par Fuzzball » Mar 04 Aoû 2015 - 20:25 Sujet: Re: Secret Cinema Empire Strikes Back : un spectacle de mala
Je me suis rendue à Londres la semaine dernière pour percer le mystère de ce "Secret Cinema". C'est en lisant les témoignages qui précèdent que je me suis décidée à franchir le pas, et je tiens vraiment à vous remercier car j'ai vécu grâce à vous mon expérience de fan la plus exaltante. Huit jours après, je n'en suis pas encore remise ! Pour ne rien oublier de cette soirée d'anthologie, j'en ai écrit un récit assez détaillé que je souhaite vous faire partager... J'espère que la longueur ne découragera pas certains. Allez, c'est parti !
Je découvre l'existence de Secret Cinema courant mai, en flânant au hasard sur la toile, et aussitôt, le désir de vivre cette expérience de cinéma immersif sur le thème de L'Empire contre-attaque – mon film préféré parmi la trilogie - dans un lieu délibérément gardé secret, me saisit. Le fait que très peu d'informations sur l'événement circulent, pour garder le mystère intact, ainsi que deux témoignages lus sur des sites de fans de Star Wars ne font qu'exacerber ma curiosité.
Je décide donc de tenter cette aventure inédite, et en deux clics, réserve ma place pour le 28 juillet. Le show tiendra aussi du jeu de rôles, puisque, quelques heures après mon inscription, je reçois un test de personnalité devant déterminer à quelle catégorie de « Rebelles » je ferai partie pour lutter contre l'Empire : entre autres mercenaries, creative councils, governors of Alliance ou Alliance starfighters, mon goût de l'inconnu me range parmi les galactic explorers – et je reçois un passeport m'identifiant comme tel. Je devrai en outre arborer comme signe distinctif une écharpe de couleur sable et noir, ainsi qu'un badge orné du logo correspondant à mon ordre. Pour le reste de la tenue, j'ai carte blanche et peux donner libre cours à notre imagination... Mais comme je m'y prends trop tard pour me confectionner un costume ou me procurer un cosplay, je me contenterai de porter une tunique blanche rehaussée d'un gilet noir, rappelant la tenue de Han Solo, en me promettant de faire mieux à la prochaine occasion ! Ce n'est que quelques jours avant l'événement que le meeting point soigneusement dissimulé, m'est dévoilé.
Le mardi 28 juillet aux aurores, je mets donc le cap sur Londres, pour la deuxième fois en l'espace de six semaines : je m'y suis rendue tout spécialement pour voir l'exposition consacrée à Star Wars chez Mme Tussauds en juin. À peine installée dans le train, je suis déjà dans l'ambiance puisque la revue distribuée par Eurostar consacre précisément sa une à Secret Cinema, avec un Stormtrooper habillé en garde royal !
En début d'après-midi, après quelques circonvolutions dans le dédale de l'East End londonien, je débusque au 16 Cheshire Street le magasin Rebel-X Store, où je dois faire l'acquisition de mon écharpe et mon badge d'explorateur. Une minuscule échoppe, dans une rue perdue, qui se distingue seulement par son enseigne rédigée en alphabet impérial. Il faut d'abord frapper à la porte, et quand celle-ci s'entrouvre, laissant apparaître une jeune femme vêtue comme un pilote de l'Alliance, répondre à la question « Are you a Rebel ? » posée sur un ton péremptoire. Je montre patte blanche en présentant mon passeport galactique, et on me laisse entrer. Je ne reste que quelques minutes dans cette boutique mystérieuse, mais l'ambiance est déjà donnée ! On me gratifie d'un « May the force be with you » avant que je ne reparte, ainsi qu'un « Be safe » quand la porte se referme sur moi. Tout cela n'a fait qu'accroître un peu plus mon impatience...
