Allégeance, de Timothy Zahn
Cinq stormtroopers, écœurés par les ordres et la vision de ce que devient l'Empire, désertent et décident de former la Main du Jugement, un groupe indépendant mais fidèle à ce que l'Empire devrait être selon eux, et prêts à tout pour protéger les civils des abus de pouvoirs et de la corruption. Dans leur fuite, ils vont se retrouver face à Han Solo et Luke Skywalker, et devront surtout faire profil bas pour éviter l’œil soupçonneux de Mara Jade, la Main de l'Empereur, qui enquête sur une coalition de pirates rassemblés dans le but de permettre à un secteur de l'Empire de proclamer son indépendance...
Il y a du bon et du moins bon dans ce roman, mais disons-le d'emblée, l'ensemble est décevant.
L'intrigue générale n'est pas spécialement ambitieuse. Leia est envoyée négocier avec des chefs rebelles locaux, et la situation va évidemment dégénérer, obligeant la Princesse à se débrouiller et à montrer qu'elle n'est pas juste une potiche. Tout ceci se déroule dans un obscur système, sous fond d'attaques pirates, et ne laissera aucune conséquence galactique durable. Si ce dernier point ne me pose finalement guère de problème (après tout, on se doute que la Rébellion n'a pas les moyens de s'opposer frontalement à l'Empire), c'est bien dans l'exécution que le tout pêche.
A commencer par les cinq stormtroopers, Larone et les autres. En ce qui les concerne, le début du roman est intriguant, on se captive pour les pensées de ces cinq hommes luttant contre leur endoctrinement pour défendre leurs valeurs. L'auteur choisit d'ailleurs l'originalité en ne les faisant pas intégrer la Rébellion, choisissant plutôt une troisième voie : défendre les valeurs d'un Empire « idéalisé », là ou leur présence serait nécessaire. Tout ça démarre donc très bien, et puis... et puis, ça stagne, les personnages n'évoluant pas dans les 200 pages suivantes. La fin est, à ce titre, édifiante, il y avait moyen de donner de véritables conséquences à leurs décisions, un personnage proposant même une issue au groupe... Là, c'est loupé, et si on imagine très bien les revoir dans la suite,
Choix décisifs, leur introduction semblera a priori forcée. Peut-être pas, au final, mais tel quel, c'est vraiment décevant d'avoir des personnages si intéressants au début, au destin totalement vierge et donc imprévisible, et de ne pas en faire plus avec eux.
D'autant plus que dès leur interaction avec les personnages de la trilogie, ils passent au second plan. Han Solo est fidèle à lui-même, le plus intéressant du lot, à une époque où son allégeance lui est encore incertaine, où ses sentiments envers Leia sont ambivalents. Luke est bien ce fermier un peu naïf rencontré dans l
'Episode IV, et il apprend dans le roman à maîtriser la Force... et si un conseil venu de l'au-delà de Ben Kenobi paraissait inévitable, là c'est clairement mal exécuté. Kenobi ne se contente pas de guider Luke, il le prend par la main, lui donne gentiment les codes d'accès aux portes qui le retiennent prisonniers ; trop c'est trop !
Lors de la bataille de l’Étoile Noire, il a dit à Luke «
Fais appel à la Force », il ne lui a pas dit «
vire à gauche maintenant, fais un tonneau, éteins ton ordinateur de visée, je te dis le bon moment pour faire feu »...
Allégeance est également l'occasion de découvrir une toute jeune Mara Jade, fraîchement nommée Main de l'Empereur. Mais une nouvelle fois, le personnage n'est pas exploitée à sa juste valeur. Mara est la Main de l'Empereur, donc ni plus ni moins que son enquêtrice et son assassin personnel. A ce titre, et même si elle n'est sans doute pas aussi « mauvaise » que Vador ou Sidious, c'est un personnage malfaisant, à défaut d'être fondamentalement malveillant. Ici, Mara est une gentille fille qui fait son devoir, dure, mais juste, fidèle aux idéaux de l'Empire et furieuse lorsqu'elle constate une trahison. Alors, on peut imaginer que son Maître ne lui est pas dévoilé tout ce qu'il est en réalité... mais à les côtoyer lui et Vador, j'imaginai un personnage plus « mauvais ». Là, on sent que Mara est amenée à devenir une gentille, et qu'il s'agit donc de ne pas trop noircir son CV. Dommage, cela réduit en partie la valeur de sa rédemption à venir... Notons au passage l'excellent Vador de Timothy Zahn.
Allégeance n'est donc pas un mauvais roman, mais certainement pas un bon non plus, rempli de bonnes idées, mais la plupart étant mal exploitées. Le style est lourd, l'intrigue anecdotique n'étant guère compensée par des personnages au développement quasi-inexistant. J'aurai préféré que les stormtroopers déserteurs soient les véritables vedettes du roman, avec Mara, avec aucune mention des Rebelles des films... Espérons que
Choix Décisifs fera mieux !
Note : 65 %