Tout d'abord, je tiens à dire que le retour est apprécié d'autant plus que Jaden semble toujours te plaire.
Sans plus attendre, je vous livre le 23e chapitre qui vient clore l'arc sur Nar Shaddaa. J'espère que vous aurez apprécié ce passage sur la Lune des Contrebandiers et que les événements suivant vous plairont toujours autant. Bonne lecture !
Chapitre 23 : Quatre caisses et une oreillette
9BBY
Nar Shaddaa, Système Y’ToubLa porte métallique noire du cargo corellien YT-2400 était enfin ouverte. Il avait fallu quelques dizaines de minutes pour que le technicien réussisse enfin à déverrouiller l’accès au vaisseau dont Torga avait livré l’équipage à l’Empire. Arborant une combinaison de vol renforcée vermeille, Praossk, mâle trandoshan d’un âge moyen, ne parvenait toujours pas à comprendre pour quelle raison ils ne pouvaient pas utiliser l’un de leurs appareils. En effet, ces contrebandiers avaient décidé de sortir la marchandise de leur cargo et de la cacher dans une autre baie de débarquement. En conséquence, il avait été nécessaire de déplacer toutes les caisses. Elles n’étaient pas nombreuses mais, quitte à devoir charger un vaisseau, il y aurait eu un gain de temps conséquent à en utiliser un dont il connaissait les codes d’accès.
Eh bien non ! Le boss dit qu’il est trop risqué d’utiliser un de ses vaisseaux, qu’il ne peut pas être pris dans une transaction avec l’Empire et qu’il faut utiliser ce cargo. Qu’est-ce que je peux répondre d’autre que « Oui boss. » moi ?Il fit signe aux deux Weequays au visage grisâtre striés de rides de commencer à déplacer les premières caisses en acier. Ceux-ci se plaignirent un peu, mais la vue des dents tranchantes de l’être à la silhouette de lézard les convainquit rapidement de s’exécuter. Le Rodien en combinaison violette, qui venait d’ouvrir le sas du transporteur léger corellien, s’écarta de leur passage pour les laisser déplacer le premier des trois petits containers à l’intérieur. Le Trandoshan était un peu déçu. Il avait espéré pouvoir jeter un œil aux cristaux avant de devoir les rendre à la flotte impériale stationnée sur Jedha, mais les ordres de Torga le Hutt avaient été très clairs. Ils devaient rendre les caisses intactes et non ouvertes à leurs partenaires commerciaux temporaires.
On a l’impression qu’il s’écrase sur le sol comme une vulgaire limace en face de ces pauvres types en armure blanche. L’Empire Galactique n’a aucune emprise sur la Lune des Contrebandiers. Tout le monde le sait. On aurait dû abattre ces gars en conserve à leur arrivée pour leur montrer qui fait la loi ici.Passablement remonté contre le comportement de son supérieur, qui lui semblait relativement lâche, Praossk émit un claquement de langue peu discret. Le technicien rodien fit un bond et se retourna vers lui une expression paniquée sur le visage. Le lézard à la peau couverte d’écaille vert-jaune sourit de toutes ses dents aiguisées. Lui, au moins, inspirerait toujours le respect et la crainte chez ses subalternes. Peut-être même obtiendrait-il le contrôle de l’une des organisations criminelles de cette lune s’il jouait ses cartes correctement. Après tout, c’était à lui que cette mission importante avait été confiée. Bien qu’il n’approuvât pas le comportement du dirigeant de son organisation, c’était lui qu’il avait chargé de protéger et amener cette cargaison d’importance. Le Hutt n’aurait pas confié ce travail à n’importe quel laquais. Il savait qu’il s’agissait d’une étape importante pour sa route vers la grandeur. En un instant, ses pensées vagabondèrent en direction d’un futur plus si impossible.
Il se trouvait sur un magnifique trône recouvert de dents de rancors et de dragons krayt. Il portait un pagne fait d’une magnifique peau de Nexu attachée par une ceinture tressée avec des poils de scalps wookie. Un rictus se découvrit sur son visage à la pensée de ce gibier des forêts de Kashyyyk. Cette vision était magnifique et elle le devint encore plus lorsqu’une troupe de femelles trandoshans et barabels vinrent se joindre à la fête. Leurs écailles brillantes, leur peau rugueuse, leurs courbes tout en muscles et leurs immenses dents pointues prête à déchiqueter la chair la plus résistante, tout cela le séduisait grandement, il devait l’avouer. Il sentait qu’il ne manquait qu’une seule chose pour que ce tableau ne devienne parfait. Cette chose c’était…
— Sisswip, chef !
