L'opinion d'Omael !
"Déjà, en commençant par dire que Duel of the Fates est un morceau superbe, habilement écrit, et très rafraîchissant dans le contexte musical de
SW. (Replaçons-nous dans le contexte pré-prélogique, quand
TPM n'exsitait pas encore)
Le morceau est écrit en suivant de façon surprenante les principes modernes de la technique du cut and paste, qui trouve ses bases dans la musique contemporaine, classique même (mais là je suis plus trop expert, on pourrait quand même évoquer Greig, exemple assez accessible, bien qu'il n'est pas en fin de compte le plus parlant non plus lol si quand même, avec le monumental crescendo de la Danse le Château du Roi de la Montagne qui illustre bien le raisonnement que je vais tenter de proposer ), et qui se perpétue aujourd'hui avec la musique de DJ, ou l'électro.
Ces principes consistent à construire le morceau comme une construction de légo, c'est-à-dire en utilisant un nombre restreints d'échantillons, de motifs cours (les fameux "sample" et différents que l'on emboîte à la suite, et que l'on superpose (par exemple on a un segment rythmique d'une seconde que l'on fait se répété en boucle tout au long du morceau, par dessus on y ajoute un échantillon mélodique de deux secondes que l'on fait également se répété tout au long du morceau, puis un échantillon de basse, etc...). On obtient donc un musique qui fonctionne par couches, très lancinante (comme l'est incontestablement DOTF) ce qui tranche énormément avec les pièces de la trilogie, mélodiques, dynamiques et constitués de nombreux mouvements et ponctués de multiples demi-cadences et cadences. Ici, Duel of the Fates perd de la puissance mélodique propre à la trilo ce qu'il gagne en énergie, en rythme et en originalité.
DOTF se compose donc de trois motifs distincts (trois, comme le nombre de combattants, ce qui me conforte dans l'hypothèse qu'à formulé Alcatel), tous de textures et d'objectifs différents :
- La trame rythmique de fond constituée par la boucle tourbillonnante de cordes qui se répète en ostinato tout au long du morceau, illustrant via les multiples jeux de crescendo et decrescendo la dynamique de la tension du duel.
- La mélodie principale du morceau, porté par les bois et les cuivres, portant tout le souffle dramatique, et l'élan de bravoure et d'héroïsme du combat. Une mélodie parsemé tout au long du métrage.
- Puis il y a le choeur qui donne à la pièce toute la mysticité requise, en transcendant la portée du combat, en approfondissant sa perspective tragique, inéluctable.
Clairement, l'aspect space opera, ou plus simplement d'opera, dans la musique de
SW n'a jamais été aussi forte, et aussi ingénieusement utilisée, le choeur semblant conter l'histoire comme une force supérieure, au-dessus de l'action, dictant aux acteurs de la tragédie leur destin fatal.
Le génie de Williams réside dans la combinaison de ses trois éléments, une combinaison qui évite l'aspect répétitif qu'aurait pu induire fatalement ce genre d'écriture. Et il le fait tout en collant efficacement à la dynamique de l'action, en ménageant brillamment les effets. Tout ça en agençant et en modulant seulement trois courts motifs !
On obtient ainsi 3 principales variations (plutôt que mouvements, étant donné ici qu'il n'y a quasiment aucune dynamique mélodique) délimitée par la succession crescendo/decrescendo. La fin de la première variations (de 1'30'' environ à 2') est sublime car c'est là que fusionne les trois textures du morceaux, quand les cordes, les cuivres et bois, et le chœur se rejoignent dans la même ligne mélodique.
Il y a également l'intermède très tendu de 30 secondes composé exclusivement de cuivres et bois qui suit la première partie et qui rejoint la deuxième, l'acmé de la pièce (vers les 3 minutes) portée par le chœur seul, et le redémarrage merveilleux du tumulte jusqu'au final.
Williams évoque évidemment Alexender Nevski, de Prokofiev, comme source principale d'inspiration, ainsi que Igor Stravinski et Benjamin Britten. Pour le texte, il cite l'auteur du poême original, Robert Graves, dont deux couplets particuliers l'ont interpellé, ceux qui ont été traduits en sanskrit et constituent les paroles du choeur :
"Derrière les mots naît un terrible combat,
Alors qu'un autre fait rage dans l'esprit"
"Derrière l'esprit se cache la volonté,
Derrière la volonté, la Force ou la misère d'existence"
Ou autrement dit le côté lumineux ou le côté obscur de la Force, qui se cachent derrière la volonté, ou l'illusion de volonté, le destin étant la seule instance à l'oeuvre, via la Force.
Il est interessant de noter ce terrible combat qui fait rage dans l'esprit alors que le combat qui nous est effectivement proposé à l'écran oppose trois combattants, Dark Maul contre Obi-Wan et son Maître Qui-Gon (le ça s'opposant au surmoi et au moi ?). Trois opposant, trois "motifs", trois variations...
Un morceau formidable !"
Je veux faire des films historiques épiques, des séries télévisées, des documentaires et des films d'avant-garde expérimentaux !