareil est une vraie merveille. Certes, tout comme moi, il n’était pas le même lors de son acquisition par Marvic et Mystra Sanaka, mais Monsieur Marvic et moi sommes des experts en la matière… Un coup de peinture par mes bons soins, un aménagement intérieur et quelques bricolages, et voyez le résultat ! Et encore le meilleur reste à venir…

Je suivis Monsieur Marvic, mes chenilles grinçant comme si je venais d’être refourgué par un jawa à l’honnêteté contestable. Marvic m’avait promis d’installer des répulseurs… Le rêve de tout droïd normalement constitué ! Monsieur Marvic lui était déjà entièrement équipé : deux bras, deux jambes, une tête aux traits taillés à la serpe, aux yeux et cheveux longs noirs. Bref, un humain des plus quelconque, bien que Madame Mystra ne soit pas de cet avis.
Madame Mystra descendit la rampe du vaisseau. Les humains la trouvaient belle, mais j’aurais été bien incapable de le confirmer. Ceci dit, j’admets que la différence avec un hutt est flagrante… Monsieur Marvic la rejoignit en quelques enjambées, et se laisse doucement aller dans les bras de la grande et mince humaine aux longs cheveux châtains. Il enfouit son visage dans ces derniers.
Fatigué par ces gestes dont je cernais toujours pas l’intérêt, je gravis la rampe de l’Arc pour préparer le décollage. Mais mes senseurs audio eurent le temps de capter un échange vocal.
– Ca va ? demanda Madame Mystra.
– Si on veut. C’est si étrange, Mystra. Je suis toujours aussi persuadé qu’un jour, Medi reviendra. Il entrera chez moi, et je reverrai son visage.
– Qui sait, Marvic ? Qui sait…
Ils joignirent leurs lèvres, alors que je gagnais le poste de pilotage du vaisseau. Le droïd de bord intégré m’accueillit par quelques bips enthousiastes. Je lui répondis dans le même langage binaire, le seul que maîtrise ce pauvre droïd simpliste. Pour une meilleure compréhension (bien que je ne doute pas que le langage binaire n’ait pas de secrets pour vous), je vous proposerai une version en basic de nos propos.
– Salut Edo. Prêt à partir.
– Une minute Arc, ils sont encore en train de se bécoter dehors…
– Pour changer… Et c’est toujours les mêmes qui poireautent… Si j’ai bien suivi, c’est le jour de la commémoration, non ?
– C’est ça, répondis-je. C’est vrai que toi tu n’as pas connu Monsieur Medi…
– Malheureusement.
– C’était un bon Maître. Un Jedi, bien que j’ignore en quoi il différait des autres humains. Je te raconterai tout cela une autre fois, quand nous serons en vacances.
– Si nous le sommes un jour… rétorqua Arc.
– Nous suivons les projets de Monsieur Marvic. Lui ne sera pas en vacances tant que l’ordure qui a tué Monsieur Medi vivra encore… Alors nous pourrons songer à prendre du bon temps, bain d’huile alderaanienne pour moi et coup de peinture pour toi ! En attendant, on a du boulot.
Pour bien faire comprendre à Arc où je voulais en venir, je brandis deux des blasters dissimulés dans mon corps métallique. Monsieur Marvic avait eu une bonne idée en me programmant des séquences d’assassinat. J’étais au moins sûr de ne pas me faire voler et démonter en pièces détachées par un ugnaught trop entreprenant… Mais à ma connaissance, Monsieur Marvic avait un but précis lors de ma nouvelle programmation. Une image cible hantait ma mémoire vive.
Une drôle de sensation envahit mes circuits imprimés à cette pensée. De la colère ? C’était bien improbable chez les êtres objectifs comme moi. Quoique…
Néanmoins, j’avais conscience que mon existence avait un seul objectif : que la personne désignée par Monsieur Marvic rejoigne ses victimes « dans la Force » comme aurait dit ce brave Medi Trabe. J’avais un temps vécu avec l’obsession que les dalles du Conseil Jedi brillent, à présent je voulais carboniser le masque noir de cet individu. Au fond de moi, je savais que je n’aurais de repos avant que cet être, assassin de Monsieur Medi, ne périsse : le Seigneur Noir de Sith. Vader. Darth Vader.

Etre chez soi restait un bonheur sans nom. Retrouver son bain d’huile préféré, partager ses données avec l’ordinateur central familial, ne pas courir sans cesse après une recharge de batterie… Le paradis des droïds.
Derra IV, petite planète de la Bordure Moyenne, n’avait pas échappé au joug impérial, et le Gouverneur Pakir Venko s’amusait à jouer les tyrans sur la population. Ni riches ni pauvres, les derrans, peuple humain, ne demandaient qu’à vibre paisiblement. Mais Venko pillait allègrement leurs ressources, amassant un butin dont il ne savait plus quoi faire. On murmurait que sa résidence abritait ce trésor, dissimulé dans un coffre dont lui seul connaissait le mot de passe.
Pakir Venko se voulait proche du peuple, leur promettant un bel avenir avec les impôts phénoménaux collectés. Je n’avais pas besoin d’un programme comptable pour sentir que ce type là était un escroc… Et le peuple le méprisait, lui et ses courbettes hypocrites. Il jouait les maîtres, alors que l’Empire l’avait exilé sur une toute petite planète, sans intérêt financier ou militaire.