Exactem… Quoi ?!La voix de l’un de ses deux subordonnés weequays le ramena à la réalité et il le vit. Il faillit s’étrangler de surprise et de rage. Sur la plateforme, venait d’apparaître un petit Chadra-Fan à la fourrure grise. Il le voyait s’avancer vers lui, vêtu de son habituelle combinaison rouge sombre sur laquelle il avait enfilé un simple veston beige dépourvu de manches. Une caisse semblable à celle qui venait d’avoir été chargée dans l’YT-2400 se déplaçait en flottant à ses côtés. La petite créature, qui comptait parmi les lieutenants de confiance de Torga, marchait d’un pas sûr.
Ce n’est pas possible ! Pas maintenant ! Et pas lui ! C’est mon moment sale petite bête poilue. Ne t’avise pas de venir te mettre en travers de mon chemin.Il put sentir et entendre ses dents crisser. Ses trois subalternes se reculèrent légèrement et ils avaient raison, car Praossk fulminait. Il avait besoin d’arracher une tête ou de mordre à pleine dents dans une jugulaire. Il lui fallait se contrôler ou son rêve de grandeur s’évanouirait. Il prit une profonde inspiration, puis expira calmement. Sa mâchoire était tellement contractée qu’il ne parvint même pas à l’entrouvrir. Il recommença son exercice de relaxation. Cela lui avait fallu un énorme effort et une grosse somme d’argent pour que cette frêle et rachitique Zeltrone ne la lui apprenne, mais il avait persévéré et réussi à maîtriser la technique. Il força une expression amicale et attendit que le nouveau venu de petite taille n’arrive vers lui. La caisse métallique s’arrêta et une unité R2 verte et blanche vint se ranger légèrement en arrière du Chadra-Fan qui semblait plus détendu que jamais. Rares étaient les personnes à ne pas trembler de frayeur face à un Trandoshan de sa stature, mais cet individu-là n’était pas prêt à se laisser intimider.
— Sisssssssswip ! Qu’est-ce que tu nous amènes encore ? demanda l’être reptilien dans un sifflement.
Le non-humain à tête de rongeur jeta un rapide coup d’œil au coffre que le droïde avait poussé, puis haussa un sourcil en regardant son interlocuteur.
— Je t’amène la caisse que toi et tes imbéciles de larbins avez oubliée sur la baie quarante-deux.
Impossible.— Il n’y avait que trois caisssssssses là-bas. Moi et mes gars, on a vérifié deux fois. Il n’y avait que ces deux containers, plusssssss celle qu’on a déjà emmené à bord, rétorqua Praossk d’un ton peu aimable.
Aucunement impressionné, Sisswip passa au ras du Trandoshan sans même lui jeter un regard.
— Eh bien, tu aurais dû vérifier une troisième fois. Il faut toujours vérifier une troisième fois.
L’être reptilien serra les poings et ses griffes vinrent érafler la paume de ses mains. Le Chadra-Fan l’exaspérait au plus haut point. Pourtant, il aurait beau essayer de lui faire perdre son sang-froid en se moquant de lui, il ne réagirait pas de la façon qu’il attendait. Il respira calmement et relâcha la tension dans ses doigts.
— Je ssssssssuis certain qu’il n’y avait pas quatre caissssssses. On l’aurait remarqué. Alors, reprend là et fais-en ce que tu veux, mais elle n’ira pas sur mon vaissssssseau !
Le petit lieutenant de Torga se retourna lentement, comme s’il voulait donner un effet spécifique à son geste.
— Ton vaisseau ? dit-il calmement un sourire au coin des lèvres.
Il ne fallut pas longtemps à Praossk pour comprendre.
Sale petit rat !Dévoilant ses crocs et ses griffes, le Trandoshan s’approcha d’un air menaçant.
— Torga m’a confié cette missssssion à moi ! cracha-t-il.
La petite créature aux incisives prononcées ne bougea pas.
— Et l’Empire m’a expressément demandé de traiter avec eux, répondit-il simplement.
— Parce que tu obéis à la vermine impériale maintenant ? se moqua Praossk.
Le Chadra-Fan se déplaça à quelques centimètres de l’autre lieutenant de Torga et posa ses petites mains poilues sur ses hanches. La scène de ce petit être mesurant tout juste la moitié de la taille de son vis-à-vis aurait pu être comique en d’autres circonstances. Toutefois, l’assurance de Sisswip lui valait un certain respect de la part du Trandoshan.
Soit il se sait intouchable, soit il est complètement idiot.— Écoute mon grand, il y a deux bonnes raisons pour que tu me laisses le commandement de cette mission, expliqua la petite créature grise.
