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Critiques positives
 
Mad Movies (07/1983)
Bertrand Collette
Le Retour du Jedi résout toutes les énigmes des volets précédents et marque indiscutablement l'avènement de héros mythiques.
La quête est terminée, les coups de théâtre successifs ont été résolus, les sentiments révélés : la fresque spatiale de George Lucas se termine en grande pompe, dans la plus pure tradition hollywoodienne. Gageons que la saga des "Aventures de Skywalker" fera désormais date dans les annales du cinéma fantastique, et même du cinéma tout court !

Le Monde (20/10/83)
Richard Marquand délaisse l'enfer lisse des ordinateurs, l'enfermement spatial, les météorites en déroute, l'angoisse du vide pour le royaume de Dame Tartine, pour un Halloween fastueux, jeu de piste rocambolesque et blagueur.

L'Ecran Fantastique (10/1983)
Jean-Marc Lofficier
La colossale saga de George Lucas, si elle devait s'achever avec le Retour du Jedi, resterait néanmoins une oeuvre unique dans l'histoire du cinéma.

Même ses détracteurs doivent convenir que Star Wars est plus qu'un film, ou une série de films. Quels que soient ses qualités ou ses défauts, son originalité, son message ou sa "profondeur", la saga de Star Wars est devenue un mythe moderne à part entière.
Comme tout le monde (ou presque) connaît Hercule, Moïse, les Trois Mousquetaires, Dracula, Sherlock Holmes, Tarzan ou James Bond - ou le Monolithe noir de "2001" -, nos futures générations se souviendront de Luke Skywalker, Darth Vader ou de la Princesse Leia.

Le recul de l'Histoire serait nécessaire pour juger l'oeuvre de Lucas, qui n'a au demeurant pas d'égale (et donc de points de comparaison) dans l'histoire du cinéma. En l'absence de celui-ci, force nous est de nous référer à des critères plus traditionnels, tout en constatant qu'ils sont néanmoins impuissants à embrasser ou évaluer le phénomène Star Wars. Dans le cas de la trilogie de Lucas, la somme est définitivement supérieure à ses composantes. Les trois films de la saga de Star Wars, pris dans leur ensemble, forment un tout qui dépasse et sublime chacun d'entre eux. Et même chaque film, considéré séparément, est encore supérieur à la somme des éléments qui le composent.

Le Retour du Jedi
est à la fois une amplification et un reflet des films précédents. C'est une "suite" au vrai sens du terme. Il y a dans la Trilogie de Lucas une harmonie, une structure et une symétrie qui deviennent maintenant apparentes. Plusieurs scènes-clés de la Guerre des Etoiles ou de l'Empire contre-attaque se trouvent réfléchies dans le Retour du Jedi, en même temps qu'elles gagnent une signification nouvelle.

L'importance du Retour du Jedi n'est pas, en effet, limitée à ce seul film: comme dans les paradoxes temporels, ses répercussions se prolongent dans le passé, et altèrent la réception que nous avions de Star Wars ou de l'Empire. Pour ne pas gâcher le plaisir des lecteurs qui n'ont pas encore vu le film, nous ne donnerons qu'un exemple du propos ci-dessus: notre compréhension du personnage de Darth Vader, tel qu'il était dans le premier et le deuxième film, est radicalement modifiée par Jedi. Nous découvrons un autre Vader, qui nous permet de mieux comprendre le Vader de l'Empire, voire de déchiffrer le Vader énigmatique de La Guerre des Etoiles.

Le retour du Jedi
doit donc être évalué dans le cadre entier de la saga. En ce sens, comme cela est souvent le cas dans les trilogies, Jedi est le film le plus complexe et le mieux structuré des trois. La Guerre des Etoiles était une introduction, à la simplicité plus apparente que réelle. L'Empire posait davantage de problèmes qu'il n'en résolvait. Seul Jedi allie la fraîcheur du premier film à la complexité du second.