Vers 17h45 enfin, je rallie le lieu de rendrez-vous, où je ne tarde pas à repérer d'autres Rebelles ; la plupart, vêtus simplement, seulement reconnaissables à leur écharpe, comme moi ; certains en répliques de Luke Skywalker avec combinaison orange et casques de pilote, repérables de très loin ! D'autres encore portent des robes de Jedi et quelques femmes arborent la coiffure à macarons de la princesse Leia. Nous sommes dirigés en direction de ce que je présume être d'anciens entrepôts désaffectés, puis introduits dans une sorte de tunnel sombre, avant de traverser un dédale de couloirs et de salles donnant l'illusion que nous nous trouvons dans une station d'embarquement : des caisses empilées, des panneaux rédigés en alphabet impérial... Nous sommes accueillis par un commandant rebelle, qui nous rappelle notre mission – lutter contre l'Empire - nous fait répéter une sorte de formule de reconnaissance : « Rebel X – With you », nous fait nous abaisser comme en cas de danger imminent, et nous demande de nous protéger le visage avec nos écharpes. Ainsi mis en condition, l'expérience son et lumière peut véritablement démarrer, alors que nous pénétrons dans un immense hangar où nous essuyons volutes de fumée, tirs de lasers, flashs de lumière, crépitements et autres stridulations ; alignés le long d'un mur ou rangés en colonne, on nous donne des instructions, on nous soumet à quelques tests de réactivité, comme si nous devions partir en opération commando. Puis, ces préliminaires achevés, deux rideaux de fers se soulèvent et nous entrons dans une salle de cinéma avec écran panoramique, qui figure le vaisseau dans lequel nous quitterons la Terre... L'illusion est parfaite : les sièges sont équipés de ceintures de sécurité, et leur dossier comporte un filet avec gilet de sauvetage en cas d'incident aérien, comme dans les « vrais » avions ! Sur l'écran, nous assistons donc au décollage de notre spaceship : nous nous élevons au-dessus de Londres, gagnons les étoiles, et effectuons le fameux saut dans l'hyperespace... Nous croisons alors le Millennium Falcon aux prises avec quelques Tie-Fighters particulièrement teigneux, tandis qu'à gauche de l'écran, nous pouvons suivre notre progression sur une carte stellaire : notre destination est Tatooine, et plus particulièrement l'astroport de Mos Eisley !
Après avoir passé le contrôle douanier en présentant notre passeport, nous voilà conduits dans une immense salle baignée d'une lumière chaude, reproduisant à la perfection l'atmosphère de la planète désertique : du sable sur le sol, des petites maisons à dômes, des stands rappelant des souks et servant aux Rebelles désireux de se sustenter une cuisine méditerranéenne qui embaume les lieux. Nous sommes libres de circuler sur cette Tatooine miniature, où nous croisons, comme le plus naturellement du monde, un Luke Skywalker qui déambule à la recherche de son droïde ; un R2-D2 plus bip-bipant que jamais ; un excellent C-3PO à l'accent et aux manières de majordome britannique, qui s'incline cérémonieusement devant moi après que je l'aie familièrement salué, et me gratifie d'un « Good Evening Madam ! ». Mais aussi un minuscule Jawa dont on ne voit briller que les yeux verts sous sa capuche brune, l'immense Chewbacca, un impressionnant Boba Fett, cuirassé et toutes armes dehors. Dans le même temps, des Stormtroopers patrouillent et nous gardent en respect, leurs blasters pointés sur nous ; ils procèdent même à quelques arrestations arbitraires ! Et c'est là toute la magie et la force de ce show immersif : impossible de ne pas éprouver une petite appréhension quand on voit s'approcher les troupes de choc impériales au pas de charge ou de ne pas s'écarter quand notre route croise par hasard celle du menaçant chasseur de primes ! Nous pouvons également nous rendre dans la maison de Ben Kenobi pour apprendre à maîtriser la Force, ou pousser la porte de la demeure d'Owen et Beru, qui nous accueillent à leur table. Je me hasarde pour ma part dans une maison de jeu tenue par un Lando Calrissian plus vrai que nature, dont la ressemblance avec Billy Dee Williams est telle qu'elle en est troublante ! En compagnie d'une demi-douzaine de Rebelles, nous engageons avec lui une partie de cartes (de sabacc, peut-être ?), que je perds d'ailleurs. Mais, lot de consolation, je repars avec quelques compliments galants de la même teneur que ceux que le « vrai » Lando adresse à Leia quand elle arrive à Bespin ; et je m'amuse de ce que la ressemblance frappante avec l'administrateur de la Cité des Nuages ne s'arrête pas seulement à son physique ! La Cantina de Mos Eisley est elle aussi reproduite à la perfection, avec ses petites alcôves et ses tables sombres éclairées d'une bougie blanche. Il y a même un porte-blasters installé à l'entrée. Des rafraîchissements sont servis au bar, et un musicien, sur une petite scène au fond, assure l'ambiance musicale. Il ne manque que quelques aliens aux trognes malgracieuses pour compléter le tableau... mais aussi ce qui aurait constitué le clou du spectacle : Han Solo dégainant (le premier, naturellement !) contre le mercenaire à la solde de Jabba-the-Hutt, Greedo.