Praossk croisa les bras et grogna prêt à écouter. Sisswip, lui, leva son index.
— Premièrement, tu n’as pas envie de dire à Torga que tu as failli rendre une cargaison incomplète à l’Empire, suite à un marché qu’il a lui-même conclu.
Le Trandoshan secoua la tête en sifflant.
— Je ne ssssssais pas où tu as trouvé ce container, mais je suis ssssssûr qu’il ne vient pas de la baie quarante-deux.
— Tu es prêt à l’expliquer à l’Empire et à Torga ?
Non, il ne l’était pas. Il n’était même plus sûr d’avoir raison, mais il ne pouvait pas avouer une erreur à Sisswip maintenant. Le rongeur était doué. Il ricana.
— Charge-la à bord, mais tu prendras la moindre responssssssabilité en cas de problème.
Le Chadra-Fan croisa les bras.
— Cela va de soi, puisque je suis le responsable de cette mission.
Pas si vite.— Je n’ai pas dit cela.
L’autre soupira et la fourrure grisâtre de son visage ondula légèrement. Il leva un deuxième doigt.
— Ce qui m’amène à la deuxième raison. Sais-tu où et à qui nous devons livrer la cargaison ?
Réponse facile.— À l’Empire, sur la lune de Jedha, répondit sûr de lui le Trandoshan au teint verdâtre.
— Faux !
— Ne te moque pas de moi minuscule civet sur pattes. Tu pourrais finir par le regretter, menaça le lézard.
Sisswip leva les mains en reculant lentement.
— Loin de moi cette idée mon cher Praossk. Il est évident que nous allons rendre ces cristaux aux Impériaux dans le système de NaJedha. Toutefois, nous devons les donner à un certain capitaine sur un certain vaisseau.
Il se payait sa tête. C’était évident. Il n’avait pas entendu parler de tels ordres.
Peut-être dit-il la vérité et que Torga et l’Empire l’ont bien mis à la tête de la mission. Non ! C’est mon heure de gloire.— Tu esssssssaies de m’entourlouper Sissssswip.
Comme pour donner plus de poids à ses paroles, il avança encore un peu plus près du Chadra-Fan qui sentit sa mauvaise humeur et se maintint hors de portée. Cela l’amena proche du sas du cargo des contrebandiers.
— Peut-être, mais si je dis la vérité et que mon droïde ici présent possède bien ces informations vitales à la survie des occupants de ce vaisseau, je t’aurai évité une mort explosive, expliqua Sisswip sur un ton tellement calme que Praossk était presque convaincu qu’il disait la vérité.
Il grogna et fit claquer sa langue.
— Euh chef… On devrait peut-être faire comme dit Sisswip, suggéra un des Weequays.
Le Trandoshan tourna ses yeux ardents vers son subalterne qui recula et vint heurter ses deux camarades moins impétueux situés derrière lui.
— Euh… Je veux dire que ce serait dommage de finir vaporisés si on peut l’éviter.
Praossk gronda agressivement, puis cogna dans le container que l’unité R2 avait transporté. Il y eut un fort bruit et le droïde sembla
émettre une série de sons ressemblant à un rire. Il l’ignora.
Cela aurait dû être sa grande mission !— Montez les trois dernières caisssssssses à bord. Sissssssswip et son droïde sont les bienvenus dans mon vaisseau, trancha-t-il furieux.
— Techniquement, c’est mon vaisseau, rétorqua le Chadra-Fan.
Le lézard siffla et pénétra dans le cargo. Il inspira et expira. Il devait se calmer et respirer. Respirer c’était la clé.
Lorsque Praossk eut intégralement disparu à l’intérieur du
Rebelle Rouge, Sisswip s’autorisa un sourire un peu plus large. Son plan avait marché. Il n’en était pas particulièrement surpris, mais ce genre de confrontation comportait toujours un léger risque, surtout face à un Trandoshan. À son tour, il entra dans le vaisseau précédé de la caisse qu’il avait amenée. Ses petites bottes résonnèrent faiblement sur le sol lisse fait d’un métal sombre. Il y avait une odeur de neuf, mais elle se mêlait étrangement à des senteurs de brûlé. Certaines des lumières à l’intérieur de l’YT-2400 ne fonctionnaient plus et témoignaient de l’évasion houleuse qu’avait dû vivre son équipage précédemment. Pourtant, les parois argentées présentaient un vaisseau relativement bien entretenu.