Car, bien que l’Empire eut remplacé la République depuis bien des années, les conflits n’avaient pas cessé. Une Rébellion avait pris forme, se renforçant lorsque l’Empereur Palpatine (ce type me faisait froid aux circuits) avait dissous le Sénat Impérial, accentuant son mode de gouvernement despotique. Même quand il était sénateur de la planète Naboo, je n’avais pas confiance en cet humain, malgré l’absence de données psychologiques dans mes systèmes. J’avais bien dit que c’était un tordu, mais qui se souciait de l’avis d’un droïd de nettoyage ? Peut-être aurais-je été plus influent si j’avais été droïd de protocole…
En fin de compte, je ne regrettais pas mon existence. Toutes ces aventures auprès de Monsieur Marvic… Toutes ces années passées à traquer Darth Vader… Je me souviens encore du jour où Monsieur Marvic avait attiré le Jedi Noir dans les ruelles d’Ord Mantell, alors que je braquais mon fusil sniper Eradicator sur la tête de Vader. Mais l’opération avait échoué, comme toutes les autres. Vader semblait toujours avoir une longueur d’avance sur mes circuits de raisonnement de pointe. Même à l’époque où Marvic s’était allié à des Rebelles, voire à des gens moins fréquentables (je n’ai jamais approuvé notre alliance avec ce voyou de feu Xizor), Darth Vader s’en était toujours sorti. Monsieur Marvic et moi même en avons vu des gens courageux périr sous son gant noir… Puis Monsieur Marvic a renoncé, à ma plus grande déception. Mais je sais qu’au fond de lui, Monsieur Marvic ne cessera jamais le combat. Monsieur Medi doit être vengé. Que Marvic continue ou non, moi j’achèverai un jour le travail. Et pas uniquement parce que je suis programmé pour cela.

Nous avions été bien satisfaits d’apprendre la défaite impériale de Yavin, il y a un peu plus de deux ans de cela. L’Empire avait bien fait une campagne de propagande pour maquiller le désastre et faire du défunt Moff Tarkin un héros martyr, mais les sources Rebelles de Monsieur Marvic étaient bien plus fiables. Leur super-arme, l’Etoile Noire, avait été détruite par quelques chasseurs, et des noms comme Luke Skywalker, Yan Solo, Chewbacca ou encore Wedge Antilles étaient murmurés dans certains milieux. Lors de l’annonce de la nouvelle, j’avais bien regretté de ne pas pouvoir émettre ce que les organiques appelaient le rire. Je trouvais que le circonstance s’y prêtait. J’ai bien compris le principe, non ?
Mais les Rebelles avaient pris un mauvais coup lors de la Bataille de Hoth (ne dites à personne que je sais tout ça, sinon les Renseignements Impériaux risqueraient de purger ma mémoire…), et les choses semblaient mal se passer.
Cependant, je gardais espoir d’être débarrassés de ces ennuyeux impériaux. Les cellules de résistance rebelles pullulaient, et je me régalais chaque fois que Monsieur Marvic trafiquait avec celle de Derra IV. J’ignore encore pourquoi j’éprouve cette sensation. Le comportement humain doit sérieusement m’influencer, je devrais faire plus attention !

Je passais malheureusement peu de temps dans ce havre de paix qu’était notre foyer sur Derra IV. Je partais souvent en voyage d’affaires avec Monsieur Marvic et Arc, laissant Madame Mystra à la maison. Mais ces voyage de marchandage étaient peu passionnants. Monsieur Marvic passait son temps à vendre des pièces haute-technologie que Arc ou moi aurions bien aimé ajouter à nos structures respectives… Monsieur Marvic s’en excusait, expliquant que les humains avaient des besoins naturels qu’ils devaient satisfaire. D’ailleurs, si il parlait bien de boire et manger, je ne saisissais toujours pas l’utilité : d’après ce que j’ai vu, tout ressort après ! Moi, vous m’avez déjà vu recracher mes batteries ?! Non, je les recharge, moi au moins j’ai été conçu par quelqu’un doté d’un minimum de jugeote. Ce ne pouvait être qu’un droïd si vous voulez mon avis… Quant aux autres besoins humains, dormir je peux le comprendre, j’assimile ceci à mon mode veille. Mais j’ai pu constater d’autres actions qui ressemblent à des besoins à la manière dont les organiques tiennent à les pratiquer, et là j’avoue que mon génie mécanique est dans une impasse. A quoi cela rime-t-il ? Je préfère ne pas trop y penser et éviter la surchauffe de mes pauvres circuits.