Certains regretteront peut-être la nouveauté (ou naïveté) du premier film. Cette réaction procède d'une subjectivité intéressante. Le public a, certes, changé - en partie à cause de Star Wars ! - et les batailles de l'espace ne sont plus ce qu'elles étaient en 1977. Pourtant, Jedi réussit encore à nous ébahir par des effets spéciaux qui confirment la suprématie d'I.L.M. dans ce domaine. Enfin, le film retrouve cette attachante note d'humour-clin d'oeil qui marquait dans l'Empire. On se prend à songer que George Lucas a supervisé de plus près qu'il ne l'avait fait dans l'Empire le tournage du film. Certaines scènes établissant les relations entre les personnages, ou plus intimistes en nature, portent un peu la griffe du Lucas de Star Wars, voire d'American Graffiti.

Jedi n'est pas sans fautes, encore qu'il s'agisse de l'un de ces films où les défauts des uns seront les qualités des autres. Nous n'en voudrons pour exemple que les extraterrestres de Jabba le Hutt, jugés ridicules par les critiques les plus sérieux, et drôles par ceux plus sensibles à l'humour de la chose. Ou le montage de certaines scènes, telle la confrontation avec l'Empereur, qui, à notre avis, aurait pu être raccourcie de quelques secondes... On pourra également reprocher au film d'être cyniquement manipulateur. Les personnages de Ewoks, sont de toute évidence insérés à l'intention des marchands de jouets. En dépit de cela, les Ewoks sont non seulement indispensables au film, mais s'avèrent une réussite. Les collaborateurs de Lucasfilm ont visiblement consacré beaucoup de temps et de talent à la réalisation et à l'utilisation des Ewoks. Si manipulation il y a, elle n'affecte donc en aucun cas le déroulement artistique du film, ou le plaisir du spectateur.

Outre les effets spéciaux, pour lesquels l'adjectif "incroyable" retrouve un sens, l'aspect le plus attachant de Jedi est sans nul doute l'évolution des personnages, qui ont mûri. Oeuvre de transition, l'Empire laissait sur sa faim. Jedi aussi, mais pour une raison tout à fait différente ! On se prend cette fois, à réellement éprouver des sentiments pour Luke, Leia ou Solo. Mark Hamill, Carrie Fisher et Harrison Ford donnent ici une interprétation supérieure à celle de l'Empire. Un peu comme des amis de longue date récemment retrouvés, on souhaiterait qu'ils ne nous quittent pas si vite...

Les Cahiers du Cinéma (10/1983)
Michel Chion
Star Wars est une entreprise plus singulière qu'il n'y paraît. En réalité, bien peu au début auraient parié sur son triomphe. La règle à la fois commerciale et dramatique de ce final (le Retour du Jedi), c'est d'en montrer plus: montrer encore plus de spectacle, mais aussi en révéler plus sur les origines du héros. Star Wars est directement inspiré du Magicien d'Oz: la recette de ce troisième épisode est de mélanger à la formule du philtre magique de Star Wars, pour la parachever, une pointe d'amertume. Il faudrait alors commencer par constater que puisque le jeune public fait un succès à Star Wars, c'est donc qu'il aime toujours les mêmes histoires, ou plutôt: de nouveau les mêmes histoires. Ne s'en étonneront que ceux qui veulent croire qu'on peut réinventer une mythologie tous les matins. Star Wars raconte de vraies histoires d'Oedipe, de recherche du père, de quête de la loi et de la maturité. Tout ce qu'il y a de plus banal, dira-t-on, et qu'on apprend dans les livres d'école, mais voilà: où avez-vous vu qu'on les racontait encore sur les écrans de cinéma ? Certainement pas dans la plupart des films dits adultes, presque tous incapables de déployer la dimension symbolique des histoires qu'ils racontent, et qui, sans arrêt à ce niveau, biaisent, diffèrent, colmatent, se défilent. Si bien que ces films pour enfants sont encore les seuls où, par exemple, la figure du père n'est pas escamotée, travestie, ou tournée en dérision; et les seuls à parler ce dont parlait autrefois le moindre westerne: de morale. Dans cette fresque "naïve" qu'est Star Wars, il y a en tout cas plus d'espace pour rêver, en effet, que dans les trois quarts des films adultes, cultivés, et soi-disant affranchis (en réalité: le plus souvent bloqués eux-mêmes dans une pré-génitalité honteuse ou au contraire assumée). La plupart de ces films sont faits sur le dos du mythe, ce qui leur donne un sens. Par rapport au genre volontier jungien qu'est l'heroic fantasy, Lucas, qui lui emprunte de nombreux thèmes, les resitue dans une perspective beaucoup plus freudienne, et notamment beaucoup plus morale. L'élement maternel dans Star Wars est fantasmatique. L'élément marin n'a pas encore été utilisé. L'action évite les tourbillons, les "voies lactées", les "trous noirs"; l'espace galactique, chez Lucas, est plutôt comme un air.