Au bout d'une heure de déambulation dans Mos Eisley, il est temps d'embarquer pour Alderaan. Il faut gravir pour un escalier métallique et grimper dans un vaisseau – en fait, une autre petite salle de cinéma, où les « passagers » prennent place en vis-à-vis de part et d'autre d'une allée. Deux pilotes face à un écran assurent le décollage, accompagné de quelques vibrations bien senties, et cap sur la planète de Leia Organa... Mais à l'instar du Millennium Falcon, notre vaisseau est pris par un rayon tracteur... et irrémédiablement aspiré par l’Étoile de la Mort. Des Stormtroopers arrivent alors dans le vaisseau et nous le font évacuer. Nous débouchons dans un immense hangar obscur, parcouru de couloirs et d'escaliers métalliques, et devons marcher en file indienne, au trot, la main droite sur l'épaule droite du Rebelle qui nous précède ; j'ai le malheur de mettre ma main sur une épaule gauche et me fait rappeler à l'ordre par un Stormtrooper avec la délicatesse que l'on imagine... Le petit groupe dont je fais partie est enfermé quelques minutes durant dans une prison, où l'on nous apprend que nous sommes bien captifs de l’Étoile de la Mort... Pau après , c'est la Princesse Leia que nous y verrons retenue. Nous ne tardons pas à croiser Lord Vader, sinistre apparition, qui s'y déplace en maître des lieux. Au moment où il passe auprès de moi et que je perçois sa respiration sifflante – aucun détail n'est décidément négligé ! - je fais inévitablement un bond sur le côté pour l'éviter ! Puis en attendant, je présume, que tous les Rebelles aient fait le voyage entre Tatooine et la Death Star et que nous soyons tous réunis dans cette dernière, nous sommes introduits auprès d'un mécanicien de l'Empire qui nous offre un véritable morceau de bravoure en nous présentant différents types de droïdes. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises car dans les tréfonds de cette Étoile de la Mort, un dancefloor a été aménagé, où un DJ mixe les musiques de John Williams revisitées façon électro...
Après quoi, l'apogée du spectacle va véritablement débuter : la recréation des scènes les plus connues d'Un nouvel espoir par les répliques en chair et en os des personnages. Nous revivons ainsi en direct la destruction d'Alderaan par le Grand Moff Tarkin et Darth Vader, après avoir essuyé la résistance opiniâtre et insolente de la princesse Leia, en tunique immaculée et coiffure à macarons ; la désactivation du rayon tracteur par Ben Kenobi ; la course-poursuite effrénée de Han Solo et de son inséparable Chewie, assaillis par les troupes de choc impériales, tirs de pistolasers fusant de toute part en prime ; le duel au sabre-laser entre Ben Kenobi et son ancien disciple Vader, qui s'achève sur la mort du Jedi vétéran ; le décollage express du Falcon Millennium – dont on ne voit que l'arrière ; l'arrivée de Luke Skywalker en X-Wings et son accueil triomphal à la descente de son vaisseau, après la destruction de l’Étoile de la Mort. À ce moment-là, parmi l'assistance, l'ambiance confine aussi au délire ! Tous les Rebelles se rangent ensuite sur les côtés de manière à créer une haie d'honneur : les héros passent parmi nous et sont célébrés dans la liesse. Nous assistons en spectateurs privilégiés à la cérémonie qui suit la bataille de Yavin, et à la remise des médailles à Luke et Han par Leia. Avant que la première partie de la soirée ne s'achève, nous pouvons aller les congratuler. Et je dois avouer que ce n'est pas sans émotion que je serre la main de Han Solo en le gratifiant d'un « Nice to meet you »... Costume et coiffure exceptés, il faut chercher loin la ressemblance de l'acteur britannique avec Harrison Ford ; mais l'intensité du show immersif a été telle que je finis par croire que je me trouve réellement devant mon personnage fétiche !
Sans transition, nous sommes ensuite conduits dans une grande salle de projection où nous visionnons, dans sa version originale, L'Empire contre-attaque. C'est la première fois que j'ai l'occasion de voir un des films de la trilogie originelle sur grand écran, et l'expérience est autrement différente que sur un lecteur DVD ! D'autant que certaines scènes sont jouées dans la salle en même temps qu'elles sont projetées sur l'écran : Leia donnant ses instructions aux pilotes avant la bataille de Hoth ; Lord Vader réunissant ses troupes ; le baiser échangé entre Han et Leia dans le Millennium Falcon – grande explosion d'enthousiasme dans la salle à ce moment-là ! ; et bien sûr, le duel final au sabre-laser entre Luke et Darth Vader sur la passerelle de la Cité des Nuages.
Le film terminé, nous nous acheminons vers la sortie en retraversant l’Étoile de la Mort puis Tatooine ; pour ceux qui le désirent, la soirée peut se prolonger à la Cantina, où des musiciens ont investi la scène et s'apprête à démarrer un concert. Pour ma part, j'ai eu mon lot d'émotions fortes pour quelque temps : je préfère rentrer tranquillement et revivre en esprit tout ce que j'ai vécu durant les quelque cinq heures qu'a duré cette soirée d'anthologie. C'est la première fois que je vis une expérience de spectacle vivant aussi forte, et pourtant, je fréquente assidûment les théâtres parisiens ! Je ne suis pas prête de l'oublier – une semaine après, la magie opère encore - et dans les rêves que je fais cette nuit-là, dans mon hôtel londonien, je voyage encore quelque part entre Mos Eisley, Alderaan et l’Étoile de la Mort...
Ouf ! Deux mots encore : si cela vous est possible, n'hésitez pas, courez-y avant la fin septembre !
"The fault is not in ours stars, but in ourselves." W. Shakespeare