Pour une fois, Monsieur Marvic était parti seul avec Arc, et moi je restais avec Madame Mystra. Bien que cela ne fasse plus partie de mes attributions, j’aidais volontiers la gentille dame dans les tâches ménagères. Elle m’avait aidé à développer mon système de cuistot, mais bizarrement les Sanaka y faisaient rarement appel. Ils auraient pourtant dû savoir que je faisais tout à la perfection (je n’y peux rien, je suis comme ça). Ceci dit, je n’ai jamais eu l‘occasion de goûter mes plats, une dose d’énergie me suffit amplement. Et le ragoût de mynock que j’avais préparé pour leur anniversaire de mariage n’avait pas rencontré le succès escompté. Moi qui avait voulu être original… Qui a dit que je suis vexé ? J’ai une tête à être vexé moi ? Bien…

Mais rester à la maison m’avait permis de remarquer certaines choses… Les Sanaka étaient un couple de fort bonne réputation sur Derra IV, et je vis vite que le gouverneur Venko n’y était pas indifférent. Il semblait porter un intérêt tout particulier à Madame Mystra, ses hommes l’informant de ses moindres faits et gestes. Pourquoi, j’aurais été bien incapable de le dire, malgré mon génie.
Je ne connais pas trop les coutumes humaines, mais je compris vite que les intentions de Venko étaient de se rapprocher de Madame Mystra d’une manière plutôt physique. Il me semble me souvenir que Madame Mystra avait déjà certains engagements avec Monsieur Marvic, et il me semblait évident que ce dernier apprécierait peu le petit manège du gouverneur.
Si je vous raconte tout cela, c’est parce que lors de ce voyage de Monsieur Marvic, Pakir Venko vint rendre visite à Madame Mystra, et je me félicitai d’être présent pour veiller au grain.
Une sonnerie retentit dans la maison. Madame Mystra était en train de découper un steack de nerf, et ce fut à moi d’aller ouvrir. Je me déplaçai rapidement vers la porte d’entrée, l’ouvrit, et décrypta le visage de Venko. Ses sourcils froncés montraient clairement qu’il n’était pas ravi de me voir.
– Ote toi de mon chemin droïd. Où est ta maîtresse ?
Je pris mon air le plus stupide (il y avait du chemin à faire), tout fier de mes talents de comédien.
– Madame Mystra ne peut vous recevoir pour le moment Monsieur le Gouverneur. Puis-je vous aider ?
– J’en doute.
Venko fit un geste de la main, et ses hommes me bousculèrent pour pouvoir passer. Je protestai énergiquement, mais le gouverneur et ses quatre hommes étaient déjà dans la cuisine. Je les rejoignis aussi vite que mes pauvres chenilles me le permettaient, et vit que Pakir Venko avait attrapé la main de Madame Mystra. Celle-ci paraissait peu satisfaite de la situation.
– Pakir, que faîtes-vous ici ? Edo, c’est toi qui les a laissé entrer ?
Je devinai à son ton qu’elle savait parfaitement ce qu’il s’était passé.
– Ravi de vous voir, douce Mystra, déclara pompeusement Venko. Vous, laissez nous.
Ses quatre hommes tournèrent les talons avec un hochement de tête. Je restai dans la pièce, sachant pertinemment que Venko n’apprécierait pas.
– Hé ! lança-t-il aux hommes sur le seuil en me désignant.
Deux des types me soulevèrent de terre facilement. Je comptais bien inculquer certaines leçons de politesse à ces fichus humains, mais Madame Mystra m’en empêcha.
– Edo, fit-elle doucement, ne fais pas empirer les choses. Je vais régler tout ça…
Les gardes du corps me jetèrent sans ménagement hors de la pièce, et me rejoignirent. Ma coque métallique grinça contre le parquet, et je me hâtai de me redresser dignement. La porte de la cuisine avait déjà été fermée, et les quatre malabars montaient la garde, me toisant avec mépris. Je retins la tentation de leur montrer le fonctionnement de mes blasters…
Je me tins droit, bien gentiment. Ce que les deux humains ignoraient, c’était que mes senseurs auditifs de pointe me permettaient de ne pas perdre une miette de ce qui se disait dans la cuisine… Et mon enregistreur intégré ferait profiter de tout cela à Monsieur Marvic. Après tout, c’était lui qui l’avait bricolé !