En même temps, il apparaît à la personne la plus obtuse que l'originalité de ces films est lié à un effet de dynamique et de vitesse - qui était, jusqu'alors, finalement assez rare dans le space opera (penser à 2001, à Star Trek, où tout est lent dans l'espace). La morale élémentaire de Star Wars consiste à reconnaître l'existence de l'énergie (contre les morales de répression et de sublimation) et à en canaliser l'emploi, en considérant son "mauvais côté" (contre les morales de défense absolue). On remarquera aussi que l'évocation insistante de la Force, dans Star Wars, n'est pas associée à celle de la faiblesse: il y a des Rebelles à l'Empire, mais pas de représentation d'un peuple d'esclaves, de soumis, ou encore de fainéants. L'univers de Star Wars se révèle beaucoup plus moral que sentimental. Il restreint les effusions.

[A propos de la confusion entre un film d'aventure et sa parodie:] Le problème est de savoir quels sont les critères de démarcation entre "vraie" et "fausse" aventure. Car c'est de la même manière qu'ont été écrits d'innombrables romans d'aventure depuis la nuit des temps, et de scénarios, depuis le cinéma ! On ne peut pas non plus faire valoir qu'il n'y a pas d'auteur unique, d'implication personnelle visible dans l'histoire racontée. Le récit d'aventure ne suppose pas forcément la marque d'un auteur ou d'un fantasme personnel. Ce film peut jouer pour les jeunes d'aujourd'hui le même rôle de tremplin au rêve, et de strucuturation de l'imaginaire, qu'ont joué pour la génération précédente des films comme Moonfleet, La Prisonnière du désert.

Il y a aussi des gens comme moi qui y trouvent un cinéma dont ils pouvaient rêver dans leur jeunesse - et d'autre part, ceux qui font ces films, qui souvent eux-même ont été marqués par Moonfleet ou La Prisonnière du désert et qui vénèrent ces oeuvres, mais que cela n'empêche pas d'essayer de faire, non pas certainement mieux dans un sens esthétique, mais plus avant dans le domaine du spectaculaire. Le spectaculaire est en effet non pas la seule, mais une des grandes dimensions du cinéma et la logique est de ne pas économiser, de ne pas s'arrêter, de susciter le défi d'en faire encore plus et chez le spectateur le rêve d'en voir encore plus. Non sans des risques d'ailleurs, qui sont après tout de beaux risques. J'ai souvent ressenti les grands spectacles que je voyais enfant au cinéma comme les maquettes, même achevées et indépassables dans leurs formes, d'un rêve de spectacle projeté dans l'avenir, le cinéma que l'on fait actuellement en Amérique de cette sorte, j'en ai rêvé avant qu'il n'existe et ce rêve d'un certain nombre de spectateurs comme moi rencontre celui de réalisateurs qui ont eux-mêmes rêvé d'en faire encore plus. Tant pis si parfois ils se trompent, car eux - une partie d'entre eux, si l'on veut - vivent le cinéma; ils n'en thésaurisent pas l'histoire, ils la dépensent et en remettent l'enjeu sur le tapis.
Critiques mitigées
 
Revue du Cinéma (10/1983)
Jacques Zimmer
Le Retour du Jedi constitue une sorte d'apothéose de la dérision... Dans la bonne humeur. Tout dans le film est destiné à plaire au seul jeune public. Le pourcentage de personnages réellement humains s'amenuise. Citons Guy Gauthier: "En période d'inquiétude et de repli de l'Amérique sur elle-même, tout se résout par la réapparition du vieux fonds mythique anglo-saxon: ces vieilles légendes d'Ecosse emmenées dans les soutes du Mayflower avec la Bible et la grande Charte."