— Saleté de… J’ai l’impression d’être dans une caisse de résonance ! C’est Zoomer qui a tapé dedans, hein ? C’est cet imbécile de nabot ?!La voix de Jaden retentit dans son oreillette pour la première fois depuis qu’il avait verrouillé la caisse. Il n’avait pas été facile de convaincre l’Alderaanien de se laisser enfermer à l’intérieur. La capture de Liana l’avait rendu encore plus borné que d’habitude. Il lui avait fallu user de toute sa persuasion pour qu’il accepte son plan et évite d’envahir la plateforme en abattant l’intégralité des mercenaires. Il n’y avait plus qu’à espérer que ce petit séjour en boîte atténuerait sa sombre humeur. Pour le moment, il ne pouvait pas se permettre de lui répondre
— C’est ça, ignore-moi petite boule de poil. Je te rappelle que si la caisse est assez bien isolée pour que les autres ne m’entendent pas, toi tu es bloqué avec ma voix dans ta tête et que je suis conscient de tout ce qui se passe à côté de toi.Malheureusement pour lui, le contrebandier avait raison. Il soupira.
— J’ai aussi entendu ça.Le Chadra-Fan savait que donner un système de communication à Jaden n’avait pas été une très bonne idée. Sur le moment, il n’avait pas réalisé pourquoi, mais il commençait à s’en rappeler la raison. Il tourna à droite. Les trois subalternes de Praossk avaient placé les containers dans la soute avec Zoomer et étaient maintenant assis dans la zone de repos. Il continua jusqu’au bout du court couloir et entra dans le cockpit situé sur sa gauche. Le Trandoshan était déjà assis sur le siège de pilotage et effectuait les vérifications d’usage avant le décollage.
— Il me semble que ce n’est pas ton vaisseau. Tu as l’intention de piloter ? demanda Sisswip à l’être couvert d’écailles.
— Quoi ?— Ce n’est pas encore ton vaisssssseau. De toute manière c’est une quesssssstion pratique. Tu es trop petit pour atteindre les commandes.
Effectivement, il n’a pas tort. Je déteste piloter de toute manière.Il s’assit dans le siège de cuir noir attribué au copilote.
— Sisswip, ne le laisse pas piloter mon vaisseau ! Je savais que ton plan était mauvais.Le Trandoshan se trémoussa dans son fauteuil. Il n’était visiblement pas très à l’aise.
— Ces ssssssièges sont vraiment trop rembourrés. Un vrai guerrier ne devrait pas avoir besoin de tant de confort. Cela rend faible, critiqua-t-il.
— C’est des sièges en cuir espèce de sac à main griffu ! Je te jure que si ce type me les abime, je sors de ma caisse et je viens le balancer moi-même par le sas ! On va voir si ça rend faible.— Je devrais peut-être enlever cette peau d’animal traitée et ne laisssssssser que la structure métallique.
— Sisswip ! Je vais déjà devoir dépenser l’essentiel de mes gains pour réparer et repeindre la coque, l’éclairage et les départs de feu. À la moindre éraflure dans mon cockpit, je te tiendrai pour personnellement responsable !Le Chadra-Fan garda une expression totalement neutre et procéda à quelques contrôles de son côté. Apparemment, le natif d’Alderaan avait tourné sa colère contre un autre sujet. Il entendit un léger crissement et vit Praossk qui semblait pester contre les commandes.
— C’était quoi ce bruit ?Il vit une légère égratignure sur le tableau de bord. Ce cargo n’était définitivement pas fait pour être dirigé par un Trandoshan aux mains griffues, mais le pilote lança tout de même la procédure de décollage. Il érafla une nouvelle fois quelques voyants et un bruit désagréable retentit un peu plus distinctement.
— Ok, cette fois j’ai compris. Dis à Zoomer de m’ouvrir immédiatement ! Je vais en faire une paire de bottes ! On gagnera du temps pour sauver Liana.Le vaisseau s’éleva dans les airs et Sisswip se gratta discrètement la zone de son crâne où se trouvait son oreillette le mettant en contact avec Jaden.
— Sisswip, ramène- toi immédiatement et…Il coupa la transmission et s’affala un peu plus sur son fauteuil. Il était très confortable, il fallait se l’avouer. Le ciel orangé de Nar Shaddaa vira lentement au pourpre, puis devint totalement noir. De nombreux vaisseaux de toutes tailles les entouraient. Des étoiles apparurent venant ponctuer ce fond d’encre de multiples lueurs blanches. Praossk manipula quelques boutons et se saisit d’un levier.
— Prochain arrêt : Système de NaJedha. Tu as intérêt à ne pas t’être moqué de moi Sissssssswip, prévint-il avant d’abaisser la commande.
Les étoiles s’étirèrent et le Chadra-Fan sentit la brusque accélération qui annonçait l’entrée en hyperespace.