– Vous savez que vous n’avez pas le droit d’être là, Pakir, fit prudemment Madame Mystra.
– Ici c’est ma planète, ma chère. Comment allez-vous ?
– J’irai mieux quand vous et vos barabels seraient partis ! cracha-t-elle.
– Ah, pourquoi de telles paroles ? Vous savez pourtant ce que vous ressentez… susurra Venko.
Madame Mystra explosa à ces mots.
– Ne prenez pas vos rêves pour des réalités ! Cela fait des années que je vous demande de me laisser en paix !
– C’est que j’aime obtenir ce que je veux…
– Ne me faites pas votre numéro de séducteur, vous pensez que je ne connais pas le nombre de femmes à qui vous le jouez ?
– Vous êtes un cas à part, belle Madame Sanaka…
– Et vous un malade d’impérial qui lui n’a rien de particulier ! Pour la dernière fois, sortez d’ici, avant que Marvic ne revienne !
– Ce cher Sanaka… Il faudra un jour m’expliquer pourquoi vous avez préféré ce genre de vagabond à un homme de valeur et d’avenir comme moi…
– Je n’apprécie guerre les bouchers de l’Empire, ni leur avenir ! A moins que vous ne décidiez de servir à bord de la prochaine super-arme qui finira en débris cosmiques, là ça me plaît ! lui jeta-t-elle.
– Malgré tout ce que j’éprouve pour vous, menaça le gouverneur, je vous prierai de bien vouloir surveiller vos paroles. Ma patience a des limites.
– La mienne aussi, rétorqua Madame Mystra. Et cela fait des années que vous les dépassez allègrement.
– Tiens donc… Et que comptez-vous faire ? fit l’impérial sur un ton sournois. Vous allez m’arrêter ?
– Ne jouez pas à ça, Venko. Ne sous-estimez pas ma famille.

Sa famille… Elle devait par là évoquer Monsieur Marvic et… moi ! Enfin, je pense. Etait-ce un appel à l’aide ?
– Mais pour l’heure, murmura Venko, votre cher Marvic n’est pas là, et je doute que votre balayeur de droïd me fasse grand mal avec ses balais…
HA HA HA, voilà bien la stupidité humaine ! Je regrettai de ne pouvoir sourire, pensant à la tête que ferait ce type quand je lui braquerais mes blasters sous le nez… Un moment jouissif en perspective, que je me devais d’enregistrer en holo pour en faire profiter Arc et tous les autres droïds du quartier !
– Je le répète Venko, gronda Madame Mystra, ne faites rien de stupide que vous risqueriez de regretter. Je devinai le doigt menaçant qu’elle levait vers son interlocuteur. Mais la suite, j’eus plus de mal à la deviner, et je regrettai amèrement de ne pas être équipé de senseurs à rayons X passant à travers les murs.
Les gardes ne bronchèrent pas quand le bruit de ce qui devait être une table renversée se fit entendre. Madame Mystra se serait-elle décidée à corriger ce type ? Malheureusement, les sons que mes senseurs perçurent allaient peu dans le sens de cette hypothèse…
– Je suis ici chez moi, tonna Venko. Ce qui est ici m’appartient !
– Lâchez-moi espèce de gamorréen en rut ! cria Madame Mystra.
– Vous allez voir que le joug impérial n’est pas si terrible que ça, tendre Mystra…
Je me retins d’applaudir en entendant l’impérial gémir, Madame Mystra ayant certainement atteint une zone sensible de l’anatomie du mâle. Mais je l’entendis émettre un petit cri alors que Venko avait dû la repousser peu galamment.
– Espèce de garce paysanne, tu vas voir, je vais t’enseigner le respect que tu dois à l’Empire !
Deux de mes quatre bras mécaniques s’approchèrent de l’emplacement des blasters que Monsieur Marvic m’avait judicieusement intégrés. Je n’avais jamais vraiment eu l’occasion de prouver à quel point mes séquences de programmation de combat étaient performantes, serait-ce là l’occasion que j’attendais ?
– Hé vous autres, que deux d’entre vous viennent m’aider à tenir cette femme, je vous promets que vous apprécierez le spectacle !
Deux des gardes réagirent à l’appel de leur maître, et le rejoignirent dans la cuisine avec des grognements de satisfaction malsains. Je m’approchai également, mais les deux gardes restants me barrèrent la route, de mauvaise humeur car frustrés de ne pas pouvoir se divertir comme leurs collègues…

Madame Mystra poussa un cri aigu, et j’entendis un des hommes crier, certainement lui aussi atteint par les techniques défensives de ma maîtresse. Mais ils étaient trois, certainement avec des idées peu recommandables en tête, et je savais que mon devoir était d’agir. Je pris ma voix la plus diplomate en m’adressant aux deux gardes devant la porte.
– Messieurs, je me permets de vous demander de cesser immédiatement vos exactions.
Les deux types semblèrent hésiter un moment. Puis ils se regardèrent mutuellement et partirent d’un rire gras qui montrait bien leur niveau intellectuel, pire que celui d’un droïd souris.
– Mon petit père, fit l’un d’entre eux, tu attends ton tour, tu trouveras bien quelque chose à faire à cette bonne femme !
Son compère éclata de rire de plus belle.
– Je suis résident de cette maison, fis-je en essayant de garder mes circuits froids. Je vous demande de bien vouloir sortir immédiatement.
– Retourne à tes balais, droïd, cette fille a trop fait attendre le Gouverneur, à présent laisse le prendre le bon temps qu’il mérite !
Les bruits provenant de la cuisine semblaient indiquer que Madame Mystra continuait à se défendre, mais faiblement. Les trois hommes avaient dû réussir à la maîtriser plus ou moins, et des grognements pervers typiquement masculins me donnèrent envie de vomir mes circuits.
J’entendis Madame Mystra sangloter, mettant à mal mon processeur sensible. Et soudain elle hurla, alors que Venko lui murmurait des choses qu’il devait être loin de dire à ses supérieurs.
Et enfin, j’entendis ce que j’attendais.
– Edoooooooo !

Il ne m’en fallait pas plus. Les deux gardes riaient encore quand je dégainai mes blasters. Ils n’eurent pas le temps de me voir agir, ils avaient déjà tous deux le front carbonisé par mes tirs, précisément au même endroit chacun. Ils glissèrent simultanément au sol, tandis que les types de la cuisine s’interrompaient, ayant entendu les détonations.
Mes capteurs olfactifs sentirent l’habituelle mélange d’ozone et de chair calcinée. Satisfait de ne pas avoir perdu la « main », je m’approchai de la porte de la cuisine, pendant que Venko appelait d’une voix inquiète ses deux gardes abattus. Puis je l’entendis murmurer quelques mots dans son comlink, appelant des renforts postés à l’extérieur.

Ma programmation me permettait d’ouvrir n’importe quelle porte de la maison à distance. Je me postai donc à l’écart, et actionna l’ouverture de la porte de la cuisine. En un élan, les deux gardes du corps qui étaient restés avec Pakir Venko jaillirent hors de la pièce, blaster au poing. Ils furent surpris de trouver les deux cadavres, mais ne me virent pas, moi, l’habile tireur, tapi dans l’ombre d’un placard à balai. Un des gardes commença à inspecter le hall d’entrée, tandis que le second retournait protéger le gouverneur.
Après un tour de recherche infructueux, le garde regagna à son tour la cuisine. Je me doutai que les gardes attendaient patiemment derrière la porte, prêts à me mettre en pièce dès mon arrivée, surveillant l’ouverture de la porte pour être le premier à tirer.
Soudain, une escouade de huit stormtroopers arriva dans le hall d’entrée. Ils approchaient de la porte de la cuisine, prêts à avertir de leur arrivée, quand j’actionnai à distance la porte. Les gardes à l’intérieur, certainement très nerveux, ouvrirent immédiatement le feu, pensant que leur agresseur passait à l’attaque.
Les stormtroopers n’eurent pas le temps de réagir, et trois d’entre eux furent fauchés par les rayons rouges de leurs collègues impériaux.
– Cessez le feu, bande de wookies sans fourrure ! brailla Venko.
Mais sa voix fut couverte par de nouvelles détonations. Celles de mes blasters, maniés par les mains d’un véritable expert. J’avais jailli de ma cachette, prenant de flanc la formation des troupes de choc. Mon premier tir, tiré en même temps par mes deux armes, atteignit le leader du groupe en pleine poitrine, l’envoyant valser contre une statue hapienne (où Monsieur Marvic s’était-il procuré ce truc ? Ma mémoire me fait défaut…). Les quatre stormtroopers restants se tournèrent dans un geste, et identifièrent leur terrible adversaire. Un droïd de ménage… Dommage que leurs casques blancs masquent leur visage, leurs airs déconfits auraient fait mon bonheur !
L’heure n’était pas au divertissement. Quoique, je trouvai amusant quand un tir double atteignit les deux genoux d’un soldat, qui tomba à terre en grognant une injure sur mon espèce. Je n’appréciai guère, et un tir à la gorge mit fin à ses souffrances et à ses insultes déplacées (non mais !).
Je me trouvai cependant obligé de m’abriter derrière un angle de couloir quand le tir défensif se fit trop intense. Heureusement, Monsieur Marvic m’avait fourni d’autres gadgets très utiles…
Quel bonheur, ce cri « Une grenade ! », bien que le plus savoureux soit les hurlements survenants lors de la détonation. Je baissai par réflexe le niveau de mes senseurs audio pour ne pas trop souffrir du bruit correspondant, puis je m’élançai de toute la puissance de mes chenilles. Seul regret : Monsieur Marvic allait peu apprécier que je fasse de sa maison un terrain de jeu…
Un épais nuage de fumée avait empli le hall, témoin de l’efficacité de mon détonateur thermique. Un rapide examen des sources de chaleur m’apprit que seul un soldat de choc avait survécu à l’explosion, et se tenait recroquevillé sur le sol, son bras à ses côtés. Plus par mépris que par pitié, je l’achevai sans cérémonie.