Télérama (28/12/1983)
Jean-Luc Douin
Si George Lucas avait une réelle personnalité, il l'aurait insufflée à ses héros, ces petits gars bien sages qui remuent ciel et terre pour faire triompher le Bien sur le Mal. Véritable héritier de Disney, persuadé que l'art doit être éducatif, il se comporte en chevalier de l'ordre moral, prônant la tradition, la confiance en l'être humain, la Force de la vertu et de la volonté. Sa vie est un conte moral, son oeuvre une religion.

L'Ecran Fantastique (10/1983)
Anthony Tate
Le Retour du Jedi, c'est le prototype même du film qu'on a désespérément envie d'aimer, de trouver bon... La saga de Star Wars fait maintenant si bien partie intégrante de la grande tradition du cinéma américain que l'on redoute d'avoir à émettre la moindre critique à son propos. Et puis il y a les regards de ces personnes massées devant l'entrée du Théâtre Egyptien où a lieu la projection de presse, ceux qui font la queue depuis près d'une semaine et qui vous dévisagent l'air de dire "Et n'essaie pas d'en dire du mal, hein...". Eh bien voilà: je suis venu, j'ai vu, j'ai été déçu...

C'est que Jedi avait des obligations envers les spectateurs, et pas seulement les fans de Star Wars, ceux qui ne croient pas à l'existence de Mark Hamill - pour eux, il est Luke Skywalker - et pour lesquels Han Solo est tout bonnement Dieu le Père sous sa forme humaine. Le problème, c'est qu'il s'est vendu, et au prix de sa future crédibilité. Mais voyons maintenant pourquoi ce film réussi et distrayant présente en même temps certaines lacunes.

L'intrigue est des plus simples, mais elle n'en contribue pas moins en cela à faire la part belle à certains points essentiels du scénario. Il serait facile d'imputer à la mise en scène de Richard Marquand la plupart des travers du film, mais ce serait bien mal connaître George Lucas ! Il y a plusieurs mois, déjà, la rumeur voulait que Lucas se dise tellement mécontent du travail de Marquand qu'il aurait été obligé de refaire lui-même certaines séquences capitales. Ce qui est un peu difficile à croire, à la lumière des propos fort dignes tenus par Marquand à l'égard de Lucas. Cela dit, quel sait quelles furent les divergences d'opinion des deux hommes lors du tournage ? La réalisation de Marquand était peut-être bien prosaïque pour The Legacy, mais il faut voir de quoi il était parti ! Il n'est besoin que de regarder Eye of the Needle et Birth of the Beatles pour se rendre compte du traitement qu'il peut réserver à un bon sujet. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'élément humain de ces deux films était particulièrement bien traité, et nul doute que c'est à lui que l'on doit les moments les plus sensibles, les plus touchants de Jedi.

Les acteurs en font trop ou trop peu: Luke et Darth Vader sont sans conteste les personnages principaux du film, on insiste lourdement sur leur caractère, leur personnalité et leurs motivations. Si bien que Darth apparaît comme le héros d'une histoire dont Luke n'est plus que l'un des instruments. Mark Hamill a fait des progrès en tant qu'acteur depuis ces six dernières années, et son personnage a mûri avec lui. Mais l'importance donnée à son rôle nuit à ceux de ses camarades Harrison Ford et Carrie Fisher qui se retrouvent relégués au rang de faire-valoir; du coup, voilà des comédiens de grand talent dont le moins que l'on puisse dire, est que les personnages qu'ils incarnent manquent singulièrement de substance. Et pourtant, tel est leur talent qu'ils parviennent à nous faire croire qu'ils ont leur importance dans le déroulement de l'action alors que le scénario s'ingénie à les ravaler à un niveau secondaire. C'est Billy Dee Williams qui en souffre le plus, son Lando n'ayant guère autre chose à faire qu'à paraître héroïque. Un vrai gâchis si l'on songe aux dons de cet excellent acteur.