La porte de la cuisine avait été soufflée par l’explosion, et une partie de la fumée se déversait dans la cuisine. Un des gardes, qui devait être collé à la porte au moment de l’explosion, avait été propulsé contre le mur opposé, où il avait dû s’écraser la tête. J’entendis des toussotements, certainement Venko. Je repérai Madame Mystra, allongée par terre, les vêtements déchirés à des endroits que les humains auraient estimés stratégiques, elle avait perdu connaissance.
Soudain, un coup violent secoua les circuits de ma tête mécanique, et me fit lâcher mes blasters. Le dernier garde se tenait derrière moi, avait visiblement perdu son arme dans la tourmente, et s’apprêtait à me transformer en pièces détachées. Il frappa à nouveau, et j’attrapai habilement son poignet. Je fis un mouvement sec, et un craquement d’os m’indiqua que les techniques de combat enseignées il y avait bien longtemps par Medi Trabe étaient bel et bien efficaces.
Le type hurla, puis utilisa son second bras pour agripper la jointure de l’un de mes quatre bras. Il tira comme un togorien en colère, et je vis avec horreur que mon membre avait été arraché de ma structure. Des fils électriques pendouillaient lamentablement, et je retins un cri.
Ben oui, croyez le ou non, j’étais en colère ! Comment ça je ne suis qu’un droïd ?!? Que l’on soit humain, gungan, droïd ou bantha, on n’apprécie guère l’amputation, vous n’avez pas le monopole de la souffrance !
Bref, cela ne me plaisait guère. Bien qu’arrivant à la taille de l’homme, je parvins à le frapper au ventre, et le type gémit. Puis, profitant de son étourdissement, je dégainai un de mes autres blasters (Monsieur Marvic était vraiment un saint homme pour les droïds…), et le gars ouvrit de gros yeux ronds en tombant nez à nez avec le canon. Et là, pas de casque, je pus profiter de sa tête d’ahuri ! Mais bon, on n’était pas là pour rigoler. Le coup partit, et je n’attendis pas de voir son corps tomber pour me détourner de cet imbécile d’humain.

Je me dirigeai vers Madame Mystra pour voir… qu’elle avait disparu. Mon senseur optique à 180° aperçut Pakir Venko qui s’éclipsait par la porte qui donnait sur les terrasses de la maison. Sans perdre la moindre milli-seconde (je me reprocherai toujours d’avoir fait joujou avec mes victimes impériales), je me lançai à sa suite. Je passai la porte à mon tour, et vit le gouverneur qui gravissait les escaliers extérieurs menant au toit, et il tenait près de lui Madame Mystra, le canon de son blaster pointé sur l’humaine. Le type n’était pas si stupide : mes maudites chenilles ne me permettaient pas de le suivre à la même son allure dans les escaliers, et il lui suffisait d’un geste pour abattre son otage. Cela ne m’empêchait pas d’avoir mes deux derniers blasters pointés avec précision sur la tempe de cet humain. Malheureusement, ses fréquents mouvements mettaient fréquemment Madame Mystra dans ma ligne de mire. La bravoure impériale…

Des tirs fusèrent autour de moi, me forçant à me replier dans la cuisine. J’eus le temps de voir des troupes de choc, en bas dans la rue, qui couvraient la fuite de leur supérieur. Puis d’autres tirs retentirent, puis encore une riposte. Je m’étais mis à l’abri, alors sur qui pouvaient-ils bien tirer ?
Mon comlink interne se mit en route.
– Fonce Edo, je te couvre !
– Monsieur Marvic ? Mais…
– Tais toi et dépêche toi, Venko est distrait par ma riposte !
Je n’attendis pas et ressurgis sur le balcon. Venko montait encore, ralenti par les efforts de Madame Mystra, qui se débattait comme un pickpocket chadra-fan pris sur le fait. J’ajustai mon tir, prêt à en finir, mais Venko s’en rendit compte et plaça Madame Mystra devant lui, comme un bouclier humain. Ma perfection en ce que concerne la visée était sûre, mais les dégâts subis lors de l’affrontement me firent douter un instant. Moi, douter ! Je me ressaisis, mais craignais toujours de blesser Madame Mystra. Jouant la sécurité, je réajustai mon tir sur l’épaule non protégée de Venko. Je fis feu instantanément, et fis mouche (vous me prenez pour qui ?).
La douleur força Venko à lâcher son otage. En bas, j’entendais les coups de feu qui témoignaient d’un affrontement farouche entre Monsieur Marvic et les troupes de choc. Quant au gouverneur, il glissa à genoux, se tenant l’épaule en jurant. Madame Mystra s’était dégagée, et commençait à redescendre les escaliers dans ma direction.
Selon toute vraisemblance, Monsieur Marvic avait fui l’affrontement (à un contre une vingtaine, c’est pardonnable), avait fait le tour de la maison et venait d’arriver derrière moi, ses blasters Blastech aux poings. Il commença à monter les marches, me demandant rapidement de le couvrir. J’obéis avec plaisir, arrosant de lasers les stormtroopers en poste dans la rue.
Monsieur Marvic et Madame Mystra approchaient l’un de l’autre, tandis que Venko gisait toujours à terre, geignant de douleur. Mais moi, seul être sensé de l’histoire, je savais pertinemment que nous ne sortirions pas de cette fosse au rancor. Néanmoins, mon génie allait nous sauver (on s’y fait vite d’être génial). Un petit message à Arc sortit de mon émetteur.

Madame Mystra avait du mal à avancer, épuisée et encore sous le choc des récents événements. Monsieur Marvic quant à lui montait à toute vitesse, blasters chargés pour éliminer quiconque s’interposerait entre lui et sa femme. Une brève analyse par mes processeurs estima à 23 les marches séparant les deux humains. Mon senseur vidéo se braqua avec ce qui semblait être de l’espoir sur la distance restant à parcourir, tandis que mon senseur audio captait lui le bruit familier et rassurant d’Arc qui venait en renforts.
La tourelle laser se déchaîna sur les stormtroopers dans la rue, qui durent se mettre à couvert. D’autres soldats commençaient à escalader le mur de la maison qui montait sur le toit, pour aller récupérer Pakir Venko. Arc eut vite fait de les en dissuader, et il me fallut bien reconnaître que le droïd de bord du vaisseau avait quelque chose dans les circuits. Les soldats furent décrochés du mur, mais mon attention se porta à nouveau sur Madame Mystra, qui rejoignait enfin Monsieur Marvic. Puis mon senseur capta un danger. Derrière eux, en haut des marches, une silhouette se dressait, un blaster à la main. L’arme se braqua. Madame Mystra venait d’arriver dans les bras protecteurs de son mari. Le coup partit, la détonation couverte par celles provenant de l’Arc de Cristal, qui riposta avec une rafale qui faucha Venko au niveau des jambes.

Arc se plaça habilement derrière moi, déployant la rampe d’accès. Nous étions tranquilles un moment, les puissants canons du vaisseau empêchant les impériaux de faire quoi que ce soit. Monsieur Marvic soutenait une Madame Mystra inconsciente, et se rua dans le vaisseau. Je le suivais de peu, après avoir abattu (avec mon habituelle efficacité) quelques stormtroopers qui avait enfin réussi à rejoindre Venko.
Quand j’entrai, je vis que Monsieur Marvic était occupé à protéger sa femme, et je me précipitai dans le cockpit pour prendre les commandes, sachant la confiance que vouait Monsieur Marvic à ses deux assistants droïds. En arrivant, Arc émit une trille paniquée, et je saisis que des chasseurs Tie était en approche, et que nous devions détaler au plus vite. Je répondis en langage binaire.
– Bon, c’est à nous de nous tirer de là. On quitte la planète, moi je vais m’occuper de la tourelle.
Monsieur Marvic et moi avions installé une tourelle à pilotage semi-automatique sur l’aile gauche de l’Arc de Cristal, et nous projetions d’en mettre une autre sur l’autre aile. Mais des limitations financières empêchaient de faire du vaisseau l’engin de rêve dont nous rêvions. Sa carlingue était usée, j’avais donc suggéré à Monsieur Marvic d’y appliquer une couche de peinture bleutée faisant honneur au nom du vaisseau. La peinture actuelle était certes bleue également, mais l’effet du temps et des voyages en hyperespace s’était fait sentir… Encore une belle idée qui devrait attendre…
Mais l’heure n’était pas aux lamentations. Des chasseurs Tie, avec leur cockpit rond et leur panneaux solaires carrés, fondaient sur nous à toute allure. J’empoignai le système de guidage des canons redirigé dans le poste de pilotage. Puis je branchai un des mes circuits à Arc, pour pouvoir bénéficier de tout le champ de vision de mon collègue et intégrer ses radars à mes données.
J’entrai dans le combat avec le brio qui était mien. La tourelle pulvérisa un premier Tie, qui alla s’écraser au sol avec une gerbe de flammes. Les Tie étaient des appareils qui voyaient leurs capacité réduites en atmosphère, ce qui n’était pas le cas de l’Arc de Cristal, et je comptais profiter de cet avantage. Je décochai une nouvelle rafale, et deux engins à la mobilité réduite furent touchés, l’un en plein cockpit et l’autre dans l’aile gauche.
Mes tirs suivants firent rebrousser chemin aux trois appareils restants, en attente de renforts. Ceci laissa le temps à Arc de prendre de l’avance, et peu après nous fûmes en sécurité, gagnant l’orbite de Derra IV. Ignorant ce que Monsieur Marvic comptait faire mais sachant que nous n’avions pas intérêt à traîner dans le coin, je calculai un cap hyperspatial pour une planète voisine, à seulement quelques parsecs et dans le même système. Quand l’Arc de Cristal bondit enfin en hyperespace, je quittai le poste de pilotage pour aller m’enquérir de la santé de mes maîtres.

Mes craintes trouvèrent confirmation quand je gagnai la zone habitable. L’Arc de Cristal avait deux ailes servant à stocker la marchandise, mais Monsieur Marvic avait commencé des travaux d’aménagement pour en faire des chambres confortables. Quant au tronc du vaisseau, il était le coin habitable de Monsieur Marvic.
Madame Mystra gisait sur la couchette de l’étroite cabine. Je sus tout de suite que Pakir Venko avait fait mouche lors de son dernier tir désespéré. Monsieur Marvic, quant à lui, était au chevet de sa femme, le visage plongé dans la chevelure de cette dernière. Son corps était agité de soubresauts, que j’eus vite fait d’assimiler à des sanglots.
Mes senseurs firent le bilan de la composition chimique de la pièce, et je constatai une évidente odeur de chair brûlée. Selon toute vraisemblance, le laser avait atteint la pauvre Madame Mystra dans le dos alors qu’elle avait rejoint son mari. Une analyse thermique me révéla que Monsieur Marvic était le seul être humain vivant à bord. Une impression bizarre envahit mes circuits, déjà fort maltraités ces derniers temps. J’avais beau être modifié dans tous les sens, j’étais à l’origine un droïd d’entretien, absolument pas conçu pour ce genre d’aventures…

Monsieur Marvic leva vers moi un visage couvert de larmes, un visage que je ne lui avais vu qu’une fois auparavant : le jour où Darth Vader avait abattu Medi Trabe sous ses yeux. Je lançais un bref regard à Madame Mystra. Allongée sur le dos, elle semblait paisible, et le fait que l’on ne voyait rien de sa blessure accentuait cette impression.
Madame Mystra… Cette brave humaine m’avait toujours respecté, et j’avais énormément appris à son service. Elle allait me manquer.
Mais qu’est-ce que je raconte moi ? Je suis un droïd, je ne vois pas pourquoi je débite des choses pareilles. Mais que voulez-vous, j’éprouvais (oui, je sais ce que ça veut dire) un sentiment de déception, de colère… de chagrin. Non, ne vous moquez pas de moi (je vous le déconseille fortement), je sais ce que je dis. Le visage ravagé de Monsieur Marvic et le regard qu’il me lança eurent pour effet de me faire crisper mes articulations hydrauliques.
– Elle est… murmura Monsieur Marvic.
– Je sais, fis-je. Je suis… désolé. Elle ne méritait pas ça.
A ma plus grande surprise, Monsieur Marvic ne fut nullement surpris de m’entendre parler de façon aussi personnelle. Après tout, il était celui qui m’avait trafiqué, et devait savoir qu’il avait fait du bon boulot.
– J’aurais dû la protéger, dis-je d’une voix qui me parut angoissée malgré sa sonorité mécanique. Malgré ce qu’elle disait.
Monsieur Marvic se redressa et mit une main sur mon dôme. Son autre main lui servit à essuyer ses larmes, et moi je m’empressai de sortir un mouchoir de ma structure. Monsieur Marvic le prit avec un sourire forcé.
– Tu n’y es pour rien, Edo. Je sais que tu as fait ce que tu as pu. Merci d’être là, avec moi. Je suis très fier de toi. Ca va ton bras ?
Une immense vague de fierté emplit ma mémoire vive (arrêtez de me regarder comme ça chaque fois que je parle de sensations !), tandis que Monsieur Marvic s’approchait à nouveau du corps de sa femme. J’avais parfaitement oublié la perte de mon bras, et puis de toute façon je savais que Monsieur Marvic ne me laisserait pas longtemps dans cet état lamentable.
– Pourquoi, Mystra ? chuchota-t-il. Je savais que Venko te harcelait, mais pourquoi ne m’as-tu pas demandé d’agir ? Pourquoi tu ne me l’as pas dit ?…
Puis soudain, Monsieur Marvic se releva et prit une expression dure qui, elle, lui ressemblait bien.
– Ca suffit, dit-il plus pour lui même que pour qui que ce soit d’autre. Assez de se reprocher les choses. Les coupables sont ailleurs.
Il s’approcha alors du tableau holo de la cabine, pressa un bouton caché derrière, et le cadre pivota pour révéler un arsenal que je qualifierais de jubilatoire. Monsieur Marvic se tourna vers moi.
– Edo, il est temps de procéder à certaines manipulations. Arc, même chose pour toi, j’ai quelques petites choses à bricoler.
J’entendis une trille sortir des haut-parleurs du vaisseau.
– Arc demande ce que vous avez en tête, et si vous comptez lui ajouter la seconde tourelle prévue…
– Lifting total pour vous deux, les enfants. Edo, tu vois cette armurerie ? Prends-y tout ce qui te fera plaisir, ou qui fera mal aux impériaux, à toi de choisir tes critères de sélection.
J’observai les armes accrochées au mur. De sacrés gadgets, que Monsieur Marvic avait volés lorsqu’il avait déserté l’Armée Impériale dans laquelle il avait été enrôlé de force.
– Nous allons chez Jey K.
Arc protesta par une trille plaintive. Je me chargeai de la traduction.
– En effet, je doute que les impériaux nous accueillent à bras ouverts sur Derra IV. Mais je serais ravi de voir Monsieur Jey K…
Ce cher Jey K ! Si les droïds devaient avoir un Dieu, ce devrait être lui ! Je lui devais les meilleures de mes améliorations, et encore je sentais que le meilleur restait à venir…
– Arc, fit Monsieur Marvic, tu sais où trouver Jey K alors vas-y, et ne discute. Edo… révise tes séquences ce combat.

Monsieur Marvic jeta un regard à sa femme inanimée, et la douleur put à nouveau se lire sur son visage.
– Je sais que tu m’aurais déconseillé de faire ça ma douce…
Puis il empoigna un de ses Blastechs.
– Mais l’Empire a des comptes à régler.