La règle du jeu dans ce genre de film, c'est l'action, et de cela, Jedi n'est pas dépourvu. Il ne sombre pas dans l'erreur à laquelle avait succombé Empire strikes back - peut-être le meilleur film de la saga, à ce jour - en marquant le pas: il y a du mouvement dans Jedi, et en abondance ! Le rythme est à couper le souffle, et les responsables en effets spéciaux se sont surpassés - enfin, presque constamment. Certaines séquences, en effet, comme l'explosion de l'Etoile de la Mort, ne sont pas tout à fait à la hauteur de la situation. Ce sont toutefois les idées qui en sont la cause ici, et il va sans dire que les auteurs de Jedi ont beaucoup réfléchi: les images du croiseur stellaire démantibulé s'abattant comme une flèche sur le monde en-dessous sont presque trop belles pour être vraies, et l'on arrive pas à croire à l'explosion de flammes qui s'empare du coeur de l'Etoile de la Mort tant elle est prodigieuse. Les effets spéciaux optiques sont de toute beauté, dans la description du combat qui oppose l'Armada aux forces de l'Empire, en particulier. Il y a donc de l'action à profusion, et tout irait bien si l'on ne jugeait le film qu'à ce niveau.

Lucas a pris un risque important avec les Ewoks, ces bestioles aux airs de gros nounours qui aident Han et Luke dans leur combat contre les forces de l'Empire. Ils sont drôles et mignons comme tout... à moins qu'ils ne soient un prétexte pour le spectateur à assimiler les créatures extra-terrestres les plus délicieusement ridicules jamais inventées. Soit on les déteste, ou bien on en raffole, et Lucas a dû prendre le pari qu'il se trouverait un plus grand nombre de fans pour les adorer que pour les détester. Ils avaient une fonction à remplir, certes, en ce sens qu'il fallait bien une tribu d'"indigènes", alors pourquoi ne pas en faire des "choux-tout-plein" au spectacle desquels les petits enfants pourraient faire "OoOoOoh..." ? Mais on dirait que certaines des créatures bizarres, inquiétantes et merveilleuses (enfin, pas toujours merveilleuses)qui hantent l'âme de George Lucas ont trouvé le moyen de sortir pour se faufiler dans Jedi: il y a surabondance de monstres inédits. Seulement voilà: il ne faut pas mettre de la confiture sur le chocolat ! On a l'impression d'être cerné par les Muppets, et à certains moments, on a presque envie de hurler "Des gens !" D'autant que, si la plupart des êtres bizarroïdes issus de l'imagination fertile de Lucas font illusion, il en est d'autres qui ne sont visiblement pas crédibles. Les gardes porcins sont l'exemple même de ce genre de créatures auxquelles on ne croit pas. Enfin, Yoda est de retour, même si l'on ne fait que l'entr'apercevoir, et la scène sur son lit de mort est joliment enlevée. Il est intéressant de noter au passage que Lucas ne souhaitait pas vraiment montrer la mort de Yoda, et que c'est à la seule obstination de Marquand que nous devons cette belle séquence.

Tout aussi remarquable est le fait que pour un film centré sur des personnages familiers, celui-ci est tout de même dominé par la personnalité de deux nouveaux venus: l'Empereur, merveilleusement interprété par Ian McDiarmid, et Jabba le Hutt, le gros monstre répugnant apparenté à la limace, qui volent la vedette aux héros dans chacune de leurs scènes. Lors du combat final entre Luke et Darth, on a constamment conscience de la présence ignoble et malfaisante de l'Empereur, cerné par une atmosphère de mort et de mal presque palpable. Quant à Jabba, c'est une créature entièrement mécanique, oeuvre de Phil Tippett. On se demande néanmoins ce qui a bien pu motiver le changement si radical de conception, puisqu'il devait apparaître dès le début dans Star Wars, sous les traits d'une sorte de morse.

Venons-en enfin à la scène où Darth Vader apparaît sans son masque. Nous savons tous que Darth Vader, c'est Dave Prowse. C'est ce qu'il dit à tout le monde à chaque fois qu'il signe un autographe. La voix est celle de James Earl Jones, et à deux ils confèrent à Vader une vie propre. Alors pourquoi, au moment où il se démasque, est-ce Sebastian Shaw que l'on voit ? Tout le monde attendait de voir Prowse et d'entendre James Earl Jones, et voilà qu'on nous livre un parfait étranger ! Nous n'en voulons évidemment pas à Sebastian Shaw qui fait un Vader extrêmement convaincant, mais quelles que soient les tentatives réitérées de l'empire de Lucas pour reléguer Prowse dans l'anonymat au fil des années, par son vaillant combat pour une certaine reconnaissance ainsi que par le soutien fidèle de ses fans, il nous semble qu'il avait bien mérité d'avoir enfin une heure de gloire. Il ne l'a pas eue, et c'est bien dommage...

Après vous avoir dit tout ce que j'avais sur le coeur, je peux maintenant retourner voir Jedi et m'en régaler tout mon saoûl. Cela étant, un film, c'est quelque chose de très particulier, que l'on reçoit subjectivement. Et je sais que le public européen adorera Jedi tout autant que les spectateurs américains. Tâchez seulement de ne pas le regarder avec un oeil trop critique !
Critiques négatives
 
Les Cahiers du Cinéma
Bill Krohn
Le film commence mal, par une scène d'exposition toute noire et grise; nous sommes à bord du vaisseau impérial, l'Empereur lui-même va bientôt arriver, pour chercher à comprendre pourquoi la construction de la nouvelle Death Star est si lente; c'est une allusion transparente au pouvoir du producteur, et quand il suscite l'épouvante d'un personnage sans visage, ce dernier passe inévitablement pour un substitut du metteur en scène.

Jabba est une marionnette terrifiante: un fruit du croisement entre le Caterpillar de Lewis Carroll et le Trimalchion du Satyricon; les Ewoks ont la démarche de Mifune dans le MacBeth de Kurosawa. Marquand ne parvient pas même à créer une atmosphère. Jedi, c'est la livraison convenue. On n'a pas regardé à la dépense pour retrouver le style et la philosophie du premier film, en évitant les économies qui gâchent la plupart des séries, et en ajoutant des petits délices à l'intention des amateurs fanatiques. La décision de donner aux fans "plus que tout" a été un argument publicitaire décisif. Cette stratégie peut s'avérer brillante, du moins à l'égard des plus jeunes spectateurs; pour eux, beaucoup trop, c'est juste assez, et la répétition ne fait qu'augmenter le plaisir.

Cinéma 83 (10/1983)
Pascal Dumont
Ce sixième chapitre ne raconte plus rien: il ne fait que développer les éléments narratifs des deux films précédents (essentiellement le second) afin de les porter à leur logique dénouement. La veine imaginaire qui animait L'Empire... semble épuisée. On n'observe plus de relance fantasmatique à propos des personnages et des intrigues, mais au contraire la clôture de tout ce que cela donnait à rêver. Le film a basculé dans la trivialité en nous montrant une galerie de monstres éructant et bavant. La Force n'a pas été avec Lucas.

Positif (11/1983)
Emmanuel Carrère
[en notule]
Le Retour du Jedi est un récit initiatique particulièrement appuyé et comme une étape de plus dans la mégalomanie délégatrice de l'empire Lucas et dans la crétinisation du cinéma américain. Le seul biais non pertinent pour aborder ce film, c'est le cinéma: c'est très bien de s'occuper des enfants, mais ne plus faire des films que pour eux risque de devenir préoccupant à la longue.

Première (10/83)
Un film moins intéressant que ses illustres prédecesseurs et qui lorgne davantage du côté du Muppet Show que du cinéma traditionnel de science-fiction. [...] Mais l'adjonction gratuite d'une multitude de monstres et de personnages fantastiques donne au film une tonalité humoristique plutôt inattendue et qui est peut-être (souhaitons que non...) le signe précurseur d'un épuisement créatif